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Politique

Thierno LO, député et ancien ministre : « Le président de la République a sauvé l’Assemblée d’une humiliation »

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Thierno LO, député et ancien ministre : « Le président de la République a sauvé l’Assemblée d’une humiliation »
S’il écarte toute dévolution du pouvoir en dehors des voies démocratiques, le député Thierno Lô n’en souhaite pas moins que le président Wade désigne rapidement son successeur au sien du Pds., celui qui sera chargé de pérenniser son legs politique et qui devra plus tard affronter démocratiquement les candidats de l’opposition aux prochaines élections. Pour l’ancien ministre de l’Environnement et actuel président de la commission Urbanisme, habitat, équipement et transport, ce choix permettra d’interrompre toutes les querelles de positionnement qui minent aujourd’hui le Pds. Thierno Lô rame par ailleurs à contre-courant de ses frères libéraux qui appellent au boycott de la presse. De la même manière qu’il désapprouve ceux qui tentent de discréditer les assises nationales en les qualifiant d’entreprise subversive.

Wal Fadjri : Le vote du règlement intérieur du congrès consacrant la prééminence du Sénat sur l’Assemblée nationale a soulevé l’ire de certains parlementaires. Est-ce à dire que les députés de la majorité ont voté malgré eux ?

Thierno Lô : J’ai vécu cela très difficilement. Parce que ça fait partie des nombreux problèmes qui assaillent notre République. Au Sénégal on passe tout le temps à s’occuper de choses que je considère comme de l’accessoire alors que nous sommes dans un pays en voie de développement. Il y a énormément de défis qui nous interpellent. Au lieu de nous mettre ensemble, de réfléchir, de mettre ensemble toutes les énergies nécessaires dans le respect des uns et des autres pour essayer de faire face à ces défis, on fait à chaque fois, comme si nous étions dans un cirque où chacun est en train de jouer une partition qui n’intéresse pas le peuple. Ce qui s’est passé lors de ce congrès ne nécessitait pas tout le débat qu’on en a fait. Nous sommes dans un parti politique, nous constituons une majorité donc il y a des règles du jeu qu’il faut accepter. Nous avons un président de la République qui détermine la politique de la Nation, qui brigue nos suffrages, qui constitue des listes. La liste du Pds a gagné les élections législatives, d’autres Sénégalais, en toute liberté, ont boycotté ces élections. Aujourd’hui, il y a une majorité et une opposition à l’Assemblée nationale. Nous avons voté des textes pour la mise en place d’un Sénat et d’une Assemblée nationale. Aujourd’hui, notre groupe parlementaire, quoiqu’on puisse dire, représente la majorité qui est là pour permettre au président de la République de réaliser son mandat. Depuis que le Sénégal est une République, les majorités ont toujours aidé le président de la République à atteindre ses objectifs. Il faut donc qu’on respecte les règles du jeu. C’est ainsi que le secrétaire général du Pds qui se trouve être le président de la République a décidé, après avoir vu tous les modèles qui existent dans le monde, de faire du Sénat la chambre haute du Parlement. Il convoque son groupe parlementaire à la Présidence de la République et lui exprime ses choix après avoir remercié le groupe pour le travail abattu à l’Assemblée nationale. Ce jour, Me Wade nous a dit ceci : ‘Je veux que le président du Sénat soit le président du congrès. Et selon le règlement intérieur que j’ai choisi c’est le bureau du Sénat qui sera celui du congrès.

Voilà mon choix. Maintenant vous êtes libres d’aller discuter’. Quand le leader d’une formation politique comme le Pds expose ainsi sa préférence, il va de soi que son groupe parlementaire exécute ses souhaits. C’est ainsi qu’une fois au Méridien Président, nous avons appliqué les directives du président de la République. Nous n’avons pas le droit de dénaturer la vérité. Il faut qu’on assume nos positions et dire la vérité aux Sénégalais. Si on s’était risqué à passer outre la décision du président de la République, l’Assemblée nationale aurait été déshonorée. Parce que le Sénat aurait gagné le vote pour la simple raison qu’au niveau de l’Assemblée, on vit un climat délétère. Il y a des camps qui se dessinent alors qu’au Sénat, c’est une homogénéité. Ils sont cent sénateurs. Si on ajoute cinquante députés au cent sénateurs, même, avec un vote au bulletin secret, l’Assemblée nationale serait mise à nu, dévalorisée par le vote. Et si la consigne était de voter pour l’Assemblée nationale, je sais qu’il y aurait des députés qui auraient voté pour le Sénat. C’est pourquoi la directive du président de la République a sauvé l’Assemblée d’une humiliation. Je crois que c’est ce qu’il faut retenir. Au Parlement, il n’y a pas une chambre plus crédible que l’autre. Chacune a une mission bien déterminée. Donc, je ne vois pas en quoi la prééminence du Sénat pourrait gêner les députés.

Wal Fadjri : Ceux qui ont protesté contre cette volonté du président de la République peuvent-ils être considérés comme ayant failli à la discipline du parti ?

Thierno Lô : Il ne m’appartient pas de juger les comportements des uns et des autres. Le Pds fonctionne selon des méthodes. Les gens dont vous parlez, ils étaient deux ou trois au niveau du Méridien. Mais je n’ai pas participé à une réunion où ces députés ont ouvertement manifesté leur désaccord par rapport aux directives du président de la République. J’ai assisté à la réunion tenue dans la salle des Banquets et ce n’était pas le cas. Personne n’avait contesté devant le président de la République. C’est seulement pendant la séance au Méridien que j’ai vu les députés de l’opposition quitter la salle. Et j’ai vu deux ou trois députés de la majorité s’exprimer devant la presse pour montrer leur désaccord. Ils sont libres et ce qu’ils ont dit n’engage qu’eux.

Wal Fadjri : Vous avez tantôt parlé de clans et de climat délétère à l’Assemblée nationale, qu’est-ce qui est à l’origine de cette situation ?

Thierno Lô : Ce que nous vivons au niveau du Parlement, c’est simplement le prolongement du mode de gestion du Pds. Ce qui faisait la force de Me Wade, malgré les coups de boutoir du Parti socialiste, c’était de faire régner l’ordre dans son Pds. Sa parole et ses choix n’étaient jamais contestés. Voilà ce qui faisait la force du Pds. Mais voilà que depuis l’alternance, ce mode de gestion a changé. On a commencé d’abord par créer des frustrations en prenant des gens forts dans le lobbying, le larbinisme, la laudation, le chantage et en les mettant au-dessus des militants qui se sont battus pour l’avènement de l’alternance et qui étaient attachés à la personne de Me Wade. C’était une première erreur au détriment des militants loyaux, qui ont perdu leurs épouses, leurs bras et leur boulot. La deuxième erreur - je n’utiliserai pas le terme de transhumant - c’est le fait d’avoir amené dans le parti des gens qui n’étaient pas des modèles. Des gens connus pour avoir commis des malversations, traité Me Wade de tous les noms d’oiseaux après l’avoir mis en prison.

Au Pds, si vous n’avez pas un mentor, si vous n’êtes pas fort en lobbying, vous êtes mis de côté quels que soient vos principes et vos performances. C’est ça que nous avons vécu au sein de l’Assemblée nationale. A chaque fois que Me Wade délègue un pouvoir à quelqu’un, on en fait tout de suite son alter ego. C’est une erreur fondamentale. A chaque fois que Me Wade confie une position de pouvoir à quelqu’un et le démet, on en fait son ennemi. L’un dans l’autre, on a créé un climat délétère. On crée souvent une dualité dès que Wade confie une responsabilité à quelqu’un. C’est ce qui fait qu’au niveau de l’Assemblée nationale, la question du mentor se pose d’une part. D‘autre part, chaque ministre, chaque responsable politique de haut niveau à son répondant à l’Assemblée nationale. Cela crée des groupuscules qui ont des appartenances autres que Me Wade. Ils ne sont reliés à Me Wade que par des éléments qui tournent autour de lui. Ce qui est la cause des luttes internes au sein de ces groupuscules et cela rejaillit au niveau de l’Assemblée nationale. On en arrive donc à avoir des clans pro X et pro Y.

Wal Fadjri : Voulez-vous dire que Macky Sall a été victime de ces clans ?

Thierno Lô : J’ai toujours assumé ce que je vous dis là. Et je l’ai même dit à Macky Sall. Dans le Pds, c’est Me Wade qui délègue les pouvoirs. Les questions de légitimité, c’est encore Me Wade. Aucun responsable du Pds n’a fait l’objet d’une élection à partir de sa base. C’est Me Wade qui se lève un bon matin pour dire : ‘voilà la restructuration du comité directeur du Pds. J’intègre un tel, et j’exclus tel autre’. C’est aussi Me Wade qui décide de faire de tel responsable libéral le numéro deux du parti, un Premier ministre, un président du Sénat ou de l’Assemblée nationale. Alors, à partir de ce moment, il faut reconnaître qu’il n’y a pas de légitimité autre que celle de Me Wade. Macky Sall a été Premier ministre et Thierno Lô un ministre de Abdoulaye Wade. Si le président de la République se sépare de nous, nous n’avons pas le droit de revendiquer ou d’essayer de mener des frondes. Moi, je n’hésite pas à rendre les pouvoirs qu’on m’a délégués. Aujourd’hui si Me Wade me demandait de lui céder mon poste de député, vous ne me verrez plus à l’Assemblée nationale. On se trompe quelque part en disant que c’est le peuple qui nous a élus. C’est vrai, mais aucun député n’a fait l’objet d’une investiture à la base pour prétendre représenter nos contrées. Il faut dire la vérité. C’est le Pds qui a décidé de faire d’un tel responsable la tête de liste d’une telle localité. Ce n’est pas le peuple. Tout tourne autour du président Wade et de son mode de dévolution du pouvoir et des postes de responsabilité. Donc je ne les discute pas. J’ai l’habitude de dire que personne ne peut combattre Wade au sein du Pds. C’est lui qui a créé son parti. Les chaises, les financements…c’est lui. On lui a donné carte blanche. Donc quand on adhère dans ce parti, on le fait en acceptant de respecter les règles du jeu. Au cas contraire, la Constitution du Sénégal permet à tout un chacun de créer un parti politique ou d’adhérer à n’importe quelle formation politique. Je ne suis pas en train de dire que Macky Sall n’a pas été loyal vis-à-vis de Abdoulaye Wade. Nous avons partagé un gouvernement, nous avons battu campagne, et je ne l’ai jamais vu ou entendu poser des actes contre Wade. Donc je considère que Macky Sall ne peut être qu’un élève de Me Wade. Il est un simple militant de Wade comme tous les autres.

Wal Fadjri : Mais il a quand même le droit d’avoir l’ambition de succéder à Me Wade, comme ses amis ont aussi le droit de le soutenir…

Thierno Lô : Je suis tout à fait d’accord. Chacun a le droit d’avoir des ambitions. Seulement, au sein du Pds, il y a des cercles. Les gens sont obnubilés par la succession de Me Wade. Chacun se prépare secrètement de son côté. Ce que je considère anormal dans le fonctionnement d’un parti politique. C’est pourquoi Wade gagnerait aujourd’hui à désigner tout de suite son successeur. C’est le moment de le faire. Il doit forcément avoir un successeur. Il doit déléguer son héritage politique et il ne peut le faire qu’au sein de sa formation politique. Il faut qu’il trouve quelqu’un à qui confier le parti pour que ce dernier puisse mettre en place l’équipe qu’il faut, pour pérenniser l’action de Wade et faire en sorte que le Pds puisse gérer le pouvoir pendant 40 ans par le biais des suffrages des Sénégalais. Quand Wade dit qu’il cherche un successeur, les gens commentent sans comprendre ce qu’il veut réellement dire.

Wal Fadjri : Mais, dans une démocratie, le rôle du président de la République ce n’est pas de choisir son successeur à la tête de l’Etat, quand même.

Thierno Lô : Les Sénégalais passent souvent à côté sur certaines questions. Ce n’est pas la première fois que le président de la République fait une telle déclaration. La première fois, il avait dit qu’il ne voyait pas quelqu’un pour le remplacer. Aujourd’hui, il a déterminé un cahier de charges pour son dauphin. Il en a le droit. S’il veut qu’on pérennise son action politique, il faudrait bien qu’il prépare quelqu’un. Mais il le fera dans le cadre d’un parti politique. C’est une manière de préparer son poulain qui va affronter les autres candidats à la présidence de la République. Au niveau du Sénégal, tout le monde sait qu’il est hors de question de déléguer le pouvoir. Je ne le pense pas et je ne l’accepterai pas. Et je sais que le président Wade ne le pense pas.

Wal Fadjri : Pourtant c’est ce que pensent beaucoup de Sénégalais, l’opposition en particulier, surtout avec la récente modification de l’article 27 de la Constitution.

Thierno Lô : Tout cela n’est que bavardage. Les gens avaient pensé, dans un premier temps, que le président allait modifier cet article pour essayer d’avoir deux ans de plus à son mandat par un effet rétroactif. Cela a été réglé par un amendement qui dit que le mandat actuel du chef de l’Etat n’est pas concerné par cette loi. Ensuite, on a dit que le président a augmenté la durée du mandat présidentiel parce qu’il est en train de préparer son fils Karim. C’est une aberration. Le mandat de sept ans s’applique à tous. C’est, à la limite, de la frilosité que de dire qu’on est en train de baliser le terrain pour Karim Wade. S’il veut devenir président de la République, Karim passera forcément par les urnes. Je crois que l’opposition devrait changer de discours en disant : ‘si Karim se présente aux élections, nous allons le battre parce que nous avons un programme, parce que nous sommes plus représentatifs que lui’. Du temps de Diouf, je m’étais opposé à ceux qui disaient partout qu’il faut empêcher Diouf de gouverner en cas de victoire. Je leur disais que la meilleure façon, c’est de faire tout pour qu’il ne gagne pas. De la même manière, je m’oppose à ceux qui disent aujourd’hui que Karim ne doit pas diriger ce pays. Au nom de quoi ? Au lieu de passer tout son temps à accuser Me Wade de vouloir léguer le pouvoir à son fils, l’opposition gagnerait à réfléchir sur comment faire pour battre le candidat que Wade va présenter aux prochaines élections. Voilà le débat. De toute façon, je demande à Wade de désigner tout de suite son successeur. Que ce soit Karim ou un autre responsable du Pds pour que les masques tombent. En fait, si Wade avait désigné son successeur, cette guéguerre au sein du Pds allait automatiquement s’estomper. Parce que les gens allaient adhérer ou prendre d’autres positions. Cela permettrait à Me Wade de voir un peu clair dans le jeu et d’avoir une équipe cohérente, homogène qui va travailler avec lui pendant quatre ans pour pouvoir se présenter aux élections. Mais dans cette situation délétère, de lobbying, de jeux d’ombres, attendre quelque deux ans avant les élections pour désigner un successeur, cela va être difficile. Il faut choisir dès maintenant. Ainsi, ceux qui sont avec celui qu’il aura choisi vont rester pour pérenniser son action dans le respect des principes démocratiques. Ceux qui ne sont pas d’accord vont chercher ailleurs.

Wal Fadjri : En modifiant l’article 27, le pouvoir a estimé que cinq ans, c’est trop court pour dérouler un programme. Etes-vous convaincu par cet argument ?

Thierno Lô : Je ne suis pas gêné par la durée du mandat parce qu’il n’y a pas de faveur pour qui que ce soit. Tout le monde peut en bénéficier. Mais je considère que pour prétendre diriger un pays, il faut avoir un programme. Le Sénégal regorge de ressources humaines qui doivent être capables, dès qu’on est élu président, de dérouler le lendemain, un programme de gouvernement. On ne vient pas au pouvoir pour apprendre. Le pouvoir doit être composé d’hommes d’expérience.

Cela étant dit, je crois qu’il n’y a plus lieu de polémiquer sur la question. Chacun doit se battre pour être ce président de la République qui devra bénéficier de cette nouvelle loi qui fait passer le mandat de cinq à sept ans. J’ajoute que nous devons faire de telle sorte que les modifications de la Constitution soient définitivement encadrées. Il faudrait désormais exiger la voie référendaire pour toute modification de la Constitution. Il faut vraiment mettre des garde-fous sinon le prochain président pourrait ramener encore ce mandat à cinq ou quatre ans par voie parlementaire comme nous l’avons fait. Ensuite, les rédacteurs de cet article doivent revoir le libellé pour qu’il ne souffre plus d’une possibilité d’interprétations diverses. J’ai écouté Pape Demba Sy, Madické Niang, Babacar Guèye, tous rédacteurs de la Constitution. Ils ont des lectures et des interprétations diverses sur l’article 27.

Wal Fadjri : Le chef de l’Etat semble avoir revu sa position sur les assises nationales. Ne faut-il donc pas aller jusqu’au bout en envoyant une délégation à ces concertations comme le réclament certains ?

Thierno Lô : Moi je suis un adepte du dialogue. On peut dialoguer sans trouver de consensus, l’essentiel est que chacun connaisse la position de l’autre. Une majorité, elle est là pour poser des actes au profit des populations. Nous n’avons ni le droit de passer notre temps à nous chamailler avec l’opposition, encore moins d’organiser des marches. C’est l’opposition qui doit parler et non le pouvoir. Les modes d’opposition dans ce pays, ce ne sont des modes d’opposition d’alternative mais des modes d’agitation permanente, des modes de contestation pour prendre le pouvoir. Ce sont les règles du jeu et nous devons l’accepter. Je fais partie des Sénégalais qui disent que les assises, c’est simplement une réunion d’une partie des Sénégalais qui ont décidé de se retrouver pour réfléchir sur la marche du pays. Si j’étais le premier conseiller du président de la République, je lui aurais demandé de laisser faire et d’y envoyer même des représentants. Ces représentants pourraient dire, dans tous les segments qui seront discutés, ce que le gouvernement a fait et ce qui reste à faire et ce qu’il entend faire dans l’avenir. Les gens vont critiquer ce que nous avons fait et nous allons demander leurs propositions alternatives. Ainsi, nous allons mettre le tout dans un package que nous remettrons au président de la République. Parce que la seule autorité capable de procéder à la mise en œuvre des conclusions des assises, c’est le président de la République qui ne souffre d’aucune illégitimité parce qu’il a été élu par le peuple sénégalais et c’est lui qui détermine la politique de la Nation. Il peut prendre la proposition de n’importe quel Sénégalais pour en faire ce qu’il veut. La société civile qui est dans les assises nationales ne peut pas participer à une entreprise de subversion. Amadou Makhtar Mbow qui a été directeur général de l’Unesco, qui est aujourd’hui au soir de sa vie, qui n’a plus d’ambitions présidentielles, ne peut vraiment être dans un mouvement subversif. Il a quand-même une image qu’il veut laisser à la postérité. Je suis issu du secteur privé. Je sais que le patronat ne peut pas se laisser embarquer dans une entreprise de subversion. Ce sont des chefs d’entreprises qui ont tout à perdre si le Sénégal sombrait dans la déchéance, dans la violence. Si le Sénégal brûlait aujourd’hui, je ne peux pas prendre le premier avion et m’enfouir parce que j’ai des entreprises. Donc ces membres du patronat qui participent aux assises ont besoin de stabilité pour leurs entreprises. Ils n’ont aucun intérêt à créer des émeutes dans le pays.

Alors au niveau de la majorité présidentielle, nous aurions dû encadrer ces assises pour en tirer le maximum de profit et ne pas permettre à l’opposition d’en faire une arme qu’elle va brandir demain pour exiger l’application des conclusions. Voilà pourquoi je salue la position du président de la République. Je suis sûr que l’opposition n’a pas été enchantée d’entendre le président dire qu’il est prêt à recevoir les conclusions des assises nationales. Parce que si le président Wade dit cela, l’opposition ne peut plus marcher pour exiger l’application de ces conclusions. C’est pourquoi, ils ont anticipé en disant que les assises ne sont pas un bureau d’études pour le pouvoir. Et là, je demande à ces gens d’être constructifs. S’il y a des idées généreuses qui sortent de ces assises, que ces gens puissent permettre au chef de l’Etat d’en faire le meilleur usage possible. Et s’il y a parmi eux des gens compétents parce qu’ayant participé à l’élaboration, si le président fait appel à eux pour la mise en œuvre, de grâce qu’ils répondent favorablement en mettant en avant l’intérêt du Sénégal.

Wal Fadjri : Des responsables de votre parti ont engagé un bras de fer avec la presse allant jusqu’à appeler au boycott de certains organes de presse. Trouvez-vous cela normal pour un parti au pouvoir ?

Thierno Lô : Je suis contre deux choses. D’abord je n’approuve pas qu’il y ait des journaux ayant comme ligne rédactionnelle de s’attaquer quotidiennement au président de la République et à son gouvernement. Je ne vais pas les citer, mais vous avez remarqué qu’il y a des organes de presse qui ont décidé de manière systématique d’attaquer le pouvoir. Ce n’est pas cela la presse. Quand Wade et les citoyens se sont battus par la voie démocratique, ce n’était pas pour vivre dans une société fermée. C’était pour vivre dans une société où chacun pourrait exprimer ses idées, mais en respectant les règles du jeu. Je suis contre ceux qui disent que la presse a permis l’alternance. Il y a des Sénégalais qui ne sont pas dans les partis politiques et qui se sont battus pour l’avènement de l’Alternance. La presse a fait de telle sorte que la parole ne soit pas confisquée, que la victoire ne soit pas confisquée. Entre la presse et les hommes politiques, il doit exister un respect mutuel.

Je suis contre ceux qui appellent au boycott de la presse. Je lis tous les journaux. Je ne boycotterai jamais parce que je sais que je ne peux pas être manipulé. Quand je lis, je peux déceler la vraie information de la fausse. Je ne peux pas être ébranlé par un article de presse. Et il doit en être de même pour tout homme politique qui n’a rien à se reprocher. Les journalistes doivent aussi éviter de s’attaquer gratuitement aux hommes politiques. Il y a des hommes politiques qui étaient à la rencontre du quartier général (siège du Pds, Ndlr) quand le mot d’ordre de boycott a été lancé et qui sont pourvoyeurs de presse, qui ont leurs amis dans les rédactions. Ils savent qu’ils ne seront jamais attaqués par la presse car ils ont des amis qui les défendent mais qui ne défendent pas le président de la République. C’est pourquoi le président a raison en disant qu’il n’est pas défendu. C’est vrai. C’est la seule personne à être attaquée. Le pouvoir ne doit pas chercher à créer un bras de fer avec la presse. Ce n’est pas son rôle. Il s’agit de deux pouvoirs qui doivent cohabiter, chacun faisant convenablement son travail. Il ne peut pas y avoir une amitié entre la presse et le pouvoir. Mais le respect mutuel est possible. Le politicien qui ne veut être attaqué par la presse doit être exempt de reproches. Le journaliste qui ne veut pas être attaqué par les hommes politiques doit également respecter l’éthique et la déontologie.



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