Réforme en vue : Wade veut faire reculer la Justice de 16 ans

Depuis qu’il a lancé l’idée de la réforme du système judiciaire actuel, vieux de seize ans, le président de la République n’en démord pas. Pas plus tard qu’hier, le président de la République a émis le vœu de voir cette réforme effective d’ici la rentrée solennelle des cours et tribunaux de l’année prochaine.

La réforme du système judiciaire sénégalais de 1992, communément appelée ‘Réforme Kéba Mbaye’, qui a vu l’éclatement de l’ancienne Cour suprême en plusieurs juridictions que sont le Conseil constitutionnel, la Cour de cassation, le Conseil d’Etat et la Cour des comptes, avait été saluée à l’époque comme étant une avancée significative qui répondait aux exigences de l’heure. Seize ans après l’avènement cette réforme, elle est vouée aux gémonies par le président de la République, par ailleurs, président du Conseil supérieur de la magistrature (Cms) pour son inefficacité, mais surtout en ce qu’elle est budgétivore.

Selon le président Wade, la réforme de 1992 n’a pas permis de raccourcir les délais de jugement et de faire des économies de deniers publics. ‘De quelque point que l’on se place, la réforme de 1992 n’a pas été concluante’, a décrété hier le président Wade, à l’occasion de la rentrée solennelle des cours et tribunaux. A titre illustratif, il donne l’exemple du Conseil d’Etat pour mieux mettre en exergue les lenteurs de la justice, décriées par les justiciables. ‘Sur 137 affaires dont le Conseil d’Etat a été saisi, il n’a rendu que 11 jugements en 2006 . Cela pose la question de l’efficacité des dépenses, alors qu’il est composé de douze magistrats’, note Me Wade. Le Conseil constitutionnel, en quinze ans d’existence, n’a guère fait mieux en dehors de la proclamation des résultats électoraux.

Toutefois, selon le chef de l’Etat, ‘cela ne remet pas en cause la validité des magistrats. C’est le système et ils ne sont pas responsables du système dans lequel on les met pour juger. C’est l’exécutif et le législatif qui les mettent dans un système’. C’est pour toutes ces raisons que le président de la République, après avoir accusé réception du rapport du premier président de la Cour de cassation, Pape Omar Sakho, sur l’évaluation de la réforme du système judiciaire, a clairement dit son option pour une réorganisation de notre système judiciaire pour que l’on se retrouve, d’ici l’année prochaine, une autre architecture juridique. Et le nouveau système que le chef de l’Etat appelle de ses vœux n’est rien d’autre qu’un retour à l’ancien système de la Cour suprême.

Comme modus operandi, le président Wade propose une fusion de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat dans une Cour suprême unique, tout en maintenant le Conseil constitutionnel et la Cour des comptes du fait du symbolisme de leurs jugements et de la spécificité de la composition de leurs membres. ‘Je crois qu’il faut une Cour administrative autonome. Et il faut fusionner la Cour de cassation et le Conseil d’Etat dans une Cour suprême unique. Ce regroupement permettra une réduction des dépenses et une plus grande efficacité’, estime Me Wade. Toutefois, le chef de l’Etat se dit ouvert à tous les avis portant sur la réorganisation de notre système judiciaire. Dans ce sillage, il a invité les juristes à s’approprier le débat et à faire des recommandations allant dans ce sens.