La police de Thiaroye a mis fin aux agissements d’un faux gendarme du nom d’Alioune Camara qui, pendant deux ans, a porté l’uniforme de la gendarmerie nationale sans être inquiété. Plusieurs plaignants escroqués par Alioune Camara se sont présentés au commissariat de police de Thiaroye. Parmi les victimes, une «ibadou» tombée sous le charme de la tenue.
À l’Etat-civil, il est connu sous le nom d’Alioune Camara mais dans la vie de tous les jours, le bonhomme, âgé de 37 ans et se disant «enseignant sans emploi», se fait appeler Saldia. Il ne manque pas d’imagination. Jugez-en vous-mêmes : réussir à porter une tenue de gendarme et à circuler librement avec une carte professionnelle volée sans être inquiété n’est certainement pas à la portée de tous les… escrocs. Certains se feraient démasquer très rapidement. Ce n’est, hélas, pas le cas d’Alioune Camara qui a réussi, avec une telle facilité, à rouler dans la farine plusieurs sénégalais. À certains, il a proposé un coup de pouce pour obtenir un visa et, à d’autres, une intervention énergique pour recouvrer une créance. Tous ont été hélas grugés par Alioune Camara qui s’est rempli les poches avant de se fondre dans la nature.
Comment tout cela est arrivé ?
Tout a commencé en 2008, lorsqu’un des complices de Alioune Camara, répondant au nom d'El Hadji Faye et dont le père est un gendarme ayant pris la retraite, est venu le trouver pour lui confier les tenues de son géniteur composées de deux vestes sahariennes courtes manches, deux pantalons, une casquette, une coiffe de casquette, un béret, une paire d’épaulettes portant deux V blancs sur fond bleu et deux chemises bleu ciel. Une aubaine pour Alioune Camara qui, dès que son ami lui a tourné le dos, enfile la tenue et se porte dans la rue. L’essai devenu concluant, car partout où il passe, ce sont des courbettes à n’en plus finir, Alioune ne se fait pas prier pour faire partie de la marée chaussée. «Depuis lors, je porte toujours l’uniforme de la gendarmerie sans aucune gêne et partout où je vais, je me fais passer pour un gendarme. Le port de l’uniforme m’a facilité l’accès à plusieurs endroits et la prise de contact avec plusieurs chefs de service», confesse Alioune Camara devant les enquêteurs de la police de Thiaroye. Cependant, comme il lui manquait une carte professionnelle pour davantage se faire passer pour un gendarme, Alioune Camara se mue en pickpocket et cible un gendarme du nom de Pierre Jacques Diop en service à la Présidence. Il le suit à la gare routière Petersen et réussit dans la bousculade à lui chiper sa carte professionnelle. Le tour est ainsi joué pour Saldia qui va ainsi profiter de la crédulité des Sénégalais pour dérouler son mode opératoire. Et c’est un apprenti-chauffeur du nom de Gora Niang qui va être la première victime du faux gendarme qui empoche 25 000 FCfa et un portable pour aider l’apprenti à obtenir un permis. «Il m’a dit qu’il s’appelle Ngouda Fall affecté au service des Mines et m’a réclamé 60 000 FCfa pour m’aider à obtenir un permis de conduire. N’ayant pas cette somme, je lui ai remis 25 000 FCfa et mon portable deux puces. Lorsque je me suis présenté au service des Mines, on m’a dit qu’un gendarme de ce nom n’y travaille pas», explique Gora. Puis, c’est au tour d’un commerçant du nom de Lahine Pane alias Laye Fané d’être grugé par le faux gendarme. À ce dernier, Alioune Camara s’est présenté comme un gendarme en service à la Présidence avant de lui réclamer 795 000 FCfa pour l’aider à obtenir le visa. «Je l’ai accompagné au bureau des passeports situé à Dieuppeul. Il était vêtu de l’uniforme de la gendarmerie. Il est entré dans plusieurs bureaux et a déposé mon dossier. Le surlendemain, il m’a apporté mon passeport. Il m’a réclamé 2 millions pour le visa, mais par mesure de prudence, je lui ai remis 795 000 FCfa en attendant le visa. Depuis lors, je ne l’ai plus revu», renseigne Lahine Pane qui s’est précipité au commissariat de Thiaroye dès qu’il a été informé de l’arrestation d’un faux gendarme.
Le faux gendarme se mue en agent de recouvrement
Le plus cocasse dans la chevauchée du faux gendarme, c’est lorsqu’il joue au facilitateur pour aider des Sénégalais à recouvrer leurs créances. Là, Alioune Camara n’y va pas avec le dos de la cuillère. Et c’est Arame Diop, commerçante de profession, qui va en faire les frais. «Une dame du nom d’Aldiouma Diouf me devait 550 000 FCfa. Lorsque j’en ai parlé à Alioune Camara, il a promis de m’aider à récupérer mon argent et, s’il le faut, arrêter Aldiouma. En me quittant, il a pris l’adresse d’Aldiouma», explique Arame Diop. La suite, c’est le faux gendarme qui l’a expliqué aux enquêteurs de Thiaroye : «Je me suis rendu chez Aldiouma à la cité des Nations Unies. Dès mon arrivée, je l’ai intimidée en lui disant que je suis prêt à l’embarquer et à la conduire à la gendarmerie de Thiong. Elle m’a versé 400 000 FCfa que j’ai utilisés à des fins personnelles.»
Au total, une dizaine de personnes et près de trois millions ont été empochés par Alioune Camara avant qu’il ne soit démasqué. C’était le 4 novembre dernier, lorsque le faux gendarme, témoin d’un choc entre deux véhicules à Tally Icotaf, au carrefour Texaco, décide de mettre un terme aux propos injurieux échangés par les deux chauffeurs. Sûr de lui, Alioune Camara exhibe «sa carte» avant d’être démasqué par un passager qui avait des doutes sur son statut. La police alertée s’est déployée sur les lieux pour cueillir l’escroc avant de perquisitionner sa chambre à la cité Fadia où des tenues de gendarme et quatre passeports établis à des noms différents ont été retrouvés.
Condamné à deux reprises pour les mêmes faits, Alioune Camara, toujours en garde à vue à la police de Thiaroye, sera déféré dans les prochains jours. En attendant, les plaignants ne cessent d’affluer au commissariat de Thiaroye.
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