Le gros calice des Locales (performances de l’opposition, insubmersibilité d’Idrissa Seck à Thiès, grogne étalée de la banlieue dakaroise et pluie de pierres sur le cortège et le meeting du secrétaire général national dans la région de Fatick), le dinosaure politique Abdoulaye Wade l’a bu jusqu’à la lie. D’autant plus amèrement que cela s’est passé au moment où il écrit l’ultime chapitre de son histoire : l’épilogue. Alors, bonjour le dernier et ferme dessein qui a le visage d’un bail de cinquante ans pour le Pds, à la tête du Sénégal.
A ce dessein qui aura valeur de bâton de Maréchal à titre posthume, pour lui, Wade a beaucoup sacrifié et sacrifiera davantage. Avec ou sans gaieté de cœur. Et surtout sans hésitations. Ayant appris avec Houphouët Boigny que ‘la politique c’est le réel avant d’être l’idéal’, le président de la République a, d’ores et déjà, tellement pris en compte le poids et le rôle complémentaires et déterminants de l’indéracinable maire de Thiès, qu’il a, sans états d’âme, capitulé en rase campagne, sur le dossier des chantiers de Thiès. Brisant moralement Cheikh Tidiane Sy (Justice) et Ousmane Ngom (Intérieur) qui ont tenu le haut du pavé durant la phase paroxysmique et répressive de cette affaire.
L’alchimie politique a manifestement opéré dans la ville de Thiès, en cette journée du 4 novembre. Idy le broyé d’hier, le miraculé d’aujourd’hui et (l’élu ?) de demain, retourne à grands pas, aux sources de son destin. C’est pourquoi il a convoqué, dans son discours, le vocabulaire de la relève et du relais dans l’épopée, en plaçant précisément ‘sous le signe du destin, la joie du disciple qui retrouve son maître’ ; et en mettant en relief ‘la singularité des liens aptes à survivre à toutes les épreuves’. Des formules qui ont électrocuté un auditoire gouvernemental et parlementaire totalement ébaubi et dépassé par les exercices de haute voltige politique dont le duo Wade - Idy garde jalousement le secret.
Première interrogation : où sont les faucons qui, entre 2004 et 2009, ont infatigablement planifié la chasse à courre contre Idrissa et ses fidèles ?
Pourtant, tout y est passé sans succès : argent, exactions, délégations spéciales, etc. Seconde question : quelle posture pour la Génération du concret qui avait vendu la peau du renard Idrissa Seck, avant de l’avoir tué ? Avant le scrutin du 22 mars, la Gc éconduisait, à la Télévision, Idy et ses listes. Aujourd’hui, c’est une Gc mélancolique qui subit les évènements plus qu’elle ne les pilote. Même si Idy, charitable et œcuménique, a salué les concrétistes. Seul un libéral exalté comme le fidèle Farba Senghor, est toujours à l’aise, dans toutes les voltiges et volte-face de Wade.
Le chef de l’Etat qui endort l’opposition avec sa conception - à géométrie variable - du dialogue politique, est trop pressé pour s’attarder sur les grincements de dents ou les jérémiades des cadres déboussolés du Pds. Wade qui doit sauter à la dernière halte (2010) avant l’entrée en gare (2012) est donc allé, à Thiès, récupérer le mécanicien capable de redonner du lustre et de la puissance, à cette locomotive plus esquintée que poussive qu’est le Pds. Mais puisqu’en démocratie, le train qui ne transporte pas la majorité, ne pourra pas, non plus, conduire à la victoire, Wade souhaite le retour au bercail libéral, de tous les fils. Y compris les libéraux qui ont pris le maquis comme Macky. Sans jeu de mots.
Justement, cet appel adressé au leader de l’Apr, est aussi adressé à Me Alioune Badara Cissé qui est ainsi nommément invité. C’est là un mélange de mystère et de bizarrerie, lorsqu’on constate - parallèle irrésistible - qu’en direction de Rewmi, Wade ne cite ni Pape Diouf ni Youssou Diagne ni Oumar Guèye, le suzerain de Sangalkam. Que sait Wade ? Que concocte-t-il en direction de l’Apr ? A-t-il la certitude que le numéro deux a de l’ascendant ou de l’influence sur le numéro un ? Cherche-t-il à signifier à l’un que lui (Wade) est en pourparlers avec l’autre ? L’amitié triangulaire et notoire entre Macky Sall, Souleymane Ndéné Ndiaye et Me Cissé autorise-t-elle l’optimisme du nouveau rassembleur Wade ?
Un geyser d’interrogations non sans rapport avec une certaine actualité marquée par la salve d’obus que Me Cissé a dirigés sur le Ps. Ce qui a entraîné une riposte de Me Aïssata Tall Sall. Et, bien entendu, suscité une vive émotion dans les rangs de Bennoo. En tout cas, un frémissement sémantique est observé chez Macky Sall qui déclare que son ‘retour au Pds n’est pas à l’ordre du jour’. Formulation améliorée - et surtout - plus politiquement correcte que l’expression : ’Je ne regarde jamais dans le rétroviseur’. Car, dans la vie, hier, aujourd’hui et demain s’influencent mutuellement.
En politique comme en guerre, le terrain (Thiès) et le rapport de forces (les Locales) commandent l’issue. Pour triompher, faut-il donc avoir la force du lion et la ruse du renard. Des impératifs électoralement stratégiques qui ont - d’emblée - présidé à la célébration de la Première Communion du dauphin Idrissa Seck. En attendant la Confirmation au temple de la Constitution déjà traitée à cet effet. Et enfin la consécration du scénario par les urnes. Le tout dans l’optique de la logique de demi-mandat que j’avais signalée dès les lendemains de la présidentielle de 2007.
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