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Politique

Réelection de WADE dès le 1er tour : L'aggiornamento politique au Sénégal

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Réelection de WADE dès le 1er tour : L'aggiornamento politique au Sénégal
Le Conseil constitutionnel vient de signer l’acte final de l’élection présidentielle du 25 février 2007, en proclamant la victoire, dès le premier tour, du candidat Abdoulaye Wade. Ainsi, pendant que de nombreux ‘observateurs avertis’ posaient le deuxième tour comme un absolu, le candidat à sa propre succession passe avec un score qui avoisine celui qu’il avait obtenu le 19 mars 2000 au deuxième tour de l’élection présidentielle. Et beaucoup en restent encore bouche bée, deux semaines après le scrutin.

Les deux candidats qui viennent immédiatement dans le classement, loin derrière Wade il est vrai, obtiennent à leur tour des scores de loin supérieurs à leurs suivants directs, en dépit de nombreux reproches qui leur sont faits. Enfin, se retrouvent dans les profondeurs du classement, les leaders de la Gauche historique dont, pourtant, la contribution à l’avènement des opportunités démocratiques d’aujourd’hui, en termes de sacrifices, pendant les années de braises notamment, a été éminente à tous égards. Telles sont les vérités d’aujourd’hui. Vouloir fermer les yeux là-dessus ne produira rien de bon pour ceux qui s’aventureraient dans cette impasse.

Wade qui, du point de vue du statut et du cursus, boucle, comme le dit Hamidou Dia, un cycle historique ouvert par Blaise Diagne (premier député noir au palais Bourbon il y a bientôt un siècle) a certes de grandes équations à résoudre au cours de ce présent mandat sur ce terrain-là. Toutefois, de leur côté, tous les patriotes de ce pays, tous les démocrates qui ont tant soit peu compris les enjeux fondamentaux, à moyen et long terme, qui sont sortis de ces urnes le dimanche 25 février, doivent comprendre que le moment est venu d’un ajustement majeur et de révisions déchirantes. Le courage politique et l’humilité intellectuelle devraient être notre boussole et notre credo à cet égard. Une telle posture devrait commencer par la reconnaissance de la victoire indiscutable du candidat sortant plutôt qu’une fuite en avant, consistant à emprunter les voix classiques de la contestation post-électorale qui ne sont absolument pas productrices de nouveautés politiques au regard de ce qui s’est produit le 25 février 2007. La logique de la contestation des résultats, paradoxalement, peut apparaître moins comme l’expression d’un courage politique que comme un moyen de faire l’impasse sur les inévitables leçons à tirer de ce qui n’est rien d’autre qu’un cuisant revers politique pour les adversaires du président Wade et aussi, il faut bien le dire, une espèce de raclée pour une certaine frange de l’intelligentsia de notre pays.

Les résultats sortis des urnes, corrélés aux séquences marquantes du processus électoral en amont, et notamment la campagne électorale, permettent de comprendre que c’est bien ce peuple dont les uns et les autres ont sollicité les suffrages, qui a bel et bien voté et élu Abdoulaye Wade, et non des Djinn venus d’on ne sait où.

La bataille de la refonte du fichier électoral

La refonte du fichier électoral qui était une vieille revendication de certaines franges de l’opposition depuis 1992 a fait l’objet de vives controverses. Certains partis étaient pour que l’on prenne le fichier de 2000 comme base à enrichir à partir des inscriptions nouvelles. D’autres étaient pour le fichier de 2001 qui avait servi au scrutin référendaire et aux législatives de janvier 2001 et d’autres encore pour le fichier de 2002 qui avait servi aux élections locales. Et les lignes de partage ne recoupaient pas du tout la géographie politique de l’époque. L’on a vu en effet des partis de la majorité et d’autres de l’opposition se retrouver sur les mêmes positions. Je rappelle que le Parti démocratique sénégalais s’était clairement prononcé contre la refonte du fichier et proposait celui de 2002 comme base. C’était cohérent à son niveau puisqu’il avait globalement remporté les locales de 2002 sur la base de ce fichier. Le Ps dont l’expérience dans ce domaine est avérée, s’était pour sa part prononcé pour le choix du fichier de 2000 comme base, ce qui n’était pas fortuit non plus, car il voyait en ce fichier un moindre mal pour lui, car c’est le dernier fichier qui existait sous son magistère. And-Jëf, le Prc de Samba Diouldé Thiam et quelques autres partis se sont pour leur part battus pour la refonte. Le président de la République a tranché dans ce sens, contrairement, je le rappelle, aux positions de son parti.

Alors que certains adversaires de la refonte prédisaient moins de cinq cent mille (500 000) électeurs pour le nouveau fichier, les Sénégalais ont été près de cinq millions à s’inscrire. Ce qui aurait dû faire réfléchir. Mais, à la place de cette réflexion, l’on s’est cramponné aux schémas, prétendant que la raison de ce fort taux d’inscription s’expliquait principalement par le souci, pour nos concitoyens, de disposer plutôt de leur carte nationale d’identité. Le taux élevé de participation au scrutin du 25 février, 70 %, est venu à son tour démentir les schémas pré établis.

La bataille de l’audit du fichier électoral

L’audit a été mené par tous les acteurs réunis. La mise en ligne des sept critères de recherche retenus pour définir un électeur, a permis d’établir qu’aucun doublon n’existait dans le fichier électoral sur la base de ces sept critères. J’ai lu dans la presse des propos du genre : ‘L’envoyé spécial du quotidien britannique le Financial Times venu couvrir l’élection présidentielle du dimanche 25 février, a réussi à découvrir des magouilles qui ont été opérées par le camp présidentiel et qui ont permis au chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade d’être réélu dès le premier tour’. Le journaliste du Financial Times qui est basé à Lagos et qui est le correspondant permanent de son journal pour la zone Afrique de l’Ouest aurait rencontré Thierno Ousmane Sy qui se serait laissé aller à des confidences : ‘Nous (les tenants actuels du pouvoir) maîtrisions à ce point le fichier que nous avions fini par identifier tous les porteurs de voix du pays, tous ceux qui étaient susceptibles de nous faire gagner dans toutes les localités et dans toutes les catégories et couches sociales de la société. Ces porteurs de voix, nous les avons, à ce point, étudiés que nous connaissions tout d’eux. Leurs habitudes, leurs goûts, leurs forces et faiblesses’. ‘Sans le savoir, dit le journaliste, Thierno Ousmane Sy fait un aveu de taille. Il reconnaît ainsi que le camp du président Abdoulaye Wade a profité de sa position au pouvoir pour ainsi mieux maîtriser le fichier électoral et l’utiliser à sa guise. Où se trouve donc le principe d’égalité entre tous les candidats ?’

En réalité, on n’a pas besoin d’être un génie en informatique ni même un informaticien tout court, pour faire ce que, d’après ce correspondant de presse, Thierno Ousmane Sy a fait et qui n’a rien à voir, si ce n’est que cela, avec une quelconque magouille. Voici pourquoi : Le fichier électoral a été mis en ligne sur Internet par circonscription électorale, par lieu de vote et par bureau de vote. Et pour chaque bureau de vote, la liste complète de toutes les personnes qui doivent y voter. Chacun peut accéder à ces informations où qu’il se trouve dans le monde. Qu’y a-t-il de louche, à partir de ce moment, à extraire ce type d’informations sur support papier ou support magnétique pour ensuite, mener ses actions en direction des électeurs en question ? Toute personne avait cette latitude. La seule différence réside dans les moyens qui peuvent être infiniment inégaux pour produire un travail systématique et durable. Il en est de même de la connaissance du profil des électeurs. Lorsqu’un parti est implanté dans une localité, il peut remettre à ses responsables dans la localité considérée, la liste des électeurs tirée du fichier à partir d’Internet ; ceux-là connaissent les électeurs du bureau mieux que quiconque puisqu’ils habitent ensemble et sont souvent des parents, notamment dans les zones rurales. Cela n’a rien d’extraordinaire.

Enfin le rapport de la Commission nationale d’audit du fichier électoral a conclu son travail en ces termes : ‘Cependant, malgré tous les tests et vérification réalisés, rien ne permet d’établir que le fichier électoral n’est pas suffisamment fiable pour aller à la prochaine élection présidentielle’.

J’ai insisté sur ces éléments pour justement inviter ceux qui pourraient faire preuve de paresse intellectuelle à ne pas se satisfaire de ces explications par trop courtes à mon goût. Je ne minimise pas cependant les opportunités incomparables que le tenant du pouvoir aura toujours sur celui qui n’y est pas. Il en sera ainsi pour une longue période historique, ici comme ailleurs. Au demeurant, un tel avantage n’a pas empêché les peuples de renvoyer des élus dans l’opposition lorsqu’ils en avaient envie.

Non ! Il faut aller à l’essentiel. Combien de temps les protagonistes du candidat sortant ont perdu en conjectures sur le report ou pas des élections ? Plus le ministre de l’Intérieur posait des actes allant dans le sens du respect du calendrier électoral, plus les autres se convainquaient que le scrutin n’aurait pas lieu. Peut-on mettre cette imprudence sur le dos de quelqu’un d’autre ?

L’argent et les élections

L’on a évoqué le rôle de l’argent et des ndigël. En effet, l’on n’a jamais vu autant d’argent circuler au cours d’une campagne électorale au Sénégal. Tous les états-majors cossus s’y sont mis. On a pu dire que les trois premiers arrivés en tête ont été, dans l’ordre, les plus riches. Mais l’argent et le ndigël sont des invariants dans toute campagne électorale. Ceux qui ne peuvent en disposer devront aller s’occuper d’autres choses. Toutefois, il me semble qu’une réflexion soutenue et pointue devrait être menée pour voir comment résoudre l’épineuse question du financement des partis politiques ainsi que le plafonnement des dépenses électorales.

Le discours électoral

Certains des adversaires de Wade ont, dans bien des cas, produit des discours aux effets contraires à ceux recherchés. Dire aux Dakarois par exemple, que Wade n’a rien fait pour eux, ne relevait pas simplement du bon sens. Même les difficultés dans la mobilité urbaine ont été perçues par des usagers comme une raison supplémentaire de le laisser terminer ses chantiers. Posez la question aux chauffeurs de taxis ou de cars rapides. Se présenter dans une localité de l’intérieur du pays qui a étrenné au cours du septennat ou son poste de santé, et/ou son école, et/ou sa piste de production, qui a été électrifiée et/ou branchée au téléphone, et/ou a été branchée à l’eau courante à partir d’un forage nouveau ou ancien, et vouloir convaincre les habitants de cette localité de l’incurie du régime en place, relève pour le moins d’un manque de concentration.

Parler aux victimes des inondations dans les zones péri urbaines de la faillite du plan ‘Jaxaay’ alors que certaines d’entre elles avaient déjà pris possession de leurs logements, c’était courir le risque de s’isoler d’eux et de ceux en attente, qui pouvaient raisonnablement s’inquiéter des perspectives d’abandon de ce plan par un nouvel élu. Un tel discours, servi à satiété, a été simplement contre productif. Baser aussi son discours, comme l’a fait Landing Savané entre autres, sur ‘les mains propres’ c’était aussi, quelque part, ne pas s’apercevoir que les préoccupations des électeurs étaient ailleurs, chevillées principalement sur leurs urgences économiques et sociales. Il y a jusqu’aux candidats à l’émigration clandestine et plus généralement à toute cette jeunesse qui aspire à émigrer, qui ont pris la résolution de voter Wade qui leur annonçait les accords avec la France ou avec l’Espagne décidée à accroître les quotas pour l’émigration légale. Ceux qui leur parlaient de dénoncer ces accords n’ont-ils pas été perçus comme des menaces potentielles à leur projet d’émigrer ?

Et les producteurs ruraux ? Ceux qui, dans la vallée sont dans le riz ou la tomate ou l’oignon et qui, en dépit de certaines difficultés persistantes, n’ont plus qu’un mauvais souvenir de la période où il leur arrivait de jeter purement et simplement leur production à défaut de la brader, faute d’un mécanisme de régulation adéquat, pouvaient-ils avoir des raisons valables de voter contre Wade ? Que dire des effets, dans la conscience des paysans, de la bataille sans précédent menée contre les criquets pèlerins en 2004 ou encore de l’appui et de la sollicitude dont ils ont bénéficié lors des pluies précoces de janvier 2002 qui avaient décimé des milliers de tête de bétail ou encore de la pause pluviométrique d’août 2003 qui a vu l’Etat débourser plus de 20 milliards de francs Cfa pour tenter de juguler les effets de cette catastrophe naturelle ?

Dans chacun de ces événements, le président n’a pas dépêché ses ministres, mais s’est impliqué personnellement en rendant visite sur le terrain aux sinistrés et a su trouver, à côté des appuis matériels, les mots justes pour les consoler et les encourager. Ce sont là quelques aspects qu’il me paraissait bon de rappeler pour mettre en perspective le discours de campagne du candidat sortant ainsi que le poids des réalisations dans la victoire de la Coalition Sopi 2007.

La classe politique et ses stratèges devraient donc ‘descendre de cheval et disséquer un moineau’, c'est-à-dire faire preuve d’humilité pour aller apprendre auprès du peuple à mieux comprendre ses pulsions et à mieux identifier ses instances de légitimation. Elle s’est trop longtemps satisfaite de ses propres schémas et pré requis, considérant que le décalage entre les schémas et les formes de pensée des populations, ne sont que le fait du retard de ces dernières qui finiront avec le temps, par comprendre. Concernant plus précisément la Gauche, voilà cinquante ans que cela dure, si je prends pour référence le manifeste de 1957 du Pai. Porter réellement les valeurs de Gauche et son projet ne devrait-il pas signifier, au lendemain du 25 février 2007 une autre façon de faire la politique, un autre rapport au politique ?



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