L'enrichissement illicite

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  • Article ajouté le : 01 Mercredi, 2015 à 13h04
  • Author: Just ndiaye

L'enrichissement illicite

Les travaux de recherches effectués par notre confrère Gervais NDIRAKOBUCA sur l’enrichissement illicite que je souhaite partager avec vous, mérite une réflexion.

La Convention des Nations Unies Contre la Corruption est le premier instrument juridiquement contraignant à s'appliquer à l'échelle mondiale sur l’enrichissement illicite. La CNUC a été adoptée en 2003 et est entrée en vigueur en 2005. Elle a défini en des termes clairs l'infraction d'enrichissement illicite. D'après la Convention, l'enrichissement illicite s'entend comme « une augmentation substantielle du patrimoine d'un agent public que celui-ci ne peut raisonnablement justifier par rapport à ses revenus légitimes ».

 

Par rapport à l'infraction d'enrichissement illicite, en son article 20, la CNUC dispose que «Sous réserve de sa Constitution et des principes fondamentaux de son système juridique, chaque État Partie envisage d'adopter les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale, lorsque l'acte a été commis intentionnellement, à l'enrichissement illicite (...)».

La Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte contre la Corruption (CUAPLC) est le principal texte juridique adopté sur le continent africain en matière de lutte contre la corruption. Adoptée en 2003, elle est entrée en vigueur en 2006.

 

La convention fait référence explicite sur l'enrichissement illicite et en donne une définition claire. L'enrichissement illicite est défini comme étant «l'augmentation substantielle des biens d'un agent public ou de toute autre personne que celui-ci ne peut justifier au regard de ses revenus ».

Selon l'article 31 de la CACC, « Chaque État Partie prend, dans toute la mesure possible dans le cadre de son système juridique interne, les mesures nécessaires pour permettre la confiscation: a) Du produit du crime provenant d'infractions établies conformément à la présente Convention ou de biens dont la valeur correspond à celle de ce produit; b) Des biens, matériels ou autres instruments utilisés ou destinés à être utilisés pour les infractions établies conformément à la présente Convention

Chaque État Partie prend les mesures nécessaires pour permettre l'identification, la localisation, le gel ou la saisie des biens ou produits

 

En son article 8, alinéa 1, la CUAPLC dispose que« Sous réserve des dispositions de leurs lois nationales, les Etats parties s'engagent à adopter les mesures nécessaires pour définir l'enrichissement illicite comme infraction, en vertu de leurs lois nationales ».

La CUAPLC offre aux Etats le choix de ne pas incriminer l'enrichissement illicite si le droit national ne le permet pas. En effet, beaucoup d'analystes ont considéré les dispositions sur l'enrichissement illicite comme portant atteinte au principe de présomption d'innocence garanti dans les Constitutions de plusieurs pays comme étant un droit fondamental.

Quant à la preuve, comme l'indiquent André Vitu et Roger Merle, est tout moyen permettant d'affirmer l'existence ou la non existence d'un fait donné ou encore, l'exactitude ou la fausseté d'une proposition. En général, il revient au Ministère Public de produire tous les éléments prouvant la culpabilité du prévenu en vertu du principe selon lequel « la charge de preuve incombe au demandeur ». Or, en matière d'enrichissement illicite, le Ministère Public ne dispose pas souvent des preuves suffisantes pour établir la culpabilité de la personne mise en cause. En effet, les actes de corruption ayant eu lieu entre deux personnes et d'une façon clandestine, il serait difficile à la partie poursuivante d'avoir des preuves. Le seul élément matériel visible est l'immensité de la richesse par rapport aux revenus légaux du corrompu. Ainsi, le prévenu serait appelé à justifier l'origine légal de sa richesse, atténuant ainsi le principe de présomption d'innocence et la charge de la preuve, qui en droit pénal général, revient à la partie poursuivante. Ceci constitue une démarche contraire au principe de la procédure pénale.

Les défenseurs des droit de l'Homme se sont opposés à l'autonomisation de l'infraction d'enrichissement illicite, car posant la question de droits fondamentaux, notamment la présomption d'innocence.

L'idée qui a été opposée à ces défenseurs de droit de l'Homme a été que l'enrichissement illicite est du ressort du droit pénal spécial. En droit, le spécial déroge au général et le délit d'enrichissement illicite qui obéit à une procédure spéciale ne doit se voir lui appliquer les principes généraux en matière pénale.

Ainsi il revient à la personne, présumée avoir acquis un bien qu'elle n'est pas en mesure de justifier de produire la preuve de l'origine licite. Pour être poursuivi pour enrichissement illicite, il faut qu'il y ait eu préalablement une décision judiciaire qui établit l'origine illicite du bien. La portée des deux premiers principes en matière d'administration de la preuve devant le juge tombe à l'eau. Le Ministère Public n'aura pas besoin de produire de preuves autre que la décision judiciaire déjà établie. Le juge pénal ne fera que constater la décision judiciaire qui établit l'origine illicite des biens avant de prononcer son jugement. En conditionnant la sanction de l'enrichissement illicite par une décision judiciaire préalable, le législateur burundais serait parti du raisonnement selon lequel l'acte d'enrichissement illicite est une conséquence d'autres infractions. Il aurait considéré que pour être poursuivi, il faut avoir été condamné sous le chef d'une autre infraction à caractère économique. L'enrichissement illicite devient par le coup une infraction en concours idéal avec la première.

Au Sénégal la Loi n° 81-53 du10 juillet 1981stipule que : L'enrichissement illicite de tout titulaire d'un mandant public électif ou d'une fonction gouvernementale, de tout magistrat, agent civil ou militaire de l'Etat, ou d'une collectivité publique, d'une personne revêtue d'un mandat public, d'un dépositaire public ou d'un officier public ou ministériel, d'un dirigeant ou d'un agent de toute nature des établissements publics, des sociétés nationales, etc….., est puni d'un emprisonnement de cinq à dix ans et d'une amende au moins égale au montant de l'enrichissement et pouvant être portée au double de ce montant. Le délit d'enrichissement illicite est constitué lorsque, sur simple mise en demeure, une des personnes désignées ci-dessus, se trouve dans l'impossibilité de justifier de l'origine licite des ressources qui lui permettent d'être en possession d'un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport avec ses revenus légaux.

Au regard de ces informations certes beaucoup d’anciens ministres, directeurs de sociétés publiques, de maires etc…. devraient être poursuivi pour enrichissement illicite. L’enrichissement illicite est dans notre vie quotidienne, à tous les niveaux. Faut-il poursuivre un seul individu ou un groupe d’individu ou des personnes appartenant à un parti politique ? Quoi qu’il en soit, sans une loi pour réprimer l’enrichissement illicite ; alors la corruption qui est la principale cause de sous-développement, va d’avantage plomber les économies de nos Etats.

 


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