Une organisation noire en mal de publicité décerne au Sénégal une «distinction» sur des bases très floues, que Me Wade s’empresse de s’en glorifier. Et met la main à la poche pour le plaisir.
Les langues se délient aux Etats-Unis sur le prix que le président de la République Abdoulaye Wade a reçu le mardi dernier, au nom de la Nation. Décerné par la fondation noire américaine, Celebrate Africa, ce prix de meilleur pays africain, selon l’un des membres du jury qui l’a décerné, explique que les critères retenus pour accorder le prix tiennent d’abord au comportement des Sénégalais émigrés au Etats-Unis : «Ce sont des gens dynamiques, travailleurs et honnêtes» soutient-elle.
Les autres critères, selon cette personne qui a été jointe au téléphone hier, depuis Dakar, sont, «le respect des Droits de l’Homme au Sénégal, la promotion et l’églité des sexes (Gender equity, selon ses termes), et la lutte contre le terrorisme» ! Manifestement, Mme Luanda Camara, cette Africaine-Américaine, membre du comité de direction de cette fondation, ne connaît pas grand-chose du Sénégal. Elle explique que son jury avait pris la décision, il y a huit mois, d’accorder ce prix au Sénégal. Le président Wade est venu s’y plonger après, presque comme un cheveu dans la soupe.
«C’est un Sénégalais vivant aux Etats-Unis, et très proche des mouvements de lutte pour la promotion des droits civiques, nommé Abdoulaye Thiam, qui nous a mis en contact avec le président Abdoulaye Wade. Quand ce dernier a été informé de la distinction que l’on voulait décerner à son pays, il a été très enthousiate, et nous a demandé de repousser la date pour lui permettre de prendre part à la cérémonie.». Me Wade avait-il été approché avant par les organisateurs ? Non, affirme Mme Camara. Les gens s’étaient intéressés à la communauté sénégalaise à la suite des célébrations des journées de Cheikh Ahmadou Bamba (Bamba Day), à New York. «Il y avait eu des tensions entre les Noirs américains et les Sénégalais, et certaines personnes se sont engagés à aplanir les difficultés. C’est ainsi que nous avons connu Abdoulaye Thiam, par qui nous avons pu mieux connaître la vie des Sénégalais de New York. Ce sont ces personnes qui nous ont incités à honorer le Sénégal.». Des critères d’une rigueur très scientifiques, comme on peut le juger.
Le jury de la fondation, dans lequel on trouve de personnalités connues en Amérique comme un ancien ambassadeur du Nigéria, enseignant dans les Universités américaines, Dr Chika Onyani, l’ancien maire de la capitale américaine, M. Marion Barry, et Mme Camara, en plus de certains hommes politiques américains, a juste pris en considération le comportement général de la communauté sénégalaise vivant aux Etats-Unis.
Interrogée sur ce qu’elle savait de l’emprisonnement de certaines personnalités politiques au Sénégal, Mme Camara, qui semble être une Américaine de pure souche, à son accent et selon ses déclarations, avoue ne s’etre intéressée au Sénégal que par ouïe-dire : «Nous avons appris que le Sénégal est un pays qui respect l’Etat de droit (The Rule of Law, dit-elle), et qui fait la promotion de l’égalité des sexes, cela nous suffit !», assure-t-elle. Mais aucun d’eux n’a cherché à savoir ce qu’il en est en réalité.
Et la composition du Conseil d’administration du Fonds, se caractérise plus par la couleur de la peau («Vous êtes né au Sénégal, et moi aux Etats-Unis, mais nous sommes tous Noirs avant tout», dit Mme Camara) que par la probité. L’ancien maire de Washington a été rendu célèbre pour une histoire de drogue qui l’avait conduit en prison, il y a quelques années.
Sur la question de savoir à qui étaient destinées les recettes du dîner de gala au cours duquel la distinction a été remise à Me Wade, la dame reconnaît sans ambages que la somme allait servir aux activités de promotion de la Fondation. En s’empressant d’ajouter que même si le Chef de l’Etat a participé en invitant plusieurs personnes, ce n’était pas l’argent qui a motivé le prix.
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