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Justice

Maisons de justice : Ces autres formes de procès

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Alternative crédible aux tribunaux, tant au niveau temporel que financier, ces Maisons de justice facilitent la justice au niveau local. Pionnière en 2004, celle du quartier des HLM a connu le succès au point qu’on en compte actuellement trois autres dans le département de Dakar. Et il y en a 18 sur toute l’étendue du territoire. À travers la médiation et l’information, ces services de proximité rapprochent la justice et le citoyen. Elles revendiquent leur statut de vecteur de paix sociale.

Jeudi 18 février : C’est jour d’audience à la Maison de justice de Grand-Yoff. Bien sûr, on est loin du Palais de justice de Dakar où les justiciables suffoquent, anesthésiés aussi par la peur du mandat de dépôt. À Grand-Yoff, le décor est simple : Un homme et une femme, en plein désaccord, font face à Birame Dieng, ancien haut magistrat, aujourd’hui nommé médiateur de cette Maison de justice. Avec un regard parfois sévère, parfois bienveillant, il arbitre la discussion entre les deux parties. Tantôt, il rappelle à l’ordre, avec autorité l’un des deux débatteurs, tantôt il esquisse un sourire compréhensif, mais intimant un «soyez raisonnable». Quand le ton monte, il tape fermement sur la table et redonne à l’échange un cachet solennel, non sans rappeler qu’«on parle entre personnes civilisées». Les deux parties finissent par signer un texte d’accord, puis ils sortent. Vingt minutes d’audience. L’affaire est réglée. 

Ce jour-là, la prévenue et le plaignant s’opposaient quant au remboursement de quelques milliers de francs. À la sortie, il a été convenu que la fautive rembourserait la somme à raison de 10 000 F CFA par mois. Le procès-verbal, signé par les deux parties, est là pour attester de cette décision. C’est l’exemple type de la rapidité et de la simplicité vantée par les coordonnateurs des Maisons de justice. Créées en 2004, les Maisons de justice, dont la raison d’être originelle était de désengorger les tribunaux au niveau local,  deviennent de plus en plus attrayantes. Ce décongestionnement s’est traduit par la prise en charge des petites affaires civiles. Il s’agit «d’éviter que les personnes saisissent la justice, mais plutôt qu’elles arrivent à régler leurs différends par la médiation et la conciliation», explique Birame Dieng. Cette procédure, vidée en quelques minutes; aurait pu s’éterniser dans les tribunaux qui ploient sous le poids d’incalculables dossiers. Sans oublier les longues procédures et les honoraires des avocats qui découragent les plaignants. 

La justice par médiation, la confiance comme credo

Aujourd’hui, à Dakar, on trouve des Maisons de justice dans le quartier des HLM, aux Parcelles Assainies, à Rufisque, à Thiaroye et enfin à Grand-Yoff, la benjamine. Plus qu’un simple organe de justice, elles sont surtout considérées comme des services de proximité. Aux HLM, Ousmane Barry, coordonnateur et Ousseynou Sylla, médiateur parlent d’une même voix de «justice sociale». Il s’agit d’établir une paix sociale au sein d’une communauté. Les maisons comptent deux éléments majeurs : le coordonnateur et le médiateur. Le premier traite le dossier quand le deuxième préside les audiences et tente d’arriver à un compromis. Souvent, ces derniers sont d’anciens hommes de loi à la retraite. Aux HLM par exemple, Me Sylla désire «être au service des populations et mettre à profit les connaissances [qu’il] possède pour avoir travaillé dans la justice durant 35 ans». Il a été greffier en chef à la Cour d’appel de Kaolack, au Tribunal départemental de Mbour et conseiller technique au ministère de la Justice. Un parcours riche. 

Le processus est simple et gratuit. Un plaignant vient poser sa plainte qui est prise en charge par le coordonnateur. Ce dernier traite le dossier et émet les convocations. Les parties se retrouvent ensuite face au médiateur afin de trouver un terrain d’entente. En cas d’échec, au bout de plusieurs séances sans résultat, ils sont réorientés vers les juridictions qualifiées, tribunaux ou commissariats. Cependant à en croire le coordonnateur de Grand-Yoff, Louis Nicolas Gorgui Lopy, la justice sociale triomphe dans 95% des cas. Chose importante, les accords ne sont jamais contraignants. «Nous ne rendons pas de décision, nous amenons les parties à trouver un consensus à leur différend. Sans les forcer, sans les contraindre. C’est la volonté des partis qui prédomine», explique Me Sylla. Depuis 2004, la maison des HLM, pionnière du programme, a réglé environ 6 000 cas. Pour Birame Dieng, arriver à  réunifier deux parties est «émouvant». «Je suis très satisfait lorsque j’arrive à réconcilier deux personnes qui étaient sur le point de se battre», rapporte-t-il. Ousmane Aw, plaignant, qui a fait appel plusieurs fois à ces services pour des affaires d’argent, reconnaît apprécier ces prestations. «Chaque fois, j’ai trouvé des résultats abordables», assure-t-il avant d’ajouter que «leur qualité, c’est la médiation».

L’objectif final est bien d’instaurer la paix sociale dans les quartiers. Utopique bien sûr, mais, il est louable de voir ces entités œuvrer dans ce sens. Pour accéder à un tel résultat, M. Ousmane Barry affirme qu’il faut «avoir le sens de l’écoute» et «un bon contact avec la population». «L’impartialité et la neutralité sont les principaux caractères que l’on cherche», ajoute-t-il. Cette dimension sociale est tellement revendiquée que le médiateur de la Maison de justice des HLM se sent quand même obligé de rappeler que toutes les médiations se font dans le respect des lois et du droit. En effet, ces entités sont dépendantes du ministère de la Justice et répondent au procureur de la République. Pour qu’elles soient crédibles et qu’elles s’imposent correctement dans leur quartier, la question de la confiance auprès des citoyens est primordiale. Ainsi, elles se consacrent à la gagner jusque dans leur sémantique. En effet, aux HLM, on choisit les mots avec minutie. Par exemple, on ne parle pas de «plaintes» ou «d’audiences», pas de «juge», mais de «médiateur», pas de «conflits», mais de «différends». Enfin, on n’utilise pas l’appellation «Tribunal», mais «Maison de justice», qui est bien plus rassurante, plus conviviale. Dans ce même but, les médiateurs et coordonnateurs sont souvent des personnalités connues et reconnues dans leur quartier. C’est plus rassurant pour les citoyens.

Une dimension informative majeure

La recherche de la paix sociale passe aussi par l’information et la prévention. C’est un levier d’action des Maisons de justice. «Le plus souvent, les citoyens ne sont pas informés de leur véritable droit», assure Birame Dieng. La sensibilisation a tant pour objectif de faire connaître les Maisons de justice que d’éduquer les gens au droit. Louis Nicolas Gorgui Lopy, juriste de formation, explique que «des situations aboutissent à des problèmes, car la population ne comprend pas». C’est par exemple le cas avec les faux extraits de naissance ou une méconnaissance du droit autour du mariage ou de la succession. Son rôle est alors d’informer les gens qui viennent le voir. 

La Maison de justice de Grand-Yoff prépare pour avril une journée autour de la sécurité afin de former les jeunes et les moins jeunes à cette question. De même, elle travaille avec les notables du quartier, notamment les responsables de quartiers qui peuvent faire de la prévention, selon les directives du coordonnateur, dans le but d’améliorer la qualité de la vie. À Grand-Yoff, le défi reste de taille, car «on constate qu’on a un véritable problème de sécurité : des agressions, des vols, des viols, la délinquance, l’abandon scolaire…», confie Louis Nicolas Gorgui Lopy. Il s’agit aussi de faire connaître la Maison de Grand-Yoff, qui n’a été ouverte qu’en 2014. Même si le coordonnateur affirme qu’avec 1 700 dossiers traités depuis le début, la fréquentation est bonne : jeudi 18 février, l’audience à laquelle nous avons participé était la seule de la journée. On peut se demander si la rapidité de traitement tant vantée n’est pas aussi due au fait que les Maisons de justice ne sont pas surchargées. Néanmoins, cette justice de proximité, ces services décentralisés, œuvrent sans nul doute pour la paix sociale de par leur approche de la population et leur façon de traiter les... «différends».



3 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Mars, 2016 (15:22 PM)
    JE SUIS CONTRE CETTE MAISON DE JUSTICE

    JE SUIS VICTIME D'UNE DESTRUCTION VOLONTAIRE DES BIEN APPARTENANT A DÉTRUIT

    J'AVAIS OCCUPER UNE CHAMBRE A PIKINE DEPUIS 2ANS SANS ARRIÉRER DE PAYEMENT .

    LA PROPRIÉTAIRE ET VENU ME DEMANDER SON ARGENT J'AI LES D'ATTENDRE JUSQU'AU 10 DU MOIS IL N'EST PAS VOULU ENTENDRE çA

    IL A DÉMONTÉ LA PORTE DE MA CHAMBRE EN CE MOMENT JETAIS AU TRAVAIL.

    J'AI PORTAIS PLAINTE AU NIVEAU DU TRIBUNAL IL MON DIS D’ALLER A LA MAISON DE LA JUSTICE JUSQU’À PRÉSENT RIEN DEPUIS 1 ANS .

    SES INJUSTE JE SUIS CONTRE LA MAISON DE JUSTICE VOUS FAITE DU TRAVAIL ARBITRAIRE



     :sunugaal: 
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  2. Auteur

    Anonyme

    En Mars, 2016 (15:56 PM)
    C'est mieux que les tribunaux deh , sama waye dji.

    Moi j'ai déposé 2 plaintes au parquet avec 2 soit-transmis a la Sûreté Urbaine de Central de Dakar. jusqu'à maintenant , rien . on m'a même dit que les policiers affectés ont emporté avec eux les dossiers. j'ai demandé, ils m'ont dit que l'un d'eux , Ba est maintenant à l'Ocrtis qui est dans le même bâtiment. mais personne ne lui a demandé de rendre les dossiers volés. le procureur général sera saisi, puisque ce n'est pas à moi de forcer un policier à rendre des documents transmis par M Le Procureur!

    Alors un conseil! laisses la maison de justice régler le problème, mais gardes à l’œil les délais de prescription .

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    Auteur

    Anonyme

    En Mars, 2016 (20:29 PM)
    senegal toute la justice est pourrie du commissariat au tribunal
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