Elle est plus connue sous le sobriquet de “ Maty 3 pommes ” en raison de sa petite taille. Elle se fait également remarquer par son “ look Roots” assez original : un chapeau ou un foulard, des dreadlocks, un visage de poupée souvent ultra maquillé. Cette admiratrice de Bob Marley, qu’on l’aime ou pas, fait partie des stars du petit écran et du paysage radiophonique. Grâce à son caractère bien trempé et à son insatiable désir de remise en cause perpétuelle, elle a réussi à s’imposer. Retour sur le parcours d’une battante.
Salle de maquillage de la chaîne de télévision privée 2S Tv. Bientôt 17 heures. Les maquilleuses Aïda Guèye et Vénus Baal s’activent à mettre les dernières couches sur le visage de l’animatrice Mame Maty Fall, plus connue sous le sobriquet de “ 3 pommes ”. Sous le regard attentif de l’invité de l’émission “ Show tout chaud ”, Me El Hadji Diouf, avocat à la Cour et homme politique. “ Je suis un peu stressée ”, lance Maty “ 3 pommes ”. “ Show tout chaud ” est une émission mensuelle destinée au “ people ” et autres célébrités qui discutent sans tabous avec l’animatrice. “ C’est toujours intéressant de voir la vivacité d’esprit de Maty 3 pommes ”, confie-t-il, un peu hilare.
Dix minutes après, Maty et son invité longent un long couloir menant au plateau. A la porte du studio, la réalisatrice Thioro Samb lui souffle à l’oreille les dernières consignes. Puis Maty va saluer ses parents qui, comme d’habitude, tiennent à lui apporter leur soutien. Par leur présence. Quelques instants après, elle se dirige vers le plateau. Le public en place depuis 15 heures, s’attend à une confrontation houleuse au regard du bagout et du tempérament de l’animatrice et de son invité, qui sont maîtres dans l’art de la provoc’. Tout au long de l’émission, Mame Maty Fall subit les assauts répétés de son invité dont le sens de la répartie a fait mouche. A la fin de l’émission, le souffle un peu coupé, Maty avoue : “ il m’a dominé ”. “ Show tout chaud ”, est une émission qui a permis à la journaliste-animatrice de gagner en notoriété et au public de la 2S Tv de mettre un visage sur la voix qu’il entendait déjà à travers le filtre fréquentiel.
Petite fille déjà, Mame Maty avait un goût prononcé pour la radio. En l’absence de son pater, Amadou Fall, journaliste à Radio-Sénégal, elle titillait l’appareil d’enregistrement de celui-ci. “ Mon père voulait que j’exerce une profession autre que celle de journaliste animatrice ”, révèle-t-elle. Mais très vite, elle retrouve la voix du sang : le micro, la radio. Tel père, telle fille...
“ Black label ”, une chance...
A la radio privée Walf Fm, Mame Maty Fall co-anime l’émission “ Black label ” avec le promoteur et animateur Jules Junior. Cette émission, très prisée à l’époque par les jeunes Sénégalais, lui a permis d’affûter ses armes et de se révéler au public. “ Il m’a donné la chance au moment où j’en avais besoin ”, déclare-t-elle reconnaissante à l’endroit de Jules Junior. L’animation ne l’empêchait pas de faire des “ papiers ” pour la rédaction. Les auditeurs de Walf Fm se familiarisent avec sa voix timbrée, surtout à travers les reportages, genre dans lequel elle excelle. “ Maty est une spécialiste du reportage ”, déclare Souleymane Niang, directeur de la Radio Océan Fm où elle travaille depuis son départ de la Rfm. Leurs chemins s’étaient déjà croisés à la station Walf Fm. A la radio du Sacré-Cœur, Mame Maty Fall avait fini par imprimer son style.
“ Son professionnalisme est incontestable, reconnaît Souleymane Niang. Dans la recherche de l’information, elle a l’esprit alerte, les sens en éveil. Elle est aussi très prompte à recouper les informations ”.
Mame Maty Fall, c’est aussi le dynamisme en bandoulière. A l’occasion des évènements chauds comme les grèves à l’Université, les procès, elle tient en haleine les auditeurs grâce à son style et sa capacité à décrocher les interviews exclusives. Le 20 novembre 2004, au Tribunal régional de Dakar, elle se fait agresser par un agent de l’administration pénitentiaire, qui voulait l’empêcher d’arracher quelques mots à un confrère qui venait de sortir du bureau du juge d’instruction. Un des atouts de Mame Maty Fall, c’est aussi sa forte personnalité qui lui sert également de bouclier. Grâce à son tempérament de feu, qui fait d’elle une sacrée battante, elle a dû bûcher ferme avant de savourer les délices du succès.
20.000 francs Cfa de salaire à ses débuts
Dans les années 1995-1996, elle commence à s’essayer comme animatrice aux côtés de Simon Meledje à Dakar Fm. De nature aventureuse, elle passe trois mois à la station Sud Fm de Banjul durant les vacances de l’année 1996. De retour à Dakar, elle s’inscrit à l’Institut supérieur des sciences de l’information et de la communication (Issic) pour recevoir une formation de journaliste. En 1997, elle intègre la radio Walf Fm. A l’époque, Mame Maty ne percevait que 20.000 francs Cfa comme salaire. Un salaire qu’elle trouve normal. “ Si j’étais à la place de Sidy (patron du groupe Wal Fadjri), je ferai pareil parce qu’à l’époque je n’avais rien à dire. C’était à moi de prouver ce dont j’étais capable ”. A force de travailler, elle a fini par convaincre et s’imposer.
Grâce à son professionnalisme, elle a une facilité déconcertante à trouver du travail, dans un environnement où les “ gagne-petit ” font légion. En moins d’une année, elle est passée de la Radio télévision sénégalaise (Rts) à Radio futur média (Rfm) avant de déposer ses baluchons à Océan Fm. Une valse qui peut être interprétée comme un signe d’instabilité. Mame Maty Fall explique que cette “ bougeotte ” est due à un ardent désir d’apprendre, mais surtout par le désir de se mettre à l’abri du besoin. “ Depuis que je suis à la 2S Tv, j’ai l’habitude d’avoir deux salaires dont je ne peux plus me passer ”, sourit-elle. Mais c’est le désir de se perfectionner au plan professionnel qui prend le dessus sur l’appât du gain. Un signe de remise en cause perpétuelle et une marque d’humilité. “ Elle est toujours en demande de valeur ajoutée ”, note Souleymane Niang. Consciente que l’avenir, c’est la télé, Mame Maty Fall n’a pas hésité à faire un stage de six mois à la Rts. Ce fort désir d’ascension, elle le doit en grande partie à son père. “ Je veux que tu sois parmi les meilleurs ”, avait-t-il l’habitude de lui dire. Il lui arrivait même de passer à l’école pour voir comment sa fille se comporte en classe, témoigne Mame Maty, le sourire aux lèvres.
Une “ grande gueule ” fidèle en amitié
Bien que star des filtres fréquentiel et cathodique, Mame Maty Fall est loin d’avoir la moutarde au nez. Elle continue à fréquenter ses amis d’enfance avec qui elle partage son temps libre. Sophie Cissé, monteuse et infographe à Enda, qui fait partie de son premier cercle, souligne que Mame Maty est “ très gentille, sincère dans ses relations ”. Sophie reconnaît qu’elle est également une “ grande gueule ”. “ Elle dit tout ce qu’elle pense sans se soucier des conséquences. Cela peut être perçu comme un défaut dans la société sénégalaise, alors que c’est une qualité ”, explique Sophie Cissé.
Ce trait de caractère est révélateur de la personnalité de la journaliste animatrice, qui dit ne pas redouter de retomber dans l’anonymat. “ Je ne suis pas allée vers la notoriété. C’est elle qui est venue vers moi. Le jour où je ne sens plus ce que je fais, je retournerais vivre tranquillement avec ma mère ”. Pour l’heure, c’est le show après des débuts difficiles. Un show pas tout chaud...
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