EXCLUSIF : Quand Cheikh Tidiane Cissé parle de son héritage spirituel

Voulez-vous vous présenter ?

CHeilkh Ahmed Tidiane CISSE : Suis-je en droit de parler de moi.

Dites au public qui vous êtes et quel est votre parcours ?

Je suis né à Médina BAYE le 22 septembre 1955 de Serigne Aliou CISSE (NDLR : Premier disciple et calife de Baye NIASS, premier Imam de la mosquée de Médina Baye) et Fatimatou Zahara NIASS (NDLR : Fille aînée de Baye NIASS). J’ai entamé l’école coranique en 1962, mémorisé et récité le Coran en 1968 devant mon grand-père, Baye NIASS. Ce dernier m’a alors demandé de rester dans le Dahra (école) pour assister le maître d’enseignement coranique de l’époque. Deux ans et demi plus tard en 1971, il demanda à mon père Serigne Aliou CISSE de prendre en charge mon perfectionnement, et ce jusqu‘en 1973. Toujours en 1973, Baye me récupéra, et pendant un peu plus de 3 (trois mois), poursuivit ce perfectionnement. Je suis la dernière personne que Baye a formé personnellement. Après moi, Baye n’a encadré personne. Ensuite il m’envoya au Caire pour intégrer le Collège d’Al Azhar. A la suite du test d’entrée, je fus intégré en classe préparatoire au Brevet. Je réussis brillamment mon brevet en me classant major. Baye en fut tellement fier qu’il en informa Imam qui se trouvait en France pour des soins. Il lui dit ceci « Cheikh m’a écrit pour me dire qu’il a réussi à son brevet et qu’il est sorti premier. Voilà la preuve que la formation de Médina Baye est de très haute facture. Les gens doivent comprendre qu’ils n’ont pas besoin d’aller ailleurs pour s’initier ».

Vous n’avez donc pas été vous former en Mauritanie ?

Je ne me suis jamais rendu en Mauritanie pour des études. J’ai étudié à Médina BAYE. C’est en 1977 que j’ai eu mon baccalauréat, en me classant cinquième, toujours à Al Azhar. En 1981, j’obtenais ma licence à la faculté de théologie islamique de l’Université d’Al Azhar. De retour au Sénégal, je poursuivis, avec Imam, l’œuvre de nos grand-père et père, à savoir particper au développement de l’islam. J’accompagnais Imam Assane partout et partageais toutes ses initiatives. Je fis une petite parenthèse en 1985 pour aller apprendre l’Anglais, aux Etats-Unis, pendant six mois. Nous faisions tout ensemble. C’est ainsi que lorsque le Président Abdoulaye décida de confier à la famille le Pèlerinage à la Mecque, c’est moi qu’Imam désigna pour cette charge. Nous avions une expérience de 10 (dix) ans dans le convoyage de pèlerins à la Mecque. Nous le faisions pour aider les pèlerins sénégalais. C’est notre frère Seydina qui se chargeait de l’encadrement à la Mecque, le peu de bénéfices, que nous réalisions, servait alors à prendre en charge ses frais. Je fus nommé, donc, Commissaire au Pèlerinage, en 2001. L’année suivante, Thierno Ka fut désigné. Je poursuivais mes tâches auprès d’Imam, quand en 2006, le président me reçut et me demanda de revenir lui donner un coup de main. Sans que je ne l’ai sollicité, Souleymane Ndéné NDIAYE (NDLR : Directeur de cabinet du Président de la République) m’informa que le Président avait décidé de me nommer Ambassadeur dans son cabinet. En dehors de mes activités religieuses, je suis opérateur économique. J’ai investi dans le transport et l’assainissement. J’avais constaté que lorsque les fosses septiques étaient remplies, à Médina Baye, les populations avaient des difficultés à trouver des vidangeurs. Cela m’avait fâché au point que j’acquis 2 camions- vidanges de fosses septiques. C’est ce que je peux dire de moi, jusqu’à la disparition physique d’Imam. J’ajouterais ceci. Dans son testament, Baye avait dit « Lorsque j’aurai quitté cette terre et que je vous aurai confié à Dieu, je souhaite que Serigne Aliou CISSE, mon unique disciple, mon fils, celui qui m’a le plus obéi et servi, le guide spirituel de mes enfants et de mes disciples : soit mon khalife sur cette terre. Je souhaite que mes enfants se comportent avec lui comme ils le font avec moi. Au pire, je souhaite qu’ils se comportent avec lui comme ils le font, présentement. A Serigne Aliou, je recommande de toujours se concerter avec eux, d’avoir de l’égard pour eux. » Plus loin, dans le testament, il dit « je souhaite que vous poursuiviez l’achèvement de la Mosquée… De même, je confirme que l’Imamat de la mosquée revient à Serigne Aliou et sa famille. Après Lui, la charge devra échoir à Assane. Mais après Assane « Plaise à Dieu celui qui lui succèdera ». « Plaise à ALLAH celui qui lui succèdera » non sans avoir précisé que l’imamat revient à la famille de Serigne Aliou. Donc l’imamat reste dans la famille.

« Après Assane, Plaise à ALLAH son successeur », néanmoins avez-vous été surpris par votre nomination ? Vous en étiez-vous déjà entretenu avec Imam de cela ? Vous avait-il préparé à l’imamat ?

Du tout ! Je ne pouvais pas parler de sa succession avec lui. Cela aurait signifié que je souhaitais sa disparition, alors que j’aurais aimé qu’Imam vive au moins 100 (cent) ans pour poursuivre sa mission. Il avait son aura, son érudition, sa chance, son prestige, son mérite et cela ne m’empêchait pas d’avoir ce qui me revenait. Je ne m’attendais pas du tout à sa disparition. Cette disparition est la volonté divine. Baye avait recommandé que la succession de l’imamat se fasse dans la famille Cissé. Donc, après Assane l’imamat reste dans la famille de Serigen Aliou CISSE.

Vous êtes l’une des dernières personnes à l’avoir vu. Quelles ont été ses recommandations, ses dernières volontés ?

« La faucheuse ne prévient pas ». Sa mort a été une surprise pour lui comme pour nous. Il m’avait bien entendu fait part de se ses souhaits en cas disparition, mais c’était lorsqu’il était en bonne santé. Il me disait « si tu me survis, je souhaite que tu fasses pour moi telle et telle chose. Mais cela relève du secret. Toutes ses vœux étaient relatifs aux recommandations d’ALLAH. Ce ne sont pas des choses à révéler. Sa disparition nous a tous surpris, lui y compris. Tout s’est passé en moins de deux minutes. Ce qui est sûr c’est que j’étais le seul parent présent au moment de sa disparition. Cela s’est passé sereinement, en douceur.

Imam conduisait de nombreuses initiatives dont l’Institut islamique, la Clinique, l’Université, la Radio Al FAYDA, etc. Comment comptez-vous gérer tout cela avec l’Imamat ?

Nous ne pouvons que poursuivre son œuvre, ses projets, ses initiatives. Nous travaillions ensemble sur tout cela, nous poursuivrons le travail. C’est pour cela que, chaque être humain souhaite avoir un successeur, un héritier, un parent. Si ce successeur est un bon parent, un bon héritier, il s’attèlera à réaliser vos vœux. De son vivant nous travaillions ensemble. La perpétuation de son œuvre est une obligation. Le respect de sa mémoire appelle que nous poursuivions son œuvre. De son vivant nous travaillions en parfaite cohésion.

Imam avait une équipe, une sorte de cabinet, quel message lui adressez-vous ?

Ce que je viens tout juste de dire : J’appelle cette équipe à poursuivre à mes côtés, l’œuvre du disparu. Que toutes ses personnes, ses collaborateurs viennent travailler à l’atteinte de ses objectifs.