Inédit ce qui s’est passé, samedi, à Mékhé. Jamais de mémoire de Sénégalais, on n’avait vu près d’une trentaine de chefs religieux manifester dans la rue. Et pourtant, c’est bien ce spectacle auquel on a assisté dans cette localité où ces dignitaires religieux, las des promesses non tenues concernant le bitumage d’une route, ont bruyamment fait tonner leur colère. Une colère qui n’a pas épargné le Premier ministre, Macky Sall, à qui ils ont rappelé justement sa promesse.
Trente huit chefs religieux ou leurs représentants, des dizaines et des dizaines d’élus de douze communautés rurales des départements de Tivaouane et Bambey, aux côtés de leurs collègues de toutes les chapelles politiques de trois communes de ces départements, telle est l’imposante tête de file de l’impressionnante procession d’au moins trois mille personnes de tous les âges. Arborant pour la plupart des brassards rouges, ils ont battu le macadam, samedi, en fin de matinée à Mékhé (département de Tivaouane). Un spectacle inhabituel pour cette localité qui sert de pont entre les régions de Louga, Thiès, Diourbel et Fatick.
Partis pour la plupart du village de Ndombolokhe, à trois kilomètres au Sud, ces manifestants ont fait le spectacle une heure durant sur la principale rue qui donne au centre-ville, avant d’occuper La Nationale II pendant une bonne trentaine de minutes, obligeant ainsi les usagers de cet axe principal vers le nord à passer ailleurs. Pas de casse, encore moins de violence physique sur autrui, au cours de cette demi-heure d’occupation illégale de la voie publique. Le moment a plutôt servi aux manifestants à scander, dans une colère vive, des slogans de mécontentement à l’endroit du Premier ministre Macky Sall et au président du Comité d’initiative pour le bitumage de la route Bambey-Babagarage-Mékhé, Serigne Abdou Karim Kane, par ailleurs président de la communauté rurale de Koul, à expliquer le ras-le-bol des populations au président du groupe parlementaire libéral, Doudou Wade, venu de Dakar spécialement pour assister à la marche de protestation. Ce tronçon de route en latérite entre Bambey et Mékhé d’une longueur de 50km hante le sommeil des populations depuis... 1939. Bien des promesses ont été faites pour son bitumage et la dernière qu’on retient le plus dans le terroir est celle de l’ex-Président Diouf, au cours d’une campagne électorale, pendant laquelle il n’a pu se rendre dans l’important foyer religieux de Touba Kane (communauté rurale de Koul), à cause de l’impraticabilité de la route Bambey-Mékhé. Il a fallu que les autorités décident du bitumage du tronçon Fatick-Bambey, pour un coût de 8 milliards pour que les revendications naissent à nouveau dans l’esprit des populations soutenues par leurs élus et les chefs religieux des douze communautés rurales de la contrée. «On ne va pas arrêter de manifester, tant que le gouvernement ne décide pas de continuer le bitumage du tronçon Bambey-Babagarage-Mékhé ; et plus, celui qui n’aura pas comme priorité cette route ne pourra pas compter sur nos cartes pendant les élections», a dit Serigne Abdou Karim Kane à Doudou Wade, avant de révéler devant la presse l’existence d’un plan d’actions à dérouler jusqu’à satisfaction. Dans ce plan, il est question d’une correspondance au président de la République pour de plus amples informations, le projet d’une marche nationale, la sanction envisagée de tous les députés du département de Tivaoune, pendant les futures élections, etc. Séance tenante, et devant les mots désagréables à l’endroit de Macky Sall qualifié de «Premier ministre régionaliste», Doudou Wade a révélé que les membres du Comité d’initiative seront reçus dans les plus brefs délais par le chef du gouvernement. Ce sera peut-être la perspective du début de la fin du calvaire des populations intéressées par le bitumage du tronçon Bambey-Babagarage-Mékhé.
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