Fleuron de l’industrie sénégalaise, la Société africaine de raffinage (Sar) vit un malaise profond. Les travailleurs sont désabusés face au favoritisme, à la gabegie et à la discrimination salariale qui gangrènent la boîte. Ils en appellent au président de la République. Avant que le syndrome d’Air Sénégal international, du Méridien Président ou de la Sonatel n’affecte leur entreprise.
Le collège des délégués de la Sar a décidé de rompre le silence et de monter au créneau. Pour dénoncer «la gestion tatillonne de l’environnement économique, la gabegie, l’absence d’équité salariale et les recrutements clientélistes qui minent leur entreprise». Dans une déclaration qui n’a pu être rendue public le 1er mai dernier, les responsables syndicaux, affiliés à la Cnts/Fc dirigée par Cheikh Diop, tirent la sonnette d’alarme sur les crises cycliques qui menacent l’activité industrielle de la Sar. Preuves à l’appui, ils s’insurgent contre le «copinage et le favoritisme érigés en méthode». Ils citent notamment le directeur des ressources humaines et le directeur financier qui perçoivent un salaire mensuel de 3 millions de francs sans compter les 900 000 F d’indemnités qu’ils touchent. Là où le directeur commercial reçoit 1,2 million par mois et 250 000F en guise d’indemnités. «La différence est énorme avec la plupart des autres travailleurs», estiment nos sources. Ces derniers expliquent également que la direction de la Sar se livre à des recrutements pléthoriques que rien ne justifie. Pour parvenir à une maîtrise des coûts et à une réduction des charges, les délégués demandent l’audit de la pratique de l’outil de gestion SAP-Template et celui de toutes les prestations extérieures… La Sar est, de par son chiffre d'affaires (plus de 375 milliards Cfa), l’une des premières industries du pays. Le classement des 500 meilleures entreprises africaines l’a située à la 106e place en 2007 (contre 124e l'année précédente). La Sar est l'entreprise sénégalaise la mieux lotie sur ce palmarès annuel.
Pressions politiques
Et comme pour en rajouter au climat déjà délétère à la Sar, nos sources pensent que le directeur général, Carmélo Sagna, et le ministre de tutelle, Samuel Sarr, sont de connivence. «Ils subissent même des pressions politiques comme cela a été le cas dans le passé avec l’intervention du député Doudou Wade qui a permis la nomination de Mme Sabelle Diop par le Conseil d’administration au poste de directrice commerciale, alors que, traditionnellement, c’est le Dg qui avait la prérogative de le nommer», regrettent nos interlocuteurs. Pour eux, l’immixtion intempestive des politiciens risque d’être fatale à l’entreprise.
Menaces de plainte
La dernière réunion du Conseil d’administration, tenue au mois d’avril dernier, a été très houleuse, lorsque Sabelle Diop est sortie de ses gonds, pour dénoncer les attaques qu’elle a subies, via courriel. Dans ce fameux courriel adressé aussi aux clients et fournisseurs de la Sar, la dame est présentée comme une corrompue. C’est pourquoi, selon nos informations, elle a décidé de porter plainte. Mais, pour éviter l’escalade, les travailleurs espèrent rencontrer le président de la République et tenter de sauver leur bijou (la seule raffinerie du pays) qui croule sous le poids d’énormes difficultés.
«Des allégations tendancieuses»
En l’absence du directeur général, parti en mission hors du Sénégal, le directeur conseiller Lamine Badio a tenu à répondre à notre interpellation de façon laconique. Pour rejeter ce qu’il qualifie d’«allégations tendancieuses». Réfutant le rôle de numéro deux de la boîte à lui attribué par certains travailleurs, il affirme que la direction va bientôt rencontrer les délégués syndicaux. «M. Sagna sera là la semaine prochaine et il les recevra», promet-il.
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