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Politique

En PERSPECTIVE : Viol de la mémoire collective

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En PERSPECTIVE : Viol de la mémoire collective

Les autorités avaient promis de tenir la première réunion du Sénat dans la plus grande « sobriété » du fait de la commémoration de l’anniversaire du naufrage du bateau « Le Joola ». « Les populations sont donc invitées à se retenir en ce jour de souvenirs et à surtout se garder contre toute manifestation de réjouissance », comme l’ont écrit noir sur blanc nos gouvernants. 

Mais l’ambiance indescriptible observée à l’hémicycle hier, mercredi 26 septembre, nous a amené à nous demander ce que les autorités entendaient par ce mot. J’avoue que le doute a traversé notre esprit quant à la signification exacte de ce vocable.

Ce mot est peut-être trop savant pour que son sens premier ou second soit à la portée du premier venu. Et pour en avoir le cœur net, c’est dans le dictionnaire Le Robert que nous sommes allés chercher le sens du mot « sobriété ». Il signifie, au premier degré, « comportement d’une personne qui boit et mange avec modération » ; ou « le fait de boire peu ou pas d’alcool, ou abstinence ». Ce mot renvoie à la « mesure », dans le sens de faire les choses avec modération.

Le spectacle que les « militants (es) express » - ceux ou celles que l’on transporte dans les cars-rapides et « Ndiaga Ndiaya », parfois habillés (ées) par le responsable politique qui loue leur service, moyennant quelques billets de Cfa dévalué - nous ont offert hier, est une véritable injure à la « sobriété ». Les militantes avaient enfilé des tenues aux couleurs du Parti démocratique Sénégalais (Pds), sans oublier leurs belles parures. Des chants et pas de danse, des griots qui modulent leur voix en fonction des liasses de billets de banque, des militants qui « rackettent » des responsables politiques aux fins de bouillir une marmite désespérément vide.

A l’intérieur, au balcon de l’hémicycle, des « militantes express » donnent de la voix à l’appel d’un responsable politique devenu, par la grâce de Wade, Sénateur. A l’applaudimètre Pape Diop, maire de Dakar, Léna Diagne, Aïda Ndiongue et Rokhaya Siby, anciennes socialistes qui ont transhumé dans les prairies bleues, Mohamed Fadel Gaye, Bachir Kounta et Sokhna Dieng. Très en verve, elles ont même entonné une chanson à la « gloire » de ces responsables libéraux. Il fallait voir ces femmes danser, avec à la clé ces « wagnaarou » (ces danses qui soumettent le corps à la torture). Qui va les empêcher de « bosser » ? Elles sont payées pour exécuter un travail. Ce sont des « commandos » engagées pour « semer » l’ambiance dans l’hémicycle, comme les militaires sèment le b… dans le camp de l’ennemi. La « sobriété » ne fait pas partie de leur langage.

Ces militants ont un autre rapport à la politique, celui que le berger occasionnel entretient avec sa vache à lait. Le « militant express » n’a pas de mémoire. Il est happé par le gain facile. Le présent est son compagnon. Pour ces militants, il n’y a rien dans la séquence temporelle qui rappelle le passé ou l’avenir. Et certainement du « Joola », ils n’ont gardé que de vagues souvenirs, comme en atteste leur comportement d’hier. Nous ne sommes même pas sûrs que la minute de silence observée hier, dans l’hémicycle, à la demande du Sénateur originaire de Ziguinchor, Mamadou Lamine Sakho, a permis à ces militants (es)« express » de revoir le film du Joola, avec ses images insoutenables sur lesquelles sont écrits en lettres de « sang » deux maux qui gangrènent notre société : insouciance et négligence.

Mais si ces militants ont des services à offrir, c’est qu’il existe une demande. Et celle-ci est souvent formulée par des responsables politiques qui pensent que la seule façon d’exister (politiquement s’entend) c’est de faire du bruit, beaucoup de bruit. Ils ont leur part de responsabilité dans ce viol de la mémoire collective. Peut-être que le souvenir du Joola qui défie le temps dans les profondeurs abyssales d’un océan carnivore, est trop pesant sur les consciences qui ont quelque chose à se reprocher ? Ils préfèrent ne pas regarder la vérité en face, pour ne pas subir le même sort que Œdipe-roi qui s’est crevé les yeux, lorsqu’il a découvert qu’il était le meurtrier de son propre père.

L’oubli fonctionne dans ce cas comme une sorte de thérapie. Et il (l’oubli) est organisé au travers d’une mise en scène qui cache le véritable acteur, tapis dans le noir des coulisses. Vous avez dit « sobriété » ! Et si ce mot n’était que l’envers d’un cynisme « policé » ou raffiné ?

Ils ont violé la mémoire collective et plus rien ne les arrêtera. En eux, le désert croît…et gare à celui qui arrête le désert !



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