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Politique

Me MBAYE JACQUES DIOP : « Je suis le plénipotentiaire de Me Wade dans l’Ast »

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Me MBAYE JACQUES DIOP : « Je suis le plénipotentiaire de Me Wade dans l’Ast »

Nous l’avons trouvé, ce soir-là, à table, aux environs de 19 heures. Etait-ce le repas de midi que Me Mbaye-Jacques Diop prenait tardivement ou le dîner à l’heure militaire, on ne saurait le dire. Mais cet homme d’une riche carrière politique avait des choses à dire. Et beaucoup de choses d’ailleurs. A bâtons rompus, l’ancien président du Conseil de la République abordera les sujets les plus divers, notamment son compagnonnage avec Me Abdoulaye Wade, les bisbilles notées au sein de l’Alliance Sopi pour toujours, la dernière déclaration de Karim Wade, la gestion de Badara Mamaya Sène...Et pour la première fois, Me Mbaye-Jacques Diop confirme l’écriture de ses mémoires. Ce sera, selon lui, avant la fin de l’année. Entretien.

Me Mbaye-Jacques Diop, dernièrement les libéraux de Rufisque ont sorti une déclaration dans laquelle, ils réclament à la direction de leur parti plus de postes et de responsabilités. On ne vous a pas entendu dans ce débat, mais pensez-vous, comme eux, que Rufisque mérite plus de responsabilités ?

D’abord, je voudrais remercier votre journal « le Soleil », ce que je remarque, chaque jour, c’est la qualité de l’écriture. C’est l’un des rares organes où certainement, il y a de bons correcteurs, en même temps que de bons journalistes. Cela dit, je voudrais d’abord préciser que je ne suis pas un « libéral » d’idéologie. Et cela, le président Wade le sait. Je suis avec lui par la fusion de mon parti avec le Pds, autrement dit, je suis militant du Pds par fusion et non par adhésion. Et cela honore le Pds et son Secrétaire général. Parce qu’il n’y a pas que ceux qui ont créé le Pds avec Abdoulaye Wade en 1974 où à l’époque c’était un parti de doctrine travailliste. Depuis lors beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et ceux qui, comme moi, ont participé à l’Alternance en votant en 2000 pour Abdoulaye Wade et ceux qui sont venus après 2000 et qui n’étaient pas de la même chapelle politique que Me Wade, tous ont contribué à renforcer le Pds, à en faire un grand parti. Un parti qui gagne des élections, parce que ouvert, comme disait Senghor « au souffle poreux de la vie ».

Aujourd’hui, ce parti comporte différents segments et de sédimentations accumulées pendant plusieurs années, ce parti n’est pas seulement que « libéral ». Parce qu’il a accepté, en son sein, des hommes et des femmes d’obédiences diverses (d’anciens communistes, socialistes, conservateurs, religieux...), mais tous sont aujourd’hui avec le président Wade et concourent à faire en sorte qu’il puisse avoir un autre mandat en 2012. Je fais partie de ceux-là.

Donc quand vous me dites « les libéraux de Rufisque », je dis que je n’en fais pas partie. Je suis au Pds, le président Wade connaît ma sensibilité politique, nous en discutons souvent, en chahutant même quelque fois. Il me dit souvent : « Mbaye-Jacques toi tu es un social-libéral ou libéral-socialiste ». Mais concrètement, le parcours politique que j’ai à Rufisque, d’abord où je suis né et où j’ai enterré les miens tous du côté de ma mère, dont la plupart dorment à Thiawlène (le cimetière), les autres à Yenne. Je fais partie de ceux qui se sont battus pour que Rufisque ait une âme, pour qu’elle ait un devenir politique et pour qu’elle compte parmi les villes du Sénégal. Mais aussi pour que ses cadres soient connus et promus.

En 1996, quand il s’est agi au Ps de faire ce qu’on a appelé « l’Ouverture et la Rénovation », j’ai été le seul ou l’un des rares responsables politiques à faire appel à de jeunes cadres. C’est ainsi que j’ai recruté Ousseynou Faye qui est mon ancien boursier. J’en ai fait un conseiller municipal et un adjoint au maire de Rufisque-Est, El Hadj Ibrahima Sall (ancien ministre du Plan) dont les parents habitent le même quartier que moi et qui fut mon ancien boursier, j’en ai fait un adjoint au maire de Rufisque-Est et conseiller à Rufisque-ville. Thierno Youm, sportif bien connu, lui aussi, j’en ai fait un conseiller municipal de ville. Ngoné Ndoye, aujourd’hui sénatrice, c’est moi qui l’ai recrutée à la mairie de Rufisque en 1992, comme femme de charge. C’est moi qui lui ai mis le pied à l’étrier. C’est moi qui l’ai poussée semaine après semaine, mois après mois, année après année, jusqu’à en faire le maire de Rufisque-Est. La liste est longue. Badara Mamaya Sène, l’actuel maire, c’est moi qui l’ai porté à bout de bras de 1976 à nos jours. Seydou Diouf, un des plus grands parlementaires aujourd’hui, qui fait notre fierté, lui aussi c’est moi qui lui ai mis le pied à l’étrier. Yatma Fall, handicapé très jeune, mais garçon courageux, plein de volonté et qui a réussi grâce à sa détermination et au soutien que je lui ai apporté. Aujourd’hui, il est le rapporteur général du Conseil économique et social. Il en est de même qu’Omar Faye de Leeral Askan Wi que j’ai recruté à la mairie, sans oublier Abdoul Aziz Faye, Balla Dièye, Birane Seck, Oumy Ciss Diakhaté, Ndèye Niang, Fatou Thioune, Mbeugué Fall...Ils sont nombreux.

Tous ces jeunes cadres que vous venez de citer, pensez-vous qu’ils vous sont redevables de quelque chose ?

Je l’ai fait pour Rufisque, je l’ai fait pour mon pays. Je l’ai fait aussi par devoir. Cela m’importe peu qu’ils me soient redevables ou pas, parce que, encore une fois, aujourd’hui je m’honore, de pouvoir dire, sans être démenti par qui que ce soit, que de tous les hommes politiques en activité, je suis celui qui a fait plus pour sa ville et ses concitoyens : opposition, majorité, Bennoo, Ast. Tout cela pour vous dire que je me suis battu pour que Rufisque ait des promotions. Pour qu’aussi Rufisque s’embellisse. J’ai « pris ma part » comme disait André Gide dans La Porte Etroite. Le président Wade m’a honoré, en tant que fils de Rufisque, pour avoir fait de moi la troisième personnalité de l’Etat du Sénégal. Il l’a fait certes pour notre compagnonnage, mais il l’a fait aussi pour Rufisque. Parce que tout ce qui me touche rejaillit sur Rufisque, sans aucune vanité de ma part. Le président Amadou Toumani Touré, en 2006, à Bamako, lors de la réunion des Conseils économiques et sociaux de la Cen-Sad, à la cérémonie de clôture, quand je lui ai renouvelé notre gratitude au nom de mes collègues, il a commencé son discours par dire : « je voudrais remercier le président Mbaye-Jacques Diop dont le nom se confond à Rufisque, sa ville natale ». Hommage ne peut être plus grand. Je dis que je suis de ceux qui, non pas seulement par la parole, mais par l’action ont tenté de faire la promotion des cadres rufisquois et de la ville.

A Rufisque aussi, on constate toujours un réel malentendu au sein du Pds entre libéraux, ceux de la mouvance présidentielle comme vous. Pensez-vous que c’est la bonne voie quand on sait que le président Wade a toujours prôné l’unité des militants Pds authentiques ou qui sont venus par d’autres voies ?

Le président Wade, quand il est arrivé au pouvoir en 2000 et là, je fais un clin d’œil à Idrissa Seck, lui et le président Wade avaient compris qu’ils étaient arrivés au pouvoir certes, mais que pour durer dans le pouvoir, il fallait élargir les bases du Pds. En 2001, lors des élections législatives, Idrissa Seck (sur indication sûrement de Abdoulaye Wade) a tout fait pour « recruter » ça et là des leaders d’opinion et les grands responsables qui étaient au Parti socialiste. Si vous vous en souvenez, les listes de 2001 de la Coalition Sopi étaient des listes panachées entre d’anciens membres du Pds et d’anciens membres du Parti socialiste ou des porteurs de voix. Tout cela pour dire que cet élargissement des bases du Pds lui a permis de gagner majoritairement ces élections. En ce temps, j’avais mon parti, le Ppc. Je suis allé seul aux élections. Ma formation est arrivée 6ème sur les 25 partis et coalitions qui étaient en compétition. Et c’est mon parti qui m’a amené à l’Assemblée nationale, faut-il le rappeler ? C’est après cela que le président Wade et Idrissa Seck m’ont « courtisé » pour que je sois le premier parti présent à l’Assemblée nationale, à venir grossir les rangs du Pds par la fusion tenue au Cices. Cela s’est fait après un protocole d’accord et un congrès de fusion. C’est pour vous dire que quand un parti veut longtemps être au pouvoir, il doit certes satisfaire les besoins des populations, mais il doit aussi élargir ses bases pour rassembler le maximum de suffrages. C’est ce qu’a compris le président Wade.

Et de votre compagnonnage avec le président Wade, avez-vous été bien servi ?

Ce n’est pas en terme de « bien servi ou mal servi » qu’il faut analyser notre compagnonnage. Le président Wade m’a honoré, je l’en remercie. Je lui renouvelle ma gratitude, parce qu’il a fait de moi ce qu’aucun rufisquois, avant moi, n’avait eu en politique. Aucun rufisquois avant moi n’a été troisième personnalité de l’Etat du Sénégal, au point de vue rang protocolaire défini par une loi organique. Et l’institution qu’il m’avait confiée, au départ, était quelque chose de méconnu, mais j’en ai fait une institution crédible, valable et en même temps pertinente. Pour cela, je lui suis reconnaissant. Même s’il y a eu un malentendu entre nous, cela est derrière nous depuis longtemps. Nous nous sommes retrouvés pour être ensemble. Aujourd’hui, il m’a honoré encore, parce qu’il a fait de moi le président honoraire de l’institution que j’avais dirigée (il est nommé Président honoraire du Ces, ndlr). Et cela me donne aussi une visibilité à ses côtés, aux côtés de l’Etat et du parti. Cela me permet aussi de continuer mon action pour le développement de mon pays.

Vous êtes l’un des membres de l’Alliance Sopi pour toujours, récemment il est apparu un malentendu entre Mamadou Diop « Decroix » d’une part et Iba Der Thiam et vous ; est-ce que vous pouvez nous rappeler ce qui s’était réellement passé ?

Rien de grave, rien de méchant. Simplement quand des hommes vivent en communauté, il y a souvent des incompréhensions. Mais grâce à Dieu et grâce au président Abdoulaye Wade, nous pouvons dire que tout est rentré dans l’ordre. La paix est revenue.

Mais cette alliance ne souffre-t-elle pas du choc des ego quand on sait que chacun de vous est leader de parti et a capitalisé une certaine expérience en politique ?

Moi je suis à l’Alliance par la volonté du président Wade. Il m’a désigné comme étant celui qui doit représenter le Pds dans l’alliance. C’est un honneur qu’il m’a fait, autrement dit je suis son plénipotentiaire. Et pourtant, aujourd’hui, des milliers de cadres peuvent représenter le Pds en tous lieux et en toutes circonstances. Mais c’est moi que le président a choisi, je l’en remercie. Donc, nous ne devons pas avoir de problème d’ego. Le Pr Iba Der Thiam, lui aussi après moi, a fait la fusion de son parti avec le Pds. Son parti la Cdp Garab-Gui était à l’Assemblée avant 2001 par ses propres forces. Ainsi, nous sommes les deux seuls partis représentatifs qui avons accepté de fusionner avec le Pds. Il s’y ajoute qu’il est le coordonnateur de la Cap 21 depuis 10 ans. Il n’y a pas que nous trois seulement à l’Alliance, il y a aussi Djibo Kâ, Abdourahim Agne, Mbaye Diack, Mamour Cissé et d’autres. Ils sont nombreux les leaders de parti qui sont dans l’Alliance, sans compter la soixantaine de partis de la Cap 21.

Cela doit être difficile de diriger tous ces leaders de parti...

Bien sûr. C’est pourquoi j’ai dit qu’il y a eu des incompréhensions, parce qu’il y a le choc des formations idéologiques et en même temps le choc des tempéraments. On n’a pas le même parcours, on n’a pas le même cheminement et le même moule intellectuel, on n’a pas la même compréhension des choses. Mais c’est cela aussi une alliance. Aujourd’hui, on est en train de faire en sorte que nous soyons ensemble davantage pour atteindre notre objectif qui est de réélire le président Wade.

Ne vous arrive-t-il pas de contester parfois l’autorité de « Decroix » ?

Un coordonnateur a une signification. Il n’est pas un chef de patrouille scout encore moins un général d’armée. C’est un primus interpares, c’est un alter ego de tous les autres. Car il faut bien, dans une communauté, qu’il y ait une coordination quand on est ensemble. Dès lors, il ne peut y avoir de contestation.

Dernièrement, le ministre d’Etat Karim Wade a fait une déclaration en disant : « le pouvoir ne s’hérite pas il se mérite » ; pour vous cela met-il fin au débat sur les craintes d’une dévolution monarchique de l’Etat ou cela ouvre-t-il d’autres discussions ?

Karim Wade est mon neveu par l’âge et par le compagnonnage que j’ai avec son père. Je l’ai rencontré pour la première fois le 12 mars 2000 dans le salon de son père au Point E et ce soir là, il y avait Landing Savané, feu Abdou Latif Guèye, Abdoulaye Bathily, Maguette Thiam et Amath Dansokho. Il s’occupait activement de l’intendance du 2ème tour. Il m’a fait l’amitié filiale de venir me rendre visite à mon domicile. Je l’en remercie et je pense que cela montre qu’il partage nos valeurs. C’est tant mieux pour quelqu’un qui veut faire carrière en politique. Quand il est venu me rendre visite, je devais avoir à mes côtés le député Seydou Diouf, mais il était occupé ce jour-là à Rufisque. J’étais donc avec mon fils aîné Pape Madické Diop administrateur général de l’Ecole supérieure de commerce et mon neveu et homonyme Me Mbaye-Jacques Ndiaye, avocat à la Cour, pour dire que, eux deux sont de la même génération que Karim Wade. La déclaration qu’il vient de faire, je la comprends et je la confirme. Du reste, la seule voie que les Sénégalais comprennent pour donner à quelqu’un le pouvoir, c’est celle des urnes. Karim Wade le sait et nous tous nous le savons. Au demeurant, le président Wade l’a aussi répété et nous sommes en phase avec lui. Je rappelle que je suis né dans une commune dont j’ai été le maire pendant 18 ans et où l’on vote pour élire un maire depuis 1880. A Saint-Louis et à Gorée, on vote depuis 1872 et à Dakar depuis 1887. Donc, nous savons ce qu’est le suffrage universel. Là où le débat peut être considéré comme clos, c’est de réaffirmer qu’il n’y aura pas de dévolution héréditaire du pouvoir dans notre pays. Mais quiconque voudra devenir leader, devra passer par les urnes. Cela, Karim Wade l’a bien compris et c’est ce qu’il a confirmé, dans ses propos.

Au Sénégal, nous avons rencontré la colonisation française et nous avons essayé de nous mettre au diapason des nations, des démocraties avec des balbutiements de l’époque jusqu’en 1960 de Senghor jusqu’à Abdou Diouf et Abdoulaye Wade aujourd’hui, le Sénégal a toujours été un exemple de démocratie en Afrique noire. Seul pays à n’avoir jamais connu de coup d’Etat. Seul pays où la République a à la fois des fondements et un sens. Seul pays où les citoyens ont une langue en commun, même si ce n’est pas la langue maternelle de tous. Cela cimente la nation. Le Sérère, le Diola, le Khassonké tous parlent et comprennent le wolof. J’aime rappeler, pour avoir été témoin, de ce jour où à l’éclatement de la Fédération du Mali, le 19 août 1960 au Bureau politique de l’Ups 24 heures après où il fallait se mettre d’accord sur l’hymne, le drapeau et la devise du Sénégal que nous partageons avec le Mali (ironie de l’histoire) : un Peuple, un But, une Foi. C’est tous ces symboles qui nous unissent.

Vous pensez que ces symboles ne doivent, en aucune manière, être violés par aucun homme politique ou chef d’Etat à la tête du Sénégal ?

C’est sacré parce que nous les partageons. Ils nous unissent et personne ne doit nous désunir. Le Sénégal s’honore d’avoir été et d’être encore en Afrique noire une démocratie, c’est-à-dire un pays où les dirigeants sont élus au suffrage universel et où les citoyens sont égaux en droit. C’est pourquoi, je pense qu’il n’y a rien de nouveau dans ce qu’a dit Karim Wade. Car, c’est cela notre vécu quotidien. Il l’a simplement réaffirmé et rappelé. Le président Wade est arrivé au pouvoir en 2000 par les urnes. Avant lui, Abdou Diouf, même si en 1980 il a bénéficié de dispositions constitutionnelles particulières (article 35), mais après cela, il s’est présenté aux suffrages des Sénégalais de 1983 jusqu’à son départ du pouvoir en 2000. Idem pour Senghor qui, de 1951, député à l’Assemblée nationale française jusqu’en 1980, a toujours bénéficié du suffrage des Sénégalais. C’est ça le Sénégal.

Toujours en faisant un commentaire de cette déclaration quand il affirme que le pouvoir se mérite, peut-on dire que lui aussi il mérite d’être à la tête du Sénégal ?

C’est aux Sénégalais de dire cela. S’il le mérite, les Sénégalais se prononceront le jour où on leur demandera de voter pour Karim Wade, Samba Ndiaye, Demba Sow ou Jean Diatta, etc. Nous sommes le seul pays en Afrique noire à avoir eu un tel parcours, rien ne peut le modifier. Rien ne peut le changer. Nous demeurerons une démocratie avec une armée républicaine avec des hommes et des femmes politiques de valeur.

Présentement, Bennoo peine à désigner un candidat consensuel à la présidentielle de 2012 ; vous qui êtes de la mouvance présidentielle, quel commentaire faites-vous de cette situation de l’opposition ?

Aucun commentaire. Ce que les autres font ne me concerne pas. Ce qui me concerne moi, c’est que l’Alliance Sopi pour toujours soit le socle sur lequel nos ambitions se réaliseront pour que Me Wade soit réélu en 2012. Je ne suis pas de ceux qui jettent la pierre aux autres. Je suis de ceux qui construisent, de ceux qui unissent les Sénégalais dans la démocratie, dans la République et dans l’unité. J’ai pour credo notre devise : Un Peuple, Un But, Une Foi. Quand on est un seul peuple, quand on tend vers un même but animé par une même foi, on doit se garder de déconstruire.

Il peut paraître prématuré de faire le bilan du maire actuel de Rufisque, mais d’aucuns jugent qu’il est toujours entre deux avions ; est-ce la bonne voie que Mamaya a prise ?

(Il observe un temps d’arrêt). Je rappelle que Mamaya fait partie de mes cadets que j’ai aidés à émerger, je n’ai que de la sympathie pour lui. Toutefois, l’amour que j’ai pour cette ville qui m’a vu naître et les preuves d’amour que j’ai données à ma ville depuis près de cinquante ans font que j’ai un œil critique sur ce qui se passe à Rufisque. Je ne dois pas être complaisant avec ceux qui gèrent Rufisque. Parce que je leur ai légués un patrimoine que d’autres m’ont légués. Dans les années 1980, sous le régime socialiste, dont j’ai été un des acteurs, nous nous sommes battus pour la Décentralisation. Il y a un moment au Sénégal où les collectivités locales étaient régies par le Code de l’administration communale de 1964, réformé en 1984. Ce code était plus que draconien, avec une tutelle pesante. C’était inacceptable. Les maires de l’époque ont mis un terme à ce code. Ceux qui ont porté ce combat sont Daby Diagne (Louga), Abdoulaye Chimère Diaw (Saint-Louis), Thierno Birahim Ndao (Kaffrine), Mamadou Diop (Dakar), Robert Sagna (Ziguinchor), Abdoulaye Diack (Kaolack), Balla Moussa Daffé (Sédhiou) et moi-même. Nous avons porté le combat pour la Décentralisation au Sénégal, jusqu’à faire inscrire dans la Constitution sénégalaise le fameux article proclamant que : « les collectivités locales s’administrent librement par des conseils élus ».

Autrement dit, la fin de la tutelle. En 1996, quand nous votions les lois de la Décentralisation, devenues le Code des collectivités locales, j’étais le président de la commission des Lois à l’Assemblée nationale. Pendant 21 jours, nous nous sommes réunis avec de grands parlementaires comme Jean-Paul Dias, Iba Der Thiam, Samba Diouldé Thiam, Mbaba Guissé, Abdoulaye Niang, Daby Diagne, Mamadou Abass Bâ, Khaly Sèye, Sémou Pathé Guèye et d’autres pour adopter les textes sur la Décentralisation.

Les ministres, qui siégeaient à nos cotés pendant trois semaines, sont Khalifa Sall (chargé des Relations avec l’Assemblée), Souty Touré, ministre de la Décentralisation et le ministre du Budget. Si je parle de ces moments, c’est pour rappeler, entre autre, un des points importants que nous avions adopté à savoir : que le maire devait être à temps plein dans sa commune. Le maire de Paris ne fait que ça, idem pour les maires des grandes villes en France. C’est une tâche prenante et prégnante qui demande beaucoup de temps. La conséquence, c’est que nous avions obtenu que les maires soient rétribués pour se consacrer entièrement à leur ville. Je rappelle que nous avions une indemnité mensuelle de 56.000 Fcfa. Mais aujourd’hui, les maires de ville ont un million brut par mois. Les maires d’arrondissement 500.000 Fcfa brut. Cela a été notre combat. Mais c’est le président Wade qui l’a concrétisé. Dès lors, les maires doivent être à temps plein dans leur commune.

Mais ce n’est pas le cas aujourd’hui dans plusieurs collectivités locales...

Il est souhaitable que notre maire (Ndlr : Badara Mamaya Sène) qui est mon jeune frère ait conscience de cela. On ne peut pas diriger une ville comme Rufisque et s’absenter aussi longuement. On ne peut pas et on ne doit pas être à la tête d’une institution municipale comme Rufisque (380.000 habitants) et avoir une autre activité qui vous prenne plus de temps que celui que vous passez dans votre ville. C’est pourquoi je demande à Badara Mamaya Sène, en tant que son grand-frère, de revoir son agenda.

Pensez-vous qu’il peut sortir Rufisque de l’ornière ?

S’il revoit son emploi du temps, alors en ce moment, on verra s’il peut répondre aux attentes des populations de Rufisque et de nous-mêmes qui l’avons installé. Mais, pour le moment, il faut avoir un préjugé favorable. Il a voulu être maire, il a fait sa campagne contre la gestion du maire précédent, il faut qu’il fasse plus et mieux que le maire sortant. Mais il faut qu’il revoit son emploi du temps et qu’il se consacre davantage à Rufisque, avec toute la foi qui convient pour une telle mission. Je rappelle que je suis le seul maire à Rufisque à avoir fait plus de deux, trois voire quatre mandats. Avant moi et après moi sauf Maurice Guèye, personne n’a fait deux mandats. Dès lors, je me considère comme un élu dans le comportement, dans la manière de faire, dans la manière d’agir et je remercie les électeurs qui m’ont toujours témoignés de leur confiance. C’est dans cette même veine que je souhaite que Mamaya s’inscrive. Sinon.... « comprenne qui pourra », pour reprendre l’expression du poète.

Tout de même Maître, vous avez plus de 40 années d’expérience et de carrière politique et beaucoup de consécrations à Rufisque, au sommet de l’Etat et même au plan international. Ne vous arrive-t-il pas parfois l’idée de dire « j’en ai assez, j’arrête, je me consacre à autre chose » ?

En réalité depuis quelques années, je ne suis plus dans la politique active. Je ne me bats plus pour conserver des stations ou compétir pour des responsabilités. Depuis 2007, date où j’ai quitté le Craes, j’ai pris un peu de recul, je ne suis plus en compétition. Pour autant, je demeure au service de mon pays. Parce qu’un homme politique conséquent, qui a bénéficié longtemps du suffrage de ses concitoyens, est toujours en situation. Et cela toute sa vie, tant que Dieu lui donne la santé. Toujours en situation de pouvoir faire et de pouvoir dire et de pouvoir agir. Mais aujourd’hui, mon rôle est d’accompagner le président Wade et les jeunes, pour faire bénéficier à ces derniers de ma modeste expérience, de mon modeste savoir-faire pour que notre pays continue à être une démocratie. C’est pourquoi, je m’occupe beaucoup. Je suis un amoureux des Lettres et je suis entouré de livres. J’aime la lecture. Je travaille la nuit, je lis, je m’occupe. En ce moment, je suis en train de finir le livre d’Ousmane Camara (« Mémoires d’un juge africain, itinéraire d’un homme libre ») après avoir lu Le Dictionnaire amoureux de De Gaulle de Maurice Tauriac et Les 1001 livres qu’il faut avoir lus de Jean D’Ormesson

On peut s’attendre, comme Ousmane Camara, à des mémoires de Mbaye-Jacques Diop ?

Sidy Diop, journaliste au « Soleil », a écrit en 2007 un livre biographique sur moi intitulé « Mbaye-Jacques... ». Mais après avoir lu « Mémoires d’un juge africain » de mon ami et frère Ousmane Camara, j’ai l’intention, très bientôt, d’écrire « Mémoires d’un militant ».

Ce sera le titre ?

A peu près cela de prime abord. Mais il peut évoluer. « Mémoires d’un militant africain et itinéraire d’un homme politique sénégalais » en copiant un peu le titre de l’ouvrage d’Ousmane Camara. Une précision tout de même : dans ce livre d’Ousmane Camara à la page 54, pour l’histoire, je dis que le Pra-Sénégal est né le 20 septembre 1958 à Rufisque chez Amadou Gabin Guèye à Dangou et non au mois d’août quand nous recevions le Général de Gaulle à la Place Protêt devenue Place de l’Indépendance. L’Ups dont on parle ici était la section sénégalaise du Pra. Tout cela m’amène à penser que je dois, moi aussi, écrire mes mémoires parce que j’ai été acteur et témoin des événements de mon pays de 1954 à nos jours.

Cet ouvrage sur vos mémoires, vous comptez le publier ; quand est-ce ?

Quand on a été témoin et acteur d’évènements, on peut arriver rapidement à les restituer. Je ne suis pas journaliste, mais j’écris depuis longtemps. Ce sera donc avant la fin de l’année.



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