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Politique

Entretien avec... Cora Fall ( Pds - Rufisque ) : ‘Au Pds, on cherche à régler un compte avec quelqu'un ou à faire tomber quelqu'un’

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Entretien avec... Cora Fall ( Pds - Rufisque ) : ‘Au Pds, on cherche à régler un compte avec quelqu'un ou à faire tomber quelqu'un’
Il a été l’une des figures de proue de l’ancien régime socialiste à Rufisque. Converti, aujourd’hui, au libéralisme, Cora Fall a, encore, en travers de la gorge, la perte, par la Coalition Sopi 2009, de l’une des quatre premières communes du Sénégal qu’est sa ville natale. Une défaite qu’il impute à l’indiscipline des responsables de son parti à Rufisque. Et selon l’ancien sénateur socialiste, le président Wade doit impérativement réagir. Autrement, il prédit la catastrophe pour son camp en 2012. Entretien.

Wal fadjri : Comme dans nombre de localités, le scrutin du 22 mars 2009 a consacré la défaite de votre Coalition dans votre commune. Qu'est-ce-que cela vous fait de perdre une ville aussi stratégique que Rufisque ?

Cora Fall : Cela fait très mal, je l'avoue (il se répète), bien que le nouveau maire est mon ami parce qu’on a fait beaucoup de choses ensemble, notamment le sport. Il est venu même me voir pour me demander de travailler avec lui afin de reprendre la ville, c’était le jour du décès du père de Ndiawar Touré. J’ai dit ‘non’ et que j’aurais dû même créer un parti mais je ne l’ai pas fait par respect et par discipline. Je peux demain créer un parti à Rufisque et briguer des responsabilités à partir de cette base. J'ai eu à le faire au parti socialiste et m’en sortir 13e avant que les Mbaye Jacques et autres n’arrivent. C’était en 1990 avec Senghor. A l’époque, il y avait six coordinations dans la région de Dakar, j’en faisais partie et nous étions les barons.

Wal fadjri : Dans la perspective de la présidentielle de 2012, ne craignez-vous pas que votre camp subisse le même sort ?

Cora Fall : Tout dépendra de la direction du parti et des réformes qui se feront. Il faudrait que les gens apprennent à être disciplinés, à respecter les mots d’ordre du parti. Que les gens sachent que les résultats sont dus à l’indiscipline des uns et des autres. Je pense que si les gens font une prise de conscience d’ici là, nous pourrons renverser la situation.

Wal fadjri : Que conseilleriez-vous à Me Wade de faire pour éviter à son camp le même cas de figure en 2012 ?

Cora Fall : Je dirais à Wade de renforcer la discipline dans le parti. A l'heure actuelle, il n’y a que la discipline qui pose problème. Le président doit choisir ses hommes à la base et tout le monde y adhère. Je fais partie des gens qui écoutent le Président. S’il me demande de laisser tomber je le fais. Par contre, il y a d’autres qui ne le feront jamais, il faut que les responsables sachent que devant l’intérêt du parti, l'on ne doit pas mettre ses ambitions en avant. Sans sacrifice, sans abnégation, sans dévouement, on ne peut pas avancer. Il faut, donc, que le président de la République agisse en restaurant la discipline dans le parti. Sinon, ce sera la catastrophe en 2012.

Wal fadjri : Pour en revenir à votre ville, comment expliquez-vous la perte de la mairie par la Coalition Sopi 2009 ?

Cora Fall : Je pense que nous sommes a moitié satisfait - pas totalement - dans la mesure où il y a eu beaucoup d'ambitions démesurées au niveau de la coalition Sopi 2009. Souvent, certains responsables ont mis en avant leurs propres intérêts avant même l'intérêt du parti et du secrétaire national du parti et c'est ce qu'il faut regretter. Mais, en ce qui concerne la ville, nous avons perdu un arrondissement, celui du Nord où habite d'ailleurs le maire sortant. Nous avons gagné l'Est et l'Ouest où j'étais candidat mais finalement je me suis retiré bien que j'avais beaucoup de conseillers qui pouvaient me supporter et j'avais l'espoir de bien passer. Là, j'ai voulu poser un acte de patriotisme et permettre à la coalition Sopi de passer au premier tour et éviter des tiraillements. Cela dit, nous avons perdu la ville mais s'il y avait un seul candidat pour notre coalition, on aurait eu plus de chance de passer. Mais avec les multiples candidatures (il y en avait quatre et les deux s'étaient finalement retirés, Ndlr)) alors que c'était déjà très difficile avec l'opposition. Ce qu'il faut noter, c'est qu'il y avait une coalition de la rupture qui avait de nombreux conseillers et, face à celle-là, on ne pouvait plus jouer, on n'avait plus de marge de manoeuvre. Donc entre Ndiawar Touré et Souaré, il fallait que quelqu'un cède.

Wal fadjri : Vous avez eu à retirer votre candidature à la mairie de Rufisque-Ouest, cela a-t-il impacté sur les résultats de votre camp ?

Cora Fall : Toutes les populations de Rufisque ont salué le geste, y compris les gens qui étaient contre moi. A la veille, nous nous sommes réunis pour qu'il n'y ait pas une multitude de candidatures face à l'opposition soudée et au finish il y avait un seul candidat. Moi, j'estime que le retrait de ma candidature a permis à mon parti de passer au premier tour et cela a été salué par la presse, les radios de Rufisque et les hommes politiques. Je pense que moralement, cela a été une satisfaction.

Wal fadjri : L'avez-vous fait de votre propre chef ou y a-t-il eu une injonction du président Wade ?

Cora Fall : Pas du tout ! C'est une question de conscience personnelle. Le Président ne s'est pas intéressé à cela. C'est plutôt au niveau de la ville que le président a demandé aux gens de trouver une solution pour l'intérêt du parti mais dans les arrondissements on n' avait pas ce problème. Compte tenu des responsabilités que j'ai eu à assumer, je me suis dit que ce n'était pas du nouveau pour moi et il était plus facile de laisser quelqu'un d'autre pour permettre au parti de passer librement. J'en avais discuté avec Baba Diop et d'autres personnes mais je peux dire que, fondamentalement, c'est compte tenu de la situation qui pouvait permettre à mon parti d'être battu ou d'avoir des difficultés que je me suis retiré.

Wal fadjri : Et comment analysez-vous votre votre débâcle à Rufisque-Nord ?

Cora Fall : A Rufisque-Nord, je crois que les gens se sont endormis. Je ne vois pas pourquoi nous avons perdu au Nord. Certainement, il y a eu des votes-sanctions, c'est-à-dire qu'il y a des gens qui ont mis leurs mains dedans. Je peux comprendre qu'on soit contre quelqu'un mais pas ressentir de la haine au point de vouloir qu'il soit battu jusqu'à se coaliser avec des gens pour le faire tomber et l'empêcher d'émerger. C'est ce qui s'est passé, en fait, chez nous avec Ndiawar Touré. Je sais qu'il y avait des gens qui ont voulu que Ndiawar passe au niveau du Nord mais si le parti était soudé avec les gens de Mbaye Jacques Diop, mes amis et ceux de Ndiawar, tous ceux-là réunis, on allait gagner. Comme je vous l'ai dit, dans ce parti-là, on ne cherche pas l'intérêt général. On cherche à régler un compte avec quelqu'un ou à faire tomber quelqu'un.

Wal fadjri : L'on dit que Ndiawar est votre ami. Dès lors, pourquoi ne lui avez-vous pas conseillé de se retirer pour l'intérêt de votre coalition ?

Cora Fall : Ndiawar est mon ami, mais une semaine avant le vote pour le choix du maire, je ne le voyais plus. Malgré mes multiples coups de fil, je ne suis pas parvenu à lui parler. J'entendais, seulement, les gens dire que Ndiawar est ici ou là en train de négocier alors que j'étais son véritable soutien. J'avoue que je n'ai pas, par la suite, compris ses agissements. Cependant, il faut reconnaître qu'au niveau de la Coalition Sopi, il y a eu un manque de cohésion et c'est ce qui a entraîné notre défaite devant une opposition soudée dès le premier tour. Et c'était évident ! On s'est trouvé avec des gens très ambitieux parce qu'au bout d'une semaine, Awa Diop (député libéral, Ndlr) et d'autres personnes ont demandé à ce que certains candidats se désistent. Ce qui a fait que Daouda Niane et Ngoné Ndoye se sont retirés mais il restait Ndiawar et Souaré qui maintenaient leur candidature et, à ce niveau, je pense qu'il y avait un règlement de comptes entre les deux. Ce qui a fait que personne n'a voulu se retirer et la conséquence est que le parti a perdu.

Wal fadjri : A votre avis, pourquoi Ndiawar Touré s'est entêté à être candidat ?

Cora Fall : D’abord, parce qu’il pensait qu’il avait l’appui du Président Wade, de Touba et de Tivaouane. Quelques jours avant les élections, j’étais parti chez lui et il venait de recevoir un appel de Serigne Bara et Me Wade lui avait demandé qu’il aille voir Mbaye Jacques Diop parce que cela faisait longtemps qu’ils ne se sont pas vus. Il m’a demandé mon avis et je lui ai dit : ‘Fais ce que tu veux, comme c’est Serigne Bara qui t’a demandé d’y aller, vas-y mais saches qu’il y aura des conséquences’. La preuve, le lendemain, toute la presse a dit qu’il est allé ramper chez Mbaye Jacques Diop. Ces genres d’humiliations, moi, je ne les aurais jamais acceptés.

Wal fadjri : Dans votre fief, il semble que le camp d'Awa Diop ne vous porte pas dans le cœur, est-ce à dire que votre entente n'est que de façade ?

Cora Fall : Awa Diop ne peut pas me mettre des bâtons dans les roues, dans la mesure où j'ai un grenier électoral à l'Ouest. J'y ai des parents, des amis, mon grand père est de Diokoul et c'est lui-même qui a donné le terrain du cimetière aux Diokoulois. Donc, je suis bien enraciné dans le milieu de l'Ouest. J'ai été maire là-bas et j'ai toujours gagné à Rufisque Ouest même quand j'étais au Parti socialiste. Le président de la République l'a reconnu. Quand il était à l'opposition, il a vu les résultats que j'ai apportés au niveau de l'électorat. C'est pourquoi il était venu chez moi, à Rufisque, à deux reprises. A l'époque, je n'étais même pas responsable à ce niveau mais il a vu que je menais des actions concrètes dans ma ville et j'avais l'estime de la jeunesse parce que j'étais le président du club des Saltigués. Il était venu avec Fara Ndiaye et il m'a dit qu’il voulait des jeunes comme moi à Rufisque et je lui ai dit que je pouvais pas parce que Abdou Diouf est mon ami et je ne pouvais pas le laisser. Et il m'a dit que Diouf n’est que Premier ministre et qu’on va l’enlever bientôt parce qu'il n'est pas d'accord avec Adrien Senghor. Je lui ai dit, ah bon ? J'ai poursuivi en lui disant que même s'il n'est que Premier ministre, on est dans le même parti, je ne vais pas le lâcher. Il est revenu une deuxième fois et il m'a dit : ‘bon écoute, maintenant si Diouf part, tu vas me soutenir, je lui ai dit ‘oui’’.

Wal fadjri : C'est ce qui explique votre transhumance au Pds ?

Cora Fall : Ce n'est pas une transhumance. En fait, c'est le respect de la parole donnée (...). Quelques années après, j'étais au Sénat et on s'est rencontré au Méridien avec les assises de la Santé qu'avait organisées Abdou Fall. Me voyant, il (le président Wade, Ndlr) m'a dit : ‘Cora, vous m'aviez promis de me soutenir si Diouf partait’. Après, il me demande, ‘Qu'est ce que tu veux ?’. Je lui ai dit : ‘rien Monsieur le Président, je vous avais promis de vous soutenir si Diouf partait maintenant qu'il est parti, je vais vous soutenir mais avec désintéressement. C'est pourquoi jusqu'à présent je n'ai rien imposé au Président et cela fait sept ans que je suis avec lui.

Wal fadjri : Il vous aurait promis un poste de Directeur mais jusque-là, rien encore. Qu'est-ce-que cela vous fait ?

Cora Fall : Le président m'avait promis un poste de président de conseil d'administration. Mais je lui avait fait comprendre que tout cela ne m'intéressait pas. Moi, je peux aller dans le cadre de mon travail au Conseil économique et social ou ailleurs qui cadre avec ma profession. J'ai dit que je suis encore actif et si je dois avoir un poste, il doit cadrer avec ma profession. Voilà ce que j'ai dit au Président devant Ablaye Faye (administrateur du Pds, Ndlr). C'est pour dire que je n'ai pas exigé de préalable pour aller au Pds ou un soutien au président Wade. Moi je ne suis pas comme certains, j'ai beaucoup de relations à Touba ; j'en ai à Tivaouane. Mon père était l'ami de feu Serigne Saliou Mbacké. A Tivaouane, Serigne Mansour Sy est un cousin mais je ne suis jamais allé demander à quelqu’un un soutien parce que j’estime qu’aller demander de soutiens ailleurs serait contraire à mes principes. Moi, je veux faire des choses avec la bonne foi, je ne cherche pas des intérêts sur ce que je fais. Maintenant, si Me Wade juge que Cora Fall doit avoir quelque chose, c’est à lui de voir et s’il ne le fait pas, il n'y a aucun problème.

Wal fadjri : Et votre ‘frère-ennemi’, Mbaye Jacques Diop, quelle est sa responsabilité dans tout ce qui s'est passé à Rufisque ?

Cora Fall : (Sans hésitation). Il a appuyé Mamaya. La preuve, le jour où Serigne Bara était venu, il est parti le voir avec Mamaya. Il est de la Coalition Sopi mais je ne sais pas s’il a réellement fait le travail pour que ladite Coalition gagne. Cela, je ne peux pas le dire. J’en doute.

Wal fadjri : Les Rufisquois semblent disqualifier les politiciens en portant leur choix sur la société civile ...

Cora Fall : (Il coupe). Les gens qui ont les commandes sont des politiciens. Mamaya est ami de Mbaye Jacques Diop et il a dit qu’il a fait la politique avec ce dernier. Cela dit, je salue l’émergence du bureau municipal, et je pense que cela apportera des changements dans cette ville. Je suis satisfait de la qualité du personnel qui vient d’horizons divers, et je souhaite qu’ils aillent ensemble dans la politique de développement. Moi au début je n’avais pas voté pour Ndiawar. Mais, quand je l’ai vu travailler sur des actions concrètes, j’ai répondu au conseil municipal et je l’ai soutenu. Il y a eu beaucoup d’actions concrètes de la part de Ndiawar Touré.

Wal fadjri : Vous indexez les militants mais, est-ce que ce n'est pas Wade le véritable responsable ?

Cora Fall : Non, je ne suis pas d’accord ! Quand on est au pouvoir, on est faible parce qu’on vous impute tous les problèmes. J’étais au Parti socialiste mais je comprend pourquoi Abdou Diouf est parti. Malgré tous les problèmes, si c’était un référendum, le pouvoir allait gagner. Nous sommes majoritaires sur le plan électoral. Nous n’avons pas connu une chute.

Wal fadjri : En vous proclamant majoritaire, vous ne comptabilisez, tout de même pas, les suffrages obtenus par Idrissa Seck dans les vôtres ?

Cora Fall : Il faut, bien sûr, y mettre les voix d’Idrissa Seck puisqu’il fait partie du Pds. Il est vrai que, à un moment donné, il avait eu des problèmes avec sa famille politique mais il la retrouvera bientôt. Il viendra. Seulement, il reste à respecter un cheminement. Idrissa ne peut pas quitter Wade, Me Wade ne peut pas lâcher Idy. Ce n’est pas possible, on ne lâche pas un fils !

Wal fadjri : Que pensez-vous des ambitions prêtées à Karim Wade de succéder à son père ?

Cora Fall : Très tôt, j’ai soutenu Karim comme neveu. Si je devais m’investir pour lui, je l’aurais fait.

Wal fadjri : Vous êtes donc de la Génération du concret ?

Cora Fall : Je ne suis pas de la génération du concret, je suis un Wadiste et, d’ailleurs, c’est Wade lui-même qui est venu me chercher. Aujourd’hui si j’avais à soutenir Karim, je ferais partie des oncles. Je ne parle pas de lui en tant que fils du président, je parle d’une manière démocratique. Il vient juste de commencer, il y a eu des erreurs et c’est normal, c’est humain mais d’ici peu on pourra corriger ses lacunes. Sans être de la génération du concret, j’apprécie que des jeunes comme lui se lèvent pour aller à la conquête du pouvoir.

Wal fadjri : Qui, selon vous, a le profil pour succéder à Me Wade au Pds ?

Cora Fall : Je ne pense pas que Wade cherche un successeur. Je ne le crois pas. Je pense, plutôt, que le président Wade peut encore servir son pays.



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