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DÉLESTAGES - Samuel Sarr est-il seul responsable ?

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DÉLESTAGES - Samuel Sarr est-il seul responsable ?

Pour cause de coupure intempestive du courant, il a battu tous les records d’impopularité. Le Dg de la Sénelec se serait-il trompé sur sa stratégie de relance de la société ? Son goût pour les affaires aurait-il pris le dessus sur l’obligation de service public qui incombe à la Sénelec ? Éléments de réponse.

À moins de feindre la surprise, Samuel Sarr est le premier à avoir été pris de court par sa nomination à la tête de la Sénelec. Du moins, si l’on en juge par cet aveu sur les « Marches du Quotidien » (édition du 4 juin 2004). « La nomination de Samuel Sarr a été certes une grande surprise, car moi, j’étais dans le privé. Au lendemain de l’Alternance, j’ai continué à être dans le privé. J’étais entre la Gambie, le Congo, le Zaïre (NDRL : RD Congo), la Namibie et, surtout, l’Afrique du Sud où je continue à faire des affaires », confie-t-il dans cette édition du Quotidien.

En tout cas, son choix à la tête de la Sénelec était d’autant plus surprenant que sa proximité affichée avec le leader du Jëf Jël Talla Sylla, à l’époque grand pourfendeur de la politique de Wade, lui vaudra quelques bisbilles avec les tenants du pouvoir libéral. Pour rappel, son passeport gambien lui sera même retiré. Alors, en le propulsant à la tête de la Sénelec, a-t-on voulu « l’apprivoiser » ou, du moins, couper court à sa « dangereuse fréquentation » ? Ou était-ce en récompense à l’ex-financier de l’opposant Wade et au compagnon d’infortune, surtout dans l’affaire du juge Sèye à propos de laquelle, son nom avait été cité ? Toujours est-il qu’en débarquant à la Sénelec, Samuel Sarr n’était pas en terrain inconnu. « J’ai toujours été dans l’électricité», se plait-il d’ailleurs à répéter, comme pour couper court à toutes ces supputations et bien montrer qu’il correspond parfaitement au profil de l’emploi. Seulement voilà, la Sénelec ne s’en porte guère mieux. Les délestages ont repris de plus belle. Et pire que sous le régime socialiste où ils étaient plutôt le fait d’un syndicat-maison qui ne voulait surtout pas entendre parler de privatisation, c’est le déficit de production de l’entreprise qui est aujourd’hui en cause. Pour ne rien arranger, le bras de fer engagé avec les majors du pétrole laisse entrevoir un horizon …obscur pour les ménages et les entreprises en matière de fourniture d’électricité.

C’est à se demander si les autorités ont vu juste en portant à la tête de la Sénelec, société éminemment de service public, un pur produit du privé qui dit « continuer à faire des affaires » et, surtout, dans le secteur de l’électricité. Avec tous les risques de collision entre son propre business et les intérêts de l’entreprise publique qu’il dirige.

Des méthodes héritées du privé

Alors qu’il était dans le privé, Samuel Sarr a déjà entrepris de faire des affaires avec la Sénelec. « Depuis 1996, j’avais des relations avec cette entreprise, pour avoir essayé de fournir 500 mégawatts à l’époque », confie-t-il. Or donc, 500 Mw, c’est énorme. C’est beaucoup plus que la pointe de la Sénelec estimée aujourd’hui à 330 mégawatts et qui, au meilleur des cas, n’atteindra que 380 Mw d’ici la fin de l’année. N’est-ce pas bizarre que Samuel Sarr, devenu Dg de la Sénelec, semble afficher aujourd’hui moins d’ambition pour l’entreprise, en matière de production d’électricité, lorsqu’il était dans le privé. Car, en dépit d’un programme d’investissement d’un montant de 175 milliards pompeusement dénommé « Suxali Sénelec », la réalité de la production est plutôt en décalage avec les ambitions affichées et sans cesse rabâchées. Censée entrer en service entre le 2 et le 5 août dernier, la nouvelle centrale de Bel Air d’une puissance de 60 mégawatt est encore en cours de réalisation. Idem pour les centrales de Boutoute (5Mw) et Kounoune I (67 Mw) dont l’inauguration, initialement prévue entre avril et octobre 2006, a désormais toutes les chances d’être reportée. En revanche, rien n’est pardonné à la clientèle qui, en plus de subir les délestages, n’est guère épargnée par la politique de recouvrement tous azimuts initiée par Samuel Sarr. Il est vrai qu’avec une situation de la Sénelec présentant 17 milliards d’arriérés de paiement, 12 milliards de déficit et 2é milliards d’en-cours, il n’aura aucun mal à asseoir auprès des autorités sa logique de recherche effrénée du gain. Avec tous les risques de laisser libre cours à ce réflexe propre à tous ceux qui ont été un moment ou à un autre dans le privé et qui ont souvent un penchant quasi atavique pour les affaires. Voilà qui explique sans doute tout le flou autour de ce fameux chèque de 1,350 milliard retiré par le Dg de la Sénelec et son staff à Paris pour le compte de la société, puis « placé en devises ». « Ensemble, on a décidé qu’on allait le placer en devises. C’est un acte de gestion ça. On a placé dernièrement 9 milliards à Paris », s’était défendu le boss de la Sénelec.

Toujours est-il que certains réflexes, hérités sans doute du privé, n’ont cessé de rejaillir sur sa gestion de la boîte. En témoigne le système à pré-paiement dénommé Woyofal que certains assimilent à une recherche de « gain facile » de la part d’une entreprise qui prétend vendre de l’électricité à crédit sans que le client qui aura au préalable acheté pour sa consommation ne soit assuré d’une fourniture correcte. Faute de production suffisante d’électricité par la Sénelec.

Certains s’interrogent également sur l’obstination avec laquelle la direction générale de la Sénelec a arraché au gouvernement l’autorisation à construire ses propres centrales. Et ce, contre la volonté de certains bailleurs comme la Banque Mondiale dont le schéma de financement appliqué pour Kounoune I (67,5 Mw) a fait l’objet d’un rejet systématique de la part des responsables de la Sénelec pour Kounoune II. Y aurait-il une autre motivation pour la direction de la Sénelec que le simple « souci de diligence » comme l’a toujours prétendu Samuel Sarr au plus fort de son contentieux avec le directeur des opérations de la Bm, Madani Tall ? L’on peut simplement remarquer que la réalisation de la nouvelle centrale de Bel Air s’est faite suivant ce schéma propre aéu Dg de la Sénelec. Sans que toutefois ça ne se soit traduit par une plus grande diligence dans la réception de ce précieux outil de production.

Ces erreurs fatales

Mais s’il est un terrain particulièrement glissant sur lequel le Dg de la Sénelec aura peut-être embarqué les autorités, c’est peut-être bien celui des hydrocarbures. En effet, en semblant imputer la situation que traverse la Sénelec aux seuls pétroliers, les responsables de la boîte sont pour beaucoup dans ce bras de fer que l’État a engagé contre les majors du pétrole. Cette bataille-là, on la sentait venir depuis que le Premier ministre, en pleine crise de la SAR, a cru devoir accuser les compagnies pétrolières de chercher à faire chanter son gouvernement. Alors ces dernières, majoritaires à la SAR, ne faisaient que réclamer l’argent que l’Etat était censé leur devoir. Soit 3’ milliards pour la Sar. Et seulement 19 milliards pour le gouvernement. En définitive, seules une première tranche de 14,7 milliards et une autre de 5,5 milliards ont été acquittés par les autorités. Lesquelles, décidées d’en découdre avec les pétroliers, ont entre-temps acquis d’autres actions faisant ainsi passer leur part du capital de la SAR de 10 à 33%. Pis, les majors n’avaient pas fini de ruminer tout cela que la décision par le gouvernement de réquisitionner « les stocks de gasoil déclassé en diesel oil et en distillat tag et de fuel 380 existant sur le territoire national ». Soit 8000 tonnes gas oil appartenant à la compagnie Total et 4000 tonnes de Shell. Ce stock dont l’incidence sur la production de la Sénelec valait-il vraiment tout ce tintamarre fait autour de cette mesure de réquisition ? Que nenni. D’autant que des actions de représailles sont sérieusement à craindre. Certes, la Sénelec a pu depuis acquérir 20000 tonnes de combustibles directement sur le marché. Seulement, malgré toute la publicité faite autour de cette cargaison, elle ne représente qu’un mois de fonctionnement pour les turbines de la Sénelec. Encore qu’il aura fallu l’ouverture d’une ligne de crédit à la CBAO et le concours d’une structure comme … l’Anoci pour affréter la cargaison. En tout cas, quand on sait que la Sénelec n’a pas pour vocation d’acheter du combustible et qu’elle devra, malgré sa maigre trésorerie, payer rubis sur ongle le combustible qu’elle ira chercher sur le marché international, il y a tout lieu de croire que l’État s’est peut-être à nouveau embarqué sur une fausse piste en autorisant la Sénelec à importer directement du combustible. À moins que ce soit aux ménages et aux entreprises de supporter une nouvelle fois les erreurs de stratégies avec une hausse prévue de 15%. Initialement prévue à compter de ce 1er septembre, cette hausse a finalement été reportée en raison d’un contexte délicat avec ces délestages intempestifs que vivent les Sénégalais.

Et si finalement toutes ces difficultés n’étaient dues que par la remise en cause par les autorités de l’Alternance du partenaire stratégique, Elyo Hydro Québec à qui le régime socialiste avait eu l’habileté de refiler une Sénelec bien mal en point. À charge pour ce repreneur de consentir des investissements pour rentabiliser la boîte. Mais porté par un élan de changement tous azimuts, le nouveau régime dit de l’alternance a dû retrocédé à Elyo sa quarantaine de milliards. Sans avoir réussi jusque-là à trouver une solution de rechange. Au grand dam des usagers de la Sénelec qui paient toujours ces erreurs stratégiques. Et pour combien de temps encore ?



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