Un groupe de pays réfléchit à un financement du développement des pays du tiers-monde, notamment les Objectifs du millénaire pour le développement (Omd) : il s'agit d'envisager une taxe sur les transactions financières. Et l'idée ne date pas d'hier, selon le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner. ‘Tout a commencé, il y a 25 ans, quand cette contribution au financement du développement a été proposée. Cette idée s'est renforcée en mai dernier, lors de la Conférence de Paris où la France a proposé que le Groupe de travail sur les financements innovants réfléchisse aussi à une contribution au développement qui porterait sur toutes les transactions financières mondiales’, a expliqué le patron du Quai d'Orsay lors de la réunion ministérielle qu'il a présidée dans les locaux de son ministère, en présence de dix ministres des Affaires étrangères, parmi lesquels Madické Niang, tout nouveau patron de la diplomatie sénégalaise.
Bernard Kouchner a voulu ainsi balayer des critiques qui estiment que c'est le retour de la taxe Tobin qui portait sur les taux de change : ‘On l'a appelé le retour de la taxe Tobin, or c'est une erreur. La taxe Tobin portait sur les taux de change, sur les transactions financières et elle avait pour but de stabiliser la finance internationale. Dans le cas présent, ce n'est pas du tout cela’.
Les polémiques levées, le groupe de travail qui réunit la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, le Japon, la Corée du Sud, l'Autriche, l'Espagne, la Belgique, la Norvège, le Chili, le Brésil et le Sénégal, peut plancher sur les modalités de taxation des transactions financières internationales. Mais ce groupe de travail, appelé ‘Task force’, va s'appuyer sur un groupe d'experts d'une dizaine de personnes pour faire des propositions. Mais déjà Bernard Kouchner a une idée sur ce qui devrait se faire. Il s'agira de prélever une taxe de ‘0,005 %, c'est-à-dire 5 centimes d'euros sur une transaction de 1 000 euros, mais c'est évidemment aux experts qui sont réunis ici de le définir’, soutient le chef de la diplomatie française. Ce qui engrangera une somme de plus de ‘30 milliards d'euros’, calcule-t-il.
Pourquoi 0,005 % et pas plus ? Réponse de Bernard Kouchner qui faisait face à la presse : ‘0,005 % c'est indolore, personne ne s'en aperçoit, cela passe par les banques et, à la fin, les banques reversent l'argent. A qui ? Selon quel projet, quelle transparence ? Tout cela doit être discuté dans le groupe d'Alberto (président du groupe d'experts, Ndlr). On peut donner d'autres exemples : on peut augmenter le taux, on peut décider que ce n'est pas assez’. Mais il faudra atteindre le rapport des experts. Avant de continuer : ‘Je vous donne simplement quelques chiffres, en vous précisant qu'avec un taux de 0,005 %, on peut lever plus de 30 milliards d'euros par an. Je peux vous dire que les chiffres de l'aide publique au développement ne représentent, en réalité, que 0,3 % du Pib des pays de l'Ocde. Le montant annuel des transactions sur les principales places financières, en 2009, s'élevait à 113 milliers de milliards de dollars pour le marché des produits dérivés. Ce chiffre a atteint 2 200 milliers de milliards, soit une multiplication par 7 depuis l'an 2000. Je vous signale aussi que par rapport à ce que j'ai proposé - c'est dérisoire - les 23 premières banques et fonds d'investissement de Wall Street devraient engranger 427 milliards de dollars cette année et distribuer 140 milliards de dollars de rémunération, c'est-à-dire plus que le montant de l'aide publique au développement mondial ; voilà la comparaison que l'on a pu faire’.
Déjà un bilan d'étape sera présenté en janvier 2010, un rapport provisoire en mars de la même année et le rapport définitif est attendu d'ici avril 2010 Pour ceux qui pensent que cette taxe sur les transactions financières internationales est une taxe de plus, Bernard Kouchner rétorque que ‘ce n'est pas une contribution insupportable. Si celle-ci était acceptée, et si d'autres propositions ne voient pas le jour, cela représenterait environ 30 milliards d'euros par an. Les chiffres sont spectaculaires et je vous les fournirais si vous le souhaitez. Le chiffre des transactions internationales est considérable. Il y a un côté spectaculaire à comparer ces chiffres aux chiffres nécessaires pour le développement. L'aide publique au développement doit demeurer et se renforcer de ces contributions qui seront étudiées par le groupe que vous avez devant vous et par neuf experts’, tente-t-il de convaincre. Et pour lever tout doute, le ministre français avoue que le groupe de travail et le groupe d'experts sont d'accord déjà sur ‘une méthode et sur un calendrier. Et plus encore, nous nous sommes mis d'accord sur une aspiration commune’, insiste-t-il. Mais il pose des conditions : ‘Il faut que ce soit simple, transparent, contrôlé. Il faut que ce soit une expertise à la fois morale, technique et financière, comme l'a été par exemple le Fonds mondial pour le traitement du Vih/Sida, de la tuberculose et de la malaria - et encore, ce n'est pas suffisant. Il faudrait que ce soit plus large’.
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