YORO BOLY DYAO UNE GRANDE FIGURE DES LETTRES SENEGALAISES LARGEMENT MECONNUE

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YORO BOLY DYAO UNE GRANDE FIGURE DES LETTRES SENEGALAISES LARGEMENT MECONNUE

Pour la nouvelle génération de jeunes sénégalais de par cette contribution nous voulons lever un coin de voile sur une des plus illustres figures  de notre pays, mais largement méconnue: Yoro Boly Dyâo.

Yoro Boly Dyâo  est né à Khouma, une des capitales de l’ancien royaume du Waalo en  1847 et c'est dans  même dans cette localité qu'il sera mort et enterré le  Jeudi 03 avril 1919.

De par son patronyme (guénio)  Dyâo, il appartenait  d’après Siré Abas Sow    (auteur des célèbres chroniques du Fouta sénégalais,) à la plus vieille famille de chef de la vallée du fleuve Sénégal, celle des Dya Ogo, qui y ont introduit  la métallurgie du fer et la culture du mil sorgho.

Son père le Tagne  Fara Penda  Madyao Khor Dyâo , appartenait à l’une des trois lignées matrilinéaires qui permettaient d’accéder au trône du Waalo, celle des Loggar.

De par sa mère Boly Mbodj (Peinda Dieng), Yoro Dyâo appartenait à la famille matrilinéaire Boul et  était descendant  d’un des plus grands  Brack du Waalo,  le Brack Ndiack Aram Bakar Mbodj (qui conquit tout le pays wolof au milieu du 18éme siècle ).

Apres la défaite des troupes de la Linguére Ndatté Yalla Mbodj devant Nder ,le 25 Février 1855, le gouverneur Faidherbe annexa le Waalo et en fit la première possession française de l’Afrique noire. Le dernier Brack du Walo Maambodj Mbodj exilé Faidherbe proposa à son oncle et homonyme le Diombanakh Yoro Altiné Dyâo la direction du Walo mais ce dernier  déclina l’offre demandant au gouverneur de nommer plutôt son grand frère Fara Peinda  Madyao Khor Dyâo exilé au Cayor comme chef supérieur du Waalo.

Ce dernier en gage de fidélité à la France, envoya son fils Yoro Boly Dyâo à Saint-Louis fréquenter  l'Ecole des Otages de 1856 et 1860, faisant partie de la deuxième promotion. Cette école  fondée  par  Faidherbe en 1855 avait pour fonction d’accueillir les fils  de rois  sénégalais, «  des fils  de chef » , de les prendre en otage et  de leur dispenser une éducation devant faire d’eux des auxiliaires dociles  de la colonisation française.

 Brillant élève, Yoro Boly Dyâo sera chargé  de lire le discours de la sortie de sa promotion la deuxième de l’école des otages.

 A la fin de ses études il fut promu chef de canton  en 1860, il exerça à Khouma et à Foos. Francophile, il fut un agent zélé de l’administration coloniale et participa activement à la répression  de la résistance armée du Prince  du Waalo Sidya Ndatté Yalla Diop en 1876.

 Après une carrière très mouvementée, faite de révocations, suivies de nominations  de Yoro Dyâo finit par obtenir de la France une pension de retraite de mille deux cents francs (1.200) en 1914 somme assez colossale à l’époque.

Patriarche, il eut  33 enfants. Il donna en mariage  la plus part de ses filles  à des princes sénégalais. Beau père du Bourba Diolof Alboury Ndiaye  ,du Ganket Amadou Makhourédia Diop,  des Princes  Samba Yomba Mbodj, Diombo Souna Mbodj, Bouna Alboury Ndiaye , Sydy Ngagnesiry Ndiaye, on trouve  actuellement  beaucoup de ses descendants  dans les grandes familles maraboutiques de Touba plus précisément à celle des mbacké mbacké de  Darou Khoudoss et Porokhane .

 Au delà de son parcours politique de collaborateur fidèle et convaincu du système colonial, Yoro Boly Dyâo mérite surtout d’être  considéré comme une figure historique sénégalaise des lettres, de par sa contribution inestimable à la connaissance de l’histoire du peuple sénégalais Pour l’Université Cheikh Anta Diop, il demeure  la source principale de la tradition écrite historique du peuple  wolof.

 Des sa sortie  de l'Ecole des Otages, Yoro Dyâo fut chargé par l’administration coloniale de rédiger une monographie sur l’histoire des peuples de la Sénégambie plus particulièrement celle des wolofs. Allié  et apparenté de la plus part  des cours royales de l’époque, Yoro Dyâo était bien placé  pour  recueillir auprès des familles princières et des grands griots de cour la tradition orale, l’histoire des royaumes wolofs.

 Dés 1860 il rédigea un certain nombre de cahiers relatant l’histoire des  migrations et des coutumes des royaumes  du Cayor, du Baol, du Djoloff et du Waalo. En 1864 Il publia l’histoire des Damels du Cayor dans le journal le Moniteur du Sénégal .Ces cahiers seront   commentés et publiés  en 1912 par l’administrateur colonial Henri Gaden,    dans « légendes et coutumes sénégalaises ».

Un professeur français du Lycée Faidherbe de Saint-Louis  Raymond Rousseau publiera et commentera une  autre partie des cahiers  en 1922 dans «  Le Sénégal d’autrefois .Etude sur le Oualo ».

Ces cahiers constituent une part importante du patrimoine historique et culturel du peuple wolof  et du Sénégal.

D’après l’historien français Jean Boulègue Maître de Conférence à l’université de Paris1 récemment disparu  « Yoro Boly Dyâo  fut le premier de ces chroniqueurs sénégalais  qui ont recueilli, traduit compilé, interprété, aussi les traditions orales de leur peuple  et qu’il a été le premier  wolof à écrire l’histoire de son peuple. Il n’avait été précédé que  par les français et les métis de Saint-Louis.»

 Mais l’une des contributions les plus importantes de Yoro Dyâo et qui restent méconnues  du grand public reste la thèse de Yoro Dyâo sur l'origine égyptienne des populations sénégambiennes Il déclarait «... vu que l'opinion générale en toute la Sénégambie est que notre contrée doit son peuplement à des migrations de l'Egypte, desquelles descendent toutes ses populations. »

Ces populations seraient parties d’Egypte (Kemet ) par six grandes migrations  successives( les Jaa-Oogo ; les Manna ;les Tondions ;les Laam Tourmiss  ;les Laam-Termes;les Touri-Sing ou Laam-Toro).

Yoro Boly  Dyâo donna même  les noms des Pharaons (qu’il appelle Fari en wolof) sous le règne desquels  chacune de ces migrations auraient eu lieu.

Voici ce qu'en dit Yoro Dyâo sur la  migration Jaa-Oogo (Dyahogo d'après l'orthographe de Yoro Dyâo) qui est  la plus ancienne.

«... c'est cette migration qui aurait apporté avec elle dans le pays l'industrie métallurgique.

Les forgerons donnent au fer obtenu dans leurs fourneaux le nom de hogo. Si l'on remarque que ce mot fait partie de « Dyahogo », on ne peut manquer de voir là un argument en faveur de la véracité de la tradition. Les gens de cette migration étaient armés de sagaies, sabres, poignards et couteaux en fer ; ceux des grandes familles avaient des armures complètes de ce métal. C’est également cette migration qui aurait inauguré la culture du gros mil dans les terrains d'inondation du Fleuve Sénégal.

On dit que le roi d'Egypte sous lequel eut lieu cette migration se nommait Paté Lamine. Ces deux noms réunis ou pris isolément sont d'un emploi fréquent chez les Sossé (Mandingues), les Malinké, les Peuls, les Khassonké, les Sarakhollé ; ils sont d'un emploi moins fréquent en paysouolof15. ».

Dans une  contribution « les migrations entre le Nil et le Sénégal : les jalons de Yoro Dyâo » parue dans les annales de la faculté des lettres et sciences humaines en 1991 Aboubacry Moussa Laam  Maître de conférences, Département d’Histoire

Faculté des Lettres et Sciences Humaines de  Dakar indiquait que « Dès le début du siècle un sénégalais, du nom de Yoro Dyâo, avait donné sur la question des relations entre l'Egypte ancienne et l'Afrique Noire un éclairage capital, malheureusement resté jusqu'ici inconnu des principaux protagonistes. »

Toujours d’après Aboubacry Moussa Laam « La valeur de la thèse de Yoro Dyâo sur l'origine égyptienne des populations sénégambiennes repose aussi sur le fait qu'elle a été confirmée, beaucoup plus tard, par un autre Sénégalais qui, tout en ignorant vraisemblablement ses travaux, est pourtant parvenu aux mêmes conclusions par des voies, pour l'essentiel, différentes. Il s'agit évidemment de Cheikh Anta Diop.  »

Etant un des premiers hommes de lettre sénégalais d’écriture française, Yoro Boly  Dyâo  mérite d’être mieux connu des  nouvelles générations sénégalaises. Un demi-siècle avant les premières publications de Cheikh Anta Diop, sur l’Egypte pharaonique, Yoro Dyâo  avait  rédigé ses « cahiers » montrant les liens organiques entre les peuples sénégambiens et de  l’Egypte antique.

En attendant que l’homme et  son œuvre soient mieux connus  des africains et des sénégalais les pouvoirs publics sénégalais devrait lui rendre un hommage en lui donnant des noms d’amphithéâtre d’université, de lycée et d’avenue  à Dakar et  à Saint -Louis sa capitale  régionale .


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