Envoyé pour convoyer du matériel scolaire en Casamance : Un membre de Sos Casamance disparaît avec un car et une trentaine de cartons de livres

Du matériel scolaire et un car offerts par des donateurs ont disparu avec le convoyeur. C'est une valeur estimée à plus de 3 millions de francs Cfa, calcule le président de Sos Casamance, qui est dans tous ses états. Une trentaine de cartons de livres, 6 palettes de peinture à l'eau, 7 trousses, 111 gouaches de différentes couleurs, 50 paquets de feuilles et d'autres matériels scolaires étaient chargés dans ce car. Sos Casamance a porté plainte au Sénégal et envisage de le faire en France pour rentrer dans ses biens pour le bonheur des élèves bénéficiaires.

(Correspondant permanent à Paris) - Les membres de Sos Casamance de Paris sont dans une colère noire. Leurs matériels scolaires collectés durant les vacances de juillet et août 2009 auprès de leurs donateurs ont disparu. Le convoyeur, chargé de les déposer à Ziguinchor est lui aussi invisible. Tout est parti de la confiance que Sos Casamance avait à l'endroit de Franck Pellatierro qui s'était acquitté d'une première mission avec dévouement. Et quand Amadou Sylla et ses camarades ont rassemblé tout le matériel scolaire et le car offert par un garagiste français pour saluer les actions de bienfaisance de l'association caritative, Sos Casamance a voulu encore lui faire confiance. Franck Pellatierro qui en est un membre, devait transporter en quinze jours le matériel en question jusqu'au Sénégal en passant par le Maroc. Les premières difficultés du convoyeur apparaissent. L'association n'avait pas un document qui autorise le transit de plus de 3 tonnes de matériels venant de France par le Maroc. Il saisit alors le président de Sos Casamance. Qui se rend compte qu'entre la France et le Maroc, ‘il y a une convention qui stipule qu'on ne peut pas transporter de la marchandise ou du matériel de plus de 3 tonnes en traversant le Maroc sans autorisation’. Il se démène comme un diable pour avoir l'autorisation et sortir d'affaire son convoyeur. Après une semaine au Maroc, la situation se décante et Pellatierro embarque dans sa voiture pour le Sénégal via la Mauritanie. ‘Au Sénégal, il a été bloqué par les douanes qui expliquent qu'il faut une escorte car ils ne pouvaient pas le laisser comme ça. Il fallait pour ça 30 000 francs Cfa. M. Pellatierro ne voulait pas de cette escorte. Mais je lui ai dit que, puisque c'est la loi, selon les douaniers, il fallait céder. Il accepte’, rapporte Amadou Sylla sur les nerfs. Comme si cela ne suffisait pas, d'autres problèmes attendaient Franck Pellatierro. En effet, l'escorte a pris fin, mais pas les difficultés. Selon le président de Sos Casamance, ‘arrivé à un point de contrôle douanier, Pellatierro m'appelle pour me dire que les douaniers lui ont tout pris et il ne lui reste que quelques cartons de livres’, fait savoir M. Sylla qui y décèle un parfum de ‘détournement de biens et d'abus de confiance’ de la part de son convoyeur.

La menace, l’astuce payante

Mais, pour en avoir le cœur net, Sos Casamance demande un rapport de toutes les difficultés rencontrées et le matériel disparu, mais en vain. ‘Je lui ai dit de me faire un rapport dans lequel il doit m'expliquer ce qu'on lui a pris dans les différents points de contrôle douaniers. Sur la base de ce rapport, je fais une communication. Et puis, normalement quand la douane saisit une marchandise ou du matériel, elle donne un reçu’, selon Sylla. Même si Franck Pellatierro aurait refusé de s'exécuter, Amadou Sylla active ses réseaux pour dénouer la situation. C'est ainsi qu'il appelle le Gouverneur de Ziguinchor pour intervenir. Justement, celui-ci devait se rendre à Dakar et promet de faire quelque chose. Une coïncidence ! Le Gouverneur accepte de faire la médiation. Il passe un coup de fil à son homologue de Saint-Louis et à Franck, le convoyeur, pour le rassurer que tout se passera bien. De fil en aiguille, le travail des deux gouverneurs paie : la situation s'est décantée. Franck reprend son car en direction de Dakar. Mais, les ennuis de Sos Casamance n'ont pas pris fin pour autant. ‘Arrivé à Dakar, il m'appelle pour me dire que les douaniers lui ont tout pris. Je lui ai dit encore de me faire un rapport de toutes ses difficultés rencontrées en cours de route et de tout ce que lui a été pris. C'est bien de parler au téléphone, mais moi, j'ai besoin d'un rapport pour justifier ce qui lui est arrivé et essayer de faire des démarches pour voir si je peux récupérer le matériel saisi. Si je n'ai pas de rapport, je ne pourrai rien faire en conséquence’, insiste le président de Sos Casamance auprès de son convoyeur. Mais Franck refuse par le silence et se cache à la Sicap, auprès de sa copine sénégalaise qui était venue le rejoindre au Maroc. Conséquemment Amadou Sylla se fait une religion sur la situation : ‘Puisque je n'ai pas de rapport et qu'il a disparu depuis, je me dit qu'il a vendu le matériel’, accuse-t-il. Par le biais de son mandant, Khassimou Sané, Sos Casamance porte plainte contre Franck Pellatierro devant la brigade de gendarmerie de Bignona. Celle-ci saisit les policiers de Dakar qui débarquent à la Sicap où s'est réfugié Franck. Mais ce dernier avait disparu. Amadou Sylla pense qu'il avait déjà filé en Mauritanie. Coup de fil et mails lui ont été envoyés. Mais le convoyeur fait le mort. Le président de Sos Casamance trouve une astuce qui va payer : la menace. ‘ Il y a trois jours, je lui ai envoyé un mail menaçant (datant du 3 mars, Ndlr) en lui disant que je lui donne 48 heures pour réagir. Sinon, je porte plainte contre lui ici à Paris. J'ai des amis avocats qui sont prêts à engager la procédure’. Prenant la menace au sérieux puisqu'il ne s'agit plus de la police sénégalaise, mais française, le convoyeur sort de sa cachette et de son mutisme. ‘Il me répond le 4 mars, en me disant qu'il n'a escroqué personne et qu'il a déposé le matériel auprès de Sos Casamance’, rapporte Amadou Sylla qui ne comprend plus. Mais après vérification auprès de ses représentants au Sénégal, il en conclut que Franck Pellatierro est en train de raconter des histoires. ‘Je lui ai dit alors de me communiquer l'adresse de la personne auprès de qui il a laissé le matériel et la camionnette. J'ai transféré le mail à Sos Casamance qui me répond qu'ils n'ont reçu aucun livre de Franck Pellatierro et personne ne l'a vu en Casamance, à moins qu'il existe deux Sos Casamance au Sénégal’. Amadou Sylla en conclut finalement que le matériel et le car font l'objet de ‘détournement’ par Franck qui les aurait ‘vendus’. Alors, il contacte ses amis avocats au niveau du barreau de Paris qui lui conseillent de commencer par la négociation avant de porter l'affaire devant les tribunaux français.

Dans cette affaire, ce sont les élèves et les écoles de Casamance qui sont les grands perdants d'autant plus le travail d'identification des enfants et des écoles bénéficiaires a été déjà fait et ils attendaient leurs cadeaux. ‘Ce qui veut dire que les gens avaient espoir. Mais, on est face à un détournement de biens et abus confiance. On va l'obliger à nous rendre notre bien soit en payant ou en ramenant le matériel disparu. Ça, c'est clair !’, fait savoir Amadou Sylla.