Quel sens donné au Prix Félix-Houpjouët Boigny, dernièrement attribué au Président Wade contre quasiment l’avis de tous. Les responsables de l’Unesco savent peut-être bien ce qu’ils font en attribuant ce prix à Me Wade. Et les hommages rendus au Président Wade par son prédécesseur, Abdou Diouf et le Président français Jacques Chirac qui connaissent bien Me Wade peuvent faire penser que c’est plutôt une invite à sauver la case Sénégal contre de potentiels troubles. Le Président Wade, presque obligé de mériter son prix...
Mardi dernier, le président sénégalais Abdoulaye Wade recevait le prix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix et la démocratie. Il s’agit-là du prix le plus contesté jamais décerné à un chef d’Etat par l’Unesco. En effet, en dehors de l’opposition sénégalaise qui a manifesté à Paris contre le prix décerné à M. Abdoulaye Wade, des organisations de la société civile, mais également des journaux français se sont étonnés du choix de l’Unesco.
C’est ainsi que d’aucuns s’interrogent sur les critères qui ont poussé le jury du prix Houphouët-Boigny à porter son choix sur Abdoulaye Wade. Alors qu’au Sénégal, des leaders politiques sont emprisonnés, poursuivis en justice, des journalistes et responsables de l’opposition agressés. S’y ajoute la remise en cause du consensus sur le processus électoral. Sans compter la décision unilatérale de proroger le mandat des députés et de coupler le processus électoral et la recrudescence de la violence en Casamance. Seulement, il ne manque pas d’observateurs qui pensent que le prix de Wade est ce qu’on pourrait appeler une « médaille-rappel à l’ordre ». Cette analyse est appuyée par le discours du président Abdou Diouf, parrain du prix qui a appelé son successeur à la tête de l’Etat du Sénégal à honorer ce prix en essayant d’aller de l’avant dans le renforcement de la paix et de la démocratie au Sénégal. Mieux, Wade devrait éviter au Sénégal le syndrome ivoirien avec le vieux Houphouët-Boigny dont le nom est donné au prix et qui avait laissé la Côte d’Ivoire dans une guerre entre ses nombreux héritiers. Wade a-t-il bien compris le message ? Il semble que oui avec notamment l’engagement sur le second tour qui ne sera pas supprimé. Mais il y a encore des observateurs qui restent assez sceptiques, connaissant notamment le peu de crédit que Wade accorde à ses promesses. Car, il ne serait guère surprenant de voir Wade maintenir certes le second, mais en l’ouvrant à quatre. Des journaux ont déjà fait été d’une telle éventualité. L’autre grille de relecture que l’on peut faire de l’attribution du prix Houphouët-Boigny à Wade, c’est celle liée à l’emprisonnement de leaders politiques. On se rappelle, en effet, que juste quelques heures avant la remise du prix Houphouët-Boigny au président Wade, tous les responsables politiques qui étaient encore en prison ont pu recouvrer leur liberté. Il s’agit notamment de Jean-Paul Dias du Bloc des centristes gaïndé (Bcg) et de Pape Diouf, proche de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck. Justement, parlant de l’ancien Premier ministre, il ne serait pas saugrenu de poser la question de savoir si le prix Houphouët-Boigny ne le sauve pas définitivement de la prison. En fait, depuis que Seck a déclaré sa candidature à la présidentielle de 2007, il ne manque d’informations faisant état d’une éventuelle seconde incarcération. Surtout que son dossier reste encore pendant devant la justice. Aujourd’hui, il serait mal vu pour Wade d’envoyer en prison un de plus sérieux challengers aux prochaines, après avoir reçu un prix pour la recherche de la paix et le renforcement de la démocratie.
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