Hier se fêtait au sein de la famille Keïta à Ouagou Niayes une... tabaski ! Une fête au rythme des sacrifices auprès des fétiches. Taureaux, poulets et chèvres ont été immolés en grand nombre pour obtenir les informations des totems. Reportage dans un univers pas comme les autres.
A Ouagou Niayes 2, juste derrière le parking faisant face à la police des Hlm, se trouve une maison qui ne diffère guère des autres. Hormis la présence de deux grands taureaux attachés devant la petite porte, rien n'attire l'attention des passagers et ne laisse rien présumer de tout ce qui se passe à l'intérieur. Ici habite un féticheur malien tel qu'indiqué d'ailleurs devant la porte «Cheikhou Keïta guérisseur malien». Il est joignable sur trois numéros de téléphone inscrits à la devanture des lieux. Un «annuaire» qui renseigne sur l'activité du propriétaire. Aujourd'hui, les habitants de cette demeure fêtent la... tabaski, la leur qui n'a rien à avoir avec celle des Musulmans.
On entre par la grande porte. Le décor est tout autre. Sur le côté gauche, on voit une vingtaine de poulets attendant d'être immolés. À droite, une porte qui mène au salon. Devant sont attachés quatre petites chèvres. Juste en face, il y a des poulets déjà immolés. Une véritable boucherie dans une petite cour aménagée pour la circonstance.
En effet, c'est dans une chambre située dans la partie est de la maison que se font les sacrifices. Une chambre contiguë à celle du grand féticheur. Les murs sont couverts d'un tapis aux motifs noirs et blancs, tout comme le sol d'ailleurs. Le premier fait qui frappe, c'est le sang qui se trouve partout. Ici, c'est le coin des fétiches que d'ailleurs nous présente le maître des lieux. Et c'est dans ce même espace assez étroit que se font les sacrifices. Ce qui explique donc la présence du sang partout.
À l'entrée, à droite, se dresse un totem ressemblant à la tête d'un animal et à la couleur noire malgré les taches de sang visibles sur certaines parties. Lui c'est Gassa, le génie protecteur. Il n'aime pas l'injustice et peut être le plus méchant de tous. À quelques mètres de Gassa, il y a Condron. De couleur noire aussi, ce fétiche est un assemblage de différentes choses indéfinissables contenues dans un bol. Le convaincre est très difficile, d'après Keïta, et il ne pardonne jamais. «Si un jour, moi, je couche avec une femme mariée par exemple, Condron m'ôtera tous mes pouvoirs et jamais il ne me les redonnerait, il n'a qu'une seule parole», confie Keïta. Diafrin, lui, est celui qui commande la mort. Il est «très difficile», nous dit-on, car la mort est compliquée. Kangriringue aussi est un fétiche. Cependant, le maître des lieux n'a pu nous montrer tout son «panthéon», car avant notre visite, il a enlevé quelques-uns de ses fétiches qui ne peuvent être vus par des femmes.
Un homme habillé juste d'un pantalon kaki est chargé d'immoler les animaux. Lui, c'est le frère de Cheikhou Keïta et c'est lui qui demande aux fétiches ce que son frère veut savoir. Il récite haut et fort des incantations. Et si le fétiche refuse, son frère entre dans la danse. De la bière et des colas sont offertes aux fétiches en plus du sang des poulets et des chèvres. Le sang des taureaux est recueilli dans une bassine, mélangé à quelques plumes des poulets immolés. Toute cette mixture va être déversé sur les fétiches. La réaction de chaque bête après sacrifice renseigne sur l'avenir.
Bigué BOB et Estelle TRAORE
Source Walf Grand Place
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