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Economie

Hausse exagérée des prix et fraude sur l’importation - Comment la mafia du lait s’enrichit sur le dos des Sénégalais

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Hausse exagérée des prix et fraude sur l’importation - Comment la mafia du lait s’enrichit sur le dos des Sénégalais
Au Sénégal, les mafias du foncier, du visa, du pétrole et autres mafias de la drogue… ont carrément éclipsé une autre mafia tout aussi redoutable. Une mafia dont les acteurs investissent peu, mais gagnent gros. Non seulement ils s’enrichissent frauduleusement sur le dos des consommateurs, mais encore ils tiennent les pouvoirs publics au point qu’ils règnent sans partage sur leur territoire. Cette mafia, c’est celle du lait.
 
Source : Le Témoin

Riz, huile, sucre, poisson, viande, ciment, fer, peinture, sable, béton, essence, électricité… tous les produits alimentaires et matériaux de construction deviennent hors de portée au Sénégal tant les prix ont grimpé de manière vertigineuse et inexplicable. Même le loyer et les tickets de soins de santé se sont alignés à la hausse. Cette flambée des prix s’est à ce point aggravée ces dernières semaines que le gouvernement lui-même a pris conscience du danger qu’il y avait à ne pas réagir. C’est pourquoi, d’ailleurs, il a décidé de créer une brigade de lutte contre la spéculation, celle sur les denrées de première nécessité notamment.

Eh bien, cette brigade mixte aura du mal à assainir le marché, surtout celui du lait, sur lequel règne sans partage une redoutable mafia. En fait, si ce produit ne connaît jamais de pénurie, c’est que son prix est devenu tellement élevé que les Sénégalais n’ont plus les moyens de l’acheter. Le lait, aliment complet comme nous l’avions appris à l’école, est devenu au Sénégal un aliment… incomplet et pauvre. Et pourtant, ce produit aurait dû être à la portée de tous les citoyens d’un pays aussi pauvre que le nôtre où les plus démunis ne se nourrissent que des plats à base de lait ou de lait caillé. Mieux, dans hôpitaux comme dans les crèches, les canaux à lait constituent des voies de réanimation idéales pour malades comateux et enfants prématurés. Sans oublier les sujets âgés ou les vieillards dont le lait est devenu l’ultime bouée de sauvetage alimentaire. Bref, le lait est un aliment nutritif indispensable à l’organisme, surtout celui des enfants et des vieillards. D’où la gravité de la situation d’otages dans laquelle les industriels du lait et autres importateurs tiennent aujourd’hui le pays en lui imposant leurs propres prix. Une situation qui a connu une aggravation inquiétante après l’alternance survenue en 2000. Car, de 1998 à 1999, le sachet de lait en poudre de 1000 g, par exemple, se vendait entre 750 fcfa et 900 fcfa. De nos jours, ce même sachet de "Baralait" coûte 1.400 fcfa, celui de lait "Jaboot" 1.500 fcfa, le "Vitalait" 1.500 fcfa, le "Laicran" 1.750 fcfa, le "Roilait" 1.500 fcfa, "Halib" 1.500 fcfa etc… Même le prix du lait et de la crème de lait concentré ou additionnés de sucre ou d’autres édulcorants comme "Bonnet Bleu", " Daraal" et compagnons de rayons ont connu des hausses exagérées de 1500 fcfa alors qu’il y a quelque trois semaines seulement, ces pots ne coûtaient que 1.100 fcfa.

La vente du lait est livrée à la spéculation, et l’importation à la fraude. Dans le secteur du lait, la mafia est tellement puissante et organisée qu’aucune autorité politique ou douanière n’ose pousser sa curiosité trop loin. D’ailleurs, l’ancien ministre du Commerce, M. Khourreyssi Thiam, qui avait pris son courage à deux mains pour tenter de démanteler la mafia du lait et assainir le secteur, avait fini par prendre ses jambes à son cou. " Pourtant, le ministre Khousseyssi Thiam avait voulu revenir à la charge pour assainir le secteur du lait, mais malheureusement il a été chassé du ministère par une partie de cette mafia " nous explique un fonctionnaire en service au ministère du Commerce. Comme quoi, ce n’est pas demain que l’Etat va surveiller le lait sur le feu de l’importation. Pourtant, ce produit aurait pu être à la portée des consommateurs du fait des avantages et allégements que l’Etat accorde aux industriels et hommes d’affaires le fabriquant ou l’important. En fait, la plupart des industriels du lait en poudre, ou prétendus tels, importent du produit fini ou du lait prêt pour la consommation qu’ils se contentent de conditionner. " Ce sont des gens qui se réfugient derrière des unités ou soi-disant usines de conditionnement. Et ce alors qu’il n’y a rien à reconditionner ou à transformer sur le lait qu’ils importent. Ce lait que nous voyons débarquer au Sénégal, c’est comme le riz, c’est-à-dire un produit fini ! " nous confie un agent des douanes en service au Port de Dakar. La mafia du lait, nous rappelle la fameuse histoire du "sucre roux" et du "sucre blanc" qui avait défrayé la chronique dans les années 90. Pour ce coup-ci, rares sont les industriels et commerçants qui importent la matière première, c’est-à-dire le lait à transformer et à reconditionner. Le seul "effort" qu’ils fournissent pour rendre le produit fini, c’est la mise en emballage en sachets de 25g, 50 g, 500g ou 1000 gr. Chacun appose sur cet emballage son logo, son nom commercial et sa marque déposée, et le tour est joué ! Au niveau des bureaux de douanes sis au port de Dakar, on nous révèle que presque tous les "laitiers" sénégalais s’approvisionnent chez les mêmes grossistes ou les mêmes pays producteurs, c’est-à-dire la Hollande, le Brésil et la France. "Vous retrouvez ces mêmes sacs de lait en poudre importés dans les marchés. D’ailleurs, ce sont ces sacs de 25 kg que les femmes utilisent pour préparer du lait caillé" dit notre interlocuteur.

D’après le même, l’application des tarifs de l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest-africaine) encourage la fraude, enrichit l’importateur et guillotine le consommateur. Au port de Dakar, le particulier paie 20 % de droits de douanes à l’importation. Tandis que l’industriel ayant sa société de lait agrée et reconnue ne s’acquitte que de 5 % seulement de droits de douanes. " Explication : on lui applique les tarifs de l’Uemoa qui disent que tout produit fini doit payer 20 % de droits de douanes, et tout intrant 5 % seulement. C’est de la fraude à l’importation suivie de fausse déclaration puisque la plupart de ces sociétés ou entreprises qui s’activent dans le lait, importent des produits finis ! Du vrai lait prêt pour la consommation…" déclare cet agent des douanes qui vient de boucler plus de 10 ans de service au port de Dakar. " Mieux, ces industriels ont l’avantage de mettre leur cargaison en entrepôts industriels. Vous voyez, en dehors de la fraude, ils ont toutes les facilités pour diminuer le coût du lait ou le stabiliser ! Quoi qu’il en soit, le cours du pétrole ou la hausse chez le producteur étranger ne peut justifier cette hausse doublée de fraude " a ajouté notre interlocuteur tout en attirant l’attention des pouvoirs publics sur les agissements de la mafia qui règne sur le secteur du lait au détriment de l’économie du pays et du pouvoir d’achat des consommateurs. Dans certains pays africains, le lait comme le riz, les médicaments pharmaceutiques ou la farine sont des produits sur lesquels l’Etat a un droit de regard. Certes, les prix bougent mais ne connaissent jamais des hausses meurtrières comme celles que nous connaissons dans notre pays actuellement. Nous ne plaidons pas pour que la corporation des industriels soit solidaire avec le gouvernement, mais pour qu’au moins, elle soit humaine avec le peuple. Particulièrement les familles démunies où les enfants n’ont qu’une pièce de 100 fcfa pour dîner le soir. Cent francs pour acheter un petit sachet de lait en poudre, du sucre, du pain ou du couscous afin de pouvoir braver une longue nuit. Une chose est sûre, si l’Etat ne surveille pas comme lait sur le feu les agissements de ces industriels mafieux qui s’activent dans le marché du lait, il faut s’attendre à des émeutes de la faim pour bientôt…



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