La Ligue démocratique (Ld) n’a pas, comme bien d’autres, envoyé son leader seul voir le chef de l’Etat. Hier, c’était une délégation dirigée par Abdoulaye Bathily et composée de Yéro Deh, ancien ministre de la Fonction publique, Ousmane Badiane, chargé des élections, et Mme Khoudia Mbaye, présidente des femmes de ce parti. L’audience était longue, mais a permis à la Ld de rappeler à Me Wade ses engagements pris dans le passé. Lorsque Bathily a vertement critiqué le processus électoral et l’accaparement des médias publics, notamment la Télé, Me Wade a appelé le Premier ministre Macky Sall et le ministre de l’Intérieur Ousmane Ngom, comme pour se défausser sur eux.
Il semble que le Président Wade ignore tout des dysfonctionnements notés par l’opposition sur le processus électoral et la gestion des médias publics. Hier, lors de l’audience qu’il a accordée à la Ligue démocratique/ Mouvement pour le parti et le travail (Ld/Mpt), dans le cadre de son appel au dialogue, il s’est déchargé sur le Premier ministre Macky Sall et le ministre de l’Intérieur Me Ousmane Ngom, quand Abdoulaye Bathily a évoqué ces questions qui minent la paix sociale. En effet, le chef de l’Etat n’a pas hésité à appeler au téléphone le ministre de l’Intérieur, alors que la délégation de la Ld lui exposait ses inquiétudes sur le processus électoral, rapporte le Pr Bathily. D’ailleurs, ce coup de fil a permis aux «Jallarbistes» de décrocher une rencontre entre les autorités en charge de la question électorale et les partis politiques pour aplanir les divergences sur cette question, apprend-on des leaders de la Ld.
C’est que la délégation conduite par le Pr Bathily ne s’est pas contentée de citer les questions sans aller au fond devant leur hôte. Ousmane Badiane, le chargé des élections de la Ld a accompagné la délégation pour pouvoir mieux expliquer au Président les questions qui préoccupent l’opposition, concernant la gestion du processus électoral. En fait, Bathily a plaidé devant Me Wade la nécessité d’un consensus sur cet aspect. Dans sa déclaration liminaire dont nous avons eu copie, il a rappelé à Me Wade que c’est le dialogue politique hérité des Présidents Senghor et Abdou Diouf qui a rendu possible l’alternance survenue le 19 mars 2000. Car, argue-t-il, ce sont ces dialogues qui ont abouti à des consensus sur le code et le fichier électoral de 2000.
L’autre point soulevé par les «Jallarbistes» à propos duquel le chef de l’Etat a interpellé sur-le-champ le Premier ministre Macky Sall concerne «l’accaparement des médias publics.» Bathily dira à Me Wade qu’il trouve «inacceptable le fait que la Télévision nationale soit accaparée par le Parti démocratique sénégalais et ses groupes de soutien». En effet, rappelant que le Haut Conseil de l’audiovisuel (Hca) est le fruit d’une bataille menée par la Ld et le Pds, alors dans l’opposition entre 1989 et 2000 ; Bathily souligne à Me Wade qu’aujourd’hui sous l’alternance, il n’y a même pas une structure à laquelle les partis politiques peuvent adresser leurs griefs. En effet, le Hca dissout, le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra) qui l’a remplacé n’est pas encore fonctionnel. Sur ce, révèle Bathily, Me Wade a appelé son Premier ministre qui a promis de prendre les dispositions nécessaires pour y remédier.
Seulement, toutes ces mesures prises par le chef de l’Etat n’ont pas convaincu Bathily d’adhérer à un gouvernement d’union ou d’urgence nationale, comme le propose Me Wade. Bathily a réaffirmé à son hôte son ancrage dans l’opposition ; non, sans profiter de ce tête-à-tête avec le Président pour exprimer sa désapprobation sur la question des libertés individuelles et publiques. «Les Sénégalais pensaient qu’avec l’alternance politique, les libertés individuelles et publiques allaient être élargies, renforcées et consolidées. C’est notre engagement commun.» En fait, l’ancien compagnon de Me Wade lui a rappelé que, tous les deux, «alors dans l’opposition, ont fait tous genres de déclarations contre l’ancien régime». Et cela n’a jamais, pour autant, fait l’objet de convocation à la Police. Bathily fait constater à Me Wade qu’aujourd’hui, «on assiste à une érosion continue des conquêtes démocratiques en matière de libertés individuelles et collectives. En l’espace de six ans, la Dic est transformée en instrument de répression politique».
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