Interdiction de la mendicité : Les maîtres coraniques sonnent la riposte à Ziguinchor

Mécontents, les maîtres coraniques de Ziguinchor le sont. En conférence de presse hier, ils ont dénoncé l’attitude de l’Etat considérée comme une volonté de combattre l’islam, exigé la libération de leurs camarades incarcérés à Dakar et réclamé des concertations autour de la question de la mendicité.

(Correspondance) - Interdire la mendicité, c’est combattre l’islam. Telle est la conviction des maîtres coraniques de Ziguinchor. Ce sentiment a été exprimé hier au cours d’un face-à-face avec la presse. Irrités par la loi sur l’interdiction de la mendicité, les maîtres coraniques qui s’activent dans une centaine de ‘daaras’ dans la région, fustigent le caractère contraignant de cette ‘mesure unilatérale’ qui risque, selon eux, de tuer l’enseignement coranique.

‘Le gouvernement doit comprendre que nous sommes contraints de soumettre les enfants à la mendicité pour faire face aux nombreuses charges’, rappelle le porte-parole des maîtres coraniques, Ibrahima Fall. Selon lui, c’est parce que les maîtres coraniques n’ont pas de soutien qu’ils se retrouvent dans cette situation d’indigence. Laquelle les oblige à envoyer les enfants tendre la main. Et pourtant, de la même manière qu’il aide les écoles françaises, l’Etat, de l’avis d’Ibrahima Fall, devrait aider les écoles coraniques. ’Même les écoles privées qui enseignent le français bénéficient de ce soutien’, constate-t-il pour s’en désoler. ‘Nous aussi, nous participons à la formation des enfants. Par conséquent, nous devons bénéficier d’une certaine considération de la part des autorités’, clament en chœur ces maîtres coraniques qui se désolent du sort qui leur est réservé.

Le plus grave, s’offusquent-ils, ‘c’est qu’au lieu de nous aider pour qu’on puisse maintenir les enfants à la maison, l’Etat nous jette en prison parce que nous envoyons les talibés mendier’. Cette mesure qui expose les maîtres coraniques à des sanctions pénales est inacceptable, de l’avis d’Ibrahima Fall qui demande à la place des concertations. ‘Ces consultations devraient d’ailleurs précéder la mise en place d’une loi interdisant la mendicité’, soutient-il, avant de préciser : ‘Si le gouvernement nous avait consultés, on aurait pu trouver ensemble des solutions qui éviteraient des frustrations’.

D’ailleurs, les maîtres coraniques de la capitale du Sud exigent la libération de leurs collègues condamnés à des peines de prison ferme pour avoir soumis des enfants à la mendicité. Et pour cela, ils donnent un ultimatum d’une semaine à l’Etat. Passé ce délai, ils se donnent le droit de mener des actions pour amener les autorités à prendre en charge cette revendication.

Pour eux, le gouvernement à travers cette loi est en train de mettre en place les germes d’une instabilité. ‘Ce qui est préjudiciable pour le Sénégal’, de l’avis des maîtres coraniques de Ziguinchor, pour qui il est encore temps que l’Etat se ressaisisse afin d’éviter des situations de révolte. ‘Pour cela, il faut libérer nos camarades incarcérés, retirer la loi et promouvoir des concertations sur la question’, conseillent-ils fermement.