13 ANS DE NAUFRAGE DU JOOLA, J’ai vécu l’accident en différé

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13 ANS DE NAUFRAGE DU JOOLA, J’ai vécu l’accident en différé

Ce dimanche 27 septembre marque les 13 ans du naufrage du bateau Le Joola aux larges des côtes gambiennes. L’occasion sert toujours saisie à prier à la mémoire des disparus mais aussi de passer en revue beaucoup de souvenirs liés à « la plus grande catastrophe maritime » de l’histoire de l’Humanité. Avec quelque 2000 morts, le Joola a pris ou laissé, c’est selon, à chaque Sénégalais quelque chose.

 

Personnellement, j’ai vécu l’accident comme…en différé. Avant, pendant et après. Ce vendredi 27 septembre 2002, j’étais à l’Ambassade des Etats-Unis à Dakar, sise à côté de la Cathédrale, lorsqu’un coup de fil annonça la triste nouvelle à mon interlocuteur. Lequel, tout comme moi, se permit des instants de doute, avant que nous nous résolvions à écouter la radio. Walf Fm, pour ne pas la nommer, dont la diffusion de la célèbre musique du charriot de feu nous convainc de l’évidence. Les bribes d’informations disponibles portèrent sur l’état de surcharge du bateau au moment de jeter l’encre, les mauvaises conditions climatiques, etc.

 

Le silence prit d’assaut notre environnement, la tristesse aussi et des souvenirs liés à mon premier séjour à Ziguinchor en 1994, à bord de ce même Joola, dans des conditions assimilables, la surcharge et la pluie en haute mer. Il y eut aussi beaucoup de peur, en pensant à ce reportage envisagé avec ma rédaction, pour s’enquérir du trajet suite au retour de réparation du bateau et de sa remise en mer, quelques mois auparavant. Le sentiment d’avoir « échappé à la mort » était simplement fort en moi.

 

Puis, ce fut le moment des imaginations et des interrogations, relatives aux conditions de survenue du naufrage, la situation des passagers, les éventuels survivants...Sur ce sujet précis, un étudiant, rescapé, me fournit de plus amples détails. Son récit poignant et ses « absences » pendant nos discussions renseignaient à suffisance sur la tragédie.

 

Un mois après, je fus partie d’une équipe de reportage dépêchée à Ziguinchor, pour notamment travailler sur le désenclavement de la Casamance, rencontrer des autorités locales et surtout recueillir les témoignages de familles de victimes. Une véritable épreuve pour nous ! A Boucotte, Kandé, quartiers de Ziguinchor, tout comme au port d’où partit le Joola, la douleur était encore vive. Chaque proche essaie de ressasser le dernier souvenir de son parent resté au fond de la mer. « Il m’a appelé avant de quitter », « on s’est parlé alors qu’il était dans le bateau », « elle était couchée sur cette natte » sont quelques uns des propos à nous rapportés.

 

Je me souviendrai toujours…Je savais également que, ces récits étaient une sorte d’exutoire pour ces familles, à l’absence de corps. Les seuls rendus par la mer étant enterrés aux cimetières de Mbao ou de Kanten. Où des familles et des autorités se rendent à cette occasion pour commémorer. C’est en fait le seul lien pour ces proches, à défaut du renflouement tant réclamé du bateau, pour espérer faire le deuil. Définitivement, j’en doute. D’autant plus que bien des promesses faites par les autorités après le naufrage n’ont pas été suivies d’effets et rajoutent à leur peine.  

Last but not least, le militant écologiste Ali Haïdar, également ancien ministre, nous a permis, à travers une interview accordée au magazine THIOF, de mesurer davantage le drame. Le patron de l’Oceanium de Dakar avait fait part de l’horreur dans l’épave, de ces membres de mêmes familles ensemble, etc. De quoi ajouter un élément à nos différés de cette tragédie restée à jamais dans les annales, du Sénégal et du monde.


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Anonyme - #1

Rip Et Plus Jamais Cela.

le Lundi 28 Septembre, 2015 à 09:00:43RépondreAlerter

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