MOUSTAPHA NIASSE LEADER DE L’AFP SUR LE FORT TAUX D’ABSTENTION : "C’est la défaite personnelle de Wade"

Nettali.com : Les premières estimations du scrutin législatif font ressortir un fort taux d’abstention, quels commentaires en faites-vous ?

Je suis à l’étranger depuis quelques jours. Je serais bientôt à Dakar mais je suis attentivement tout ce qui s’y passe. Et je dois dire pour répondre à votre question que nous avons atteint au Sénégal le niveau le plus élevé du raz-le-bol des populations. J’attends d’avoir de plus amples informations mais ce taux d’abstention qui est très élevé est la conséquence de la violation constante par le régime d’Abdoulaye Wade des libertés inscrites dans la Constitution et des mauvais résultats réalisés sur le plan économique. La crise est réelle. Au lendemain de son élection, Abdoulaye Wade n’a rien trouvé de mieux à faire que d’augmenter les prix des denrées de première nécessité. Le lundi qui a suivi sa victoire fabriquée, il a augmenté le prix du riz. Après il a fait la même chose avec le gaz. Il n’a cessé d’augmenter les prix sans que personne ne comprenne. Sur le plan des libertés, vous êtes journaliste mais si vous écrivez des choses qui ne sont pas dans l’intérêt du régime, vous allez en prison. Il fait ce qu’il veut avec la Constitution. Tout cela recoupe aussi les craintes des bailleurs de fonds qui ont relevé dans le dernier rapport de la Banque mondiale des problèmes sur la Sénélec, constaté que le gré à gré est toujours de rigueur au Sénégal et d’une façon générale que l’économie sénégalaise a des problèmes. Sur le plan international, notre pays est devenu la lanterne rouge. C’est donc un signal fort pour le régime en place. Mais ils seront incapables de bien l’interpréter.

Un signal fort pour le régime mais n’est-ce pas aussi une victoire pour le front Siggil Sénégal ?

Je ne me réjouis pas de l’abstention. C’est un recul démocratique grave. Quand un aussi grand nombre de citoyens refusent de se rendre aux urnes, c’est qu’il y a un problème. Mais comme je vous disais, ils seront bien capables de bien l’interpréter. C’est lui qui a dirigé sa liste puisqu’il s’est affiché et a battu campagne. Donc, il faut qu’il assume. C’est la défaite peronnelle de Wade. La campagne a d’ailleurs tourné contre le boycott de l’opposition. Alors que l’accroissement des denrées de premières nécessités est réel et que nos écoles s’enfoncent dans les marigots de l’oubli, il estime que c’est nous le problème. Eh bien, les populations viennent de lui montrer que le vrai problème, c’est lui et ses hommes.

Disons qu’il a trébuché sur les législatives à cause du faible taux de participation après avoir gagné la présidentielle.

Je ne parle jamais moi de résultats qu’il a obtenus à la présidentielle mais de score qu’il s’est attribué. Je reste constant. Wade a obtenu le score qu’il s’est donné grâce à du gribouillage et des manipulations. Il s’est attribué des résultats. Maintenant si on était partant pour les législatives, il aurait relevé la tête pour dire : « je les ai encore battus ». Les choses, je crois commencent à être claires.

Vous parlez de crise grave mais est-ce qu’il y a une solution selon vous ?

Vous savez, moi je respecte mon pays et je l’aime. Les solutions existent toujours. Tous les problèmes ont des solutions planifiées dans le temps et dans l’espace. A l’interne comme à l’international. Mais il y a une question relative à la crédibilité de l’homme.

Un problème aussi relatif à la crédibilité de Mata Sy Diallo qui a été reçue en audience par le chef de l’Etat dans des conditions tout de même bizarres.

Vous savez le vendredi qui a précédé l’audience avec Wade, Mata m’a téléphoné pour me dire : « je voudrais vous voir ». Quand elle est venue, elle m’a dit que le Président Wade lui a envoyé un émissaire la veille. Elle m’a donc informé. Je lui ai recommandé d’y aller et de l’écouter. J’ai beaucoup de respect pour Mata Sy Diallo qui a toujours été fidèle à ses choix. Je n’ai eu aucun doute qu’elle ne transhumait pas, qu’elle ne quittait pas l’Afp. Maintenant pour les raisons de l’audience, cela ne relève que de lui. Mais il faut savoir qu’on ne plante pas sa tente au pied d’une digue qui cédera.