Le Blogs de : Souleymane Thiam

Le procès tant attendu de l’ex-président Hissène Habré s’est ouvert ce lundi 20 juillet à Dakar, devant les Chambres Extraordinaires Africaines créées par l’Union Africaine. Accusé de crimes contre l’Humanité, crimes de guerre et tortures, l’ancien homme fort de Ndjamena a décidé de boycotter son procès et ses avocats ont été absents à l’ouverture. Pendant ce temps, son épouse monte au créneau pour donner cette « mascarade » partie pour coûter cher à son homme. Il ne lui manque que la robe, pardon la bonne, dans sa plaidoirie via les média, qui ne doit pas manquer d’indisposer.

Elle est devenue une figure bien connue des média sénégalais. Lecteurs de la presse quotidienne comme téléspectateurs de certaines chaînes de télé ont fini, depuis longtemps, de mettre un visage sur le nom de Mme Fatimée Raymonne Habré. Le sujet d’intervention de la dame aux allures de grande intellectuelle, avec des lunettes bien ajustées, est invariable : le procès de son époux et plus généralement les charges qui valent à ce dernier d’être en détention. Elle est d’une aisance déconcertante sur le sujet et démonte un à un les arguments du Procureur général, idem pour tous ceux destinés à « diaboliser » son époux.

A bien la suivre, comme ce dimanche 19 juillet sur Walf TV dans l’émission Opinion, on se demande même à quoi servent les avocats de Habré. Il ne manque à Mme Habré que la robe…noire. Ses robes n’étant pas de circonstance, voilà donc Fatimée Raymonne Habré faisant sa plaidoirie via les média, convaincue sans certainement que ce terrain est également à gagner, ou à défaut y marquer des points. Comme le mystique qu’elle a cité dans une de ses précédentes sorties.

On ne peut dénier à cette dame le droit de défendre l’homme dont elle partage la vie depuis plusieurs décennies, le père de ses enfants. Point de surprise aussi de l’entendre présenter son homme sous les meilleurs habits, blanc comme une colombe là où d’autres s’acharnent à le salir.

Une gêne cependant ! Et pas petite ! C’est cette impression que laisse la dame, de se croire un crocodile à force de séjourner dans le marigot, pour prendre les choses dans un sens contraire à un célèbre proverbe. Accueillie avec son époux à Dakar depuis 1990, soit 25 longues années ou ¼ de siècle, Mme Habré s’y sent tellement à l’aise, au point de parler avec désinvolture de certains aspects de la vie sénégalaise et/ou se lancer dans des rapprochements mal à propos. Par exemple, la convocation du meurtre de l’étudiant Bassirou Faye. Sa ligne de défense : aussi normalement que ce fait ne valut pas une procédure judiciaire au commissaire Harouna Sy et au président Macky Sall, Habré ne devrait pas payer pour des actes menés par un capitaine dans une geôle. Court argument, il faut en convenir. Le gap étant himalayen entre un incident, fut-il couronné de mort d’hommes, et un système érigé en machine à tuer, avec brimades, tortures…

Elle n’omet pas de taxer de « mensonges grossiers » les propos de la plupart des acteurs à charge contre M. Habré et de « corrompus ».

Un dicton wolof veut qu’« une bouche ensanglantée ne débite jamais de propos joyeux » mais, l’attitude de la dame ne doit pas manquer de gêner en haut lieu, même si les autorités ne le disent pas. Pour bien moins que ça, des personnes en position d’exilées ont été rappelées à l’ordre ou simplement expulsées. Et pourtant, il y a de quoi s’estimer heureux pour le camp Habré, jugé en Afrique par une Cour du continent, là où Gbagbo et Taylor le sont par la CPI, laquelle traque aussi le Soudanais El Béchir.