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Habib Demba Fall, Le Soleil : «Week-end magazine mérite de figurer dans l’espace médiatique»

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Habib Demba Fall, Le Soleil : «Week-end magazine mérite de figurer dans l’espace médiatique»

En présentant vendredi 21 juin le livre du chroniqueur Mamadou Thiam, «Chroniques politiques sénégalaises : il était une fois… Abdoulaye Wade », le journaliste Habib Demba Fall, a déploré la disparition de «Week-end magazine». M. Fall ne comprend pas comment un si bon titre peut disparaître du jour au lendemain.  Habib Demba fait aussi état du fantasme médiatique qu’incarne Abdoulaye Wade, le communicant politique, au point d’assujettir certains médias à son image. Il se demande si Macky Sall saura user des médias comme son ex-mentor, à fortiori en gérer les effets. Entrevue.

En présentant le livre de Mamadou Thiam «Chroniques politiques sénégalaises : il était une fois… Abdoulaye Wade», vous dites, en passant, avoir regretté la disparition de «Week-end magazine». Pourquoi ?

D’abord ce n’est pas par plat corporatisme que j’ai regretté la disparition de « Week-end magazine ». Ce journal est un support quand même qui s’était imposé, en tout cas, dans son créneau magazine, et qui donnait rendez-vous, tous les week-ends, comme son nom l’indique, au public, avec à sa une, une offre éditoriale qui forgeait son identité, à la fois graphique et rédactionnelle : c’était des révélations, des enquêtes, des interviews-vérité, des investigations, tout en faisant dans ce qu’on appelle le genre people qui ne signifie pas un sous-journalisme. La deuxième chose, c’est que ce journal allie ses «préoccupations populaires» dans la demande, à des préoccupations plus élitistes : chroniques, analyses. Donc, un journal qui a pu produire une trentaine de chroniques de qualité, en près de 4 ans, sur Wade, et donner du contenu pour un livre, a sa place dans le champ médiatique. Ça, c’est un paradoxe. Je précise que les chroniques qui font l’objet du livre de Mamadou Thiam sont un tri.  C’est arbitraire, mais ça vaut son pesant d’or. Il y a d’autres chroniques sur d’autres thématiques publiées dans ce journal. L’autre élément qui peut justifier parfois la suspension d’un journal, c’est le coût de l’impression. On a eu au Sénégal des journaux qui sont bons,- nous-mêmes, au quotidien  « le Soleil »-, on a  eu un hebdo salué par tout le monde comme un journal de qualité, mais qui a disparu parce que nous avions des difficultés à payer l’imprimeur : 5 millions par numéro, par semaine, c’était très onéreux comme coût.

 

«Week-end est un titre fort qui ne peut pas disparaître du jour au lendemain du champ médiatique. C’est un patrimoine».

 

Il faut donc que renaisse ce journal ?

Je lance un appel, c’est même un plaidoyer que je fais, pour que dans le champ médiatique sénégalais, fleurissent des supports de qualité parce que, forcément, c’est la sélection naturelle, fondée sur l’influence, les contenus éditoriaux, l’originalité du graphisme, l’iconographie qui vont être des paramètres pour la survie des journaux. Mais bien sûr, un journal qui n’est pas rentable, effectivement les promoteurs, ne sont pas des philanthropes, ils arrêtent. Mais si le promoteur de «Week-end magazine» a les moyens de trouver une régie publicitaire performante, trouver même des repreneurs, des partenaires, je pense que « Week-end » est un titre fort qui ne peut pas disparaître du jour au lendemain du champ médiatique. C’est un patrimoine.

 

«Il faut concilier les innovations éditoriales à la demande économique».

 

Avez-vous connaissance des raisons évoquées par le promoteur pour expliquer la suspension de « Week-end magazine» ?

J’ai pris des précautions en ne faisant pas une incursion dans le champ économique, parce que cela relève de sa comptabilité (Madiambal Diagne, le promoteur). Effectivement, quelle que soit la qualité du support au plan graphique,  éditorial, ce support  est appelé à être rentabilisé. Maintenant, ce que moi je lui aurais suggéré (en tant que, je ne dirai pas manager des médias, mais en tout cas, quelqu’un qui a eu à occuper des responsabilités dans des sphères de décision d’un journal), c’est de faire un diagnostic pour voir pourquoi ça n’a pas marché. Est-ce que ce  journal a eu la politique de promotion adéquate pour lui permettre de pénétrer le marché et d’être un support d’influence ? Est-ce que ce journal a laissé une large place à l‘entreprise, aux décideurs, à ceux  qui prennent de la publicité ? Et ce que ce journal a montré qu’il est un support crédible ? Est-ce que le penchant trop populaire ne nous coûte pas le sérieux qui aurait pu servir de plateforme à des annonces classiques ? En tout état de cause, je pense qu’il faut concilier les innovations éditoriales à la demande économique. Ça c’est une piste. L’autre piste, c’est la gestion interne, sa cuisine interne. Il lui appartient de visiter sa comptabilité pour voir : est-ce que l’investissement économique a été à la mesure de l’investissement humain ? Et est- ce que la  tenue des comptes et  le plan de développement ont  été à la hauteur des prémisses qu’on a pu voir et qui ont été très probants pendant un, deux ou trois ans ? Ça, c’est un diagnostic à faire.

Ce magazine a donc sa place dans le paysage médiatique sénégalais… 

Si de manière empirique, je me limite à l’exposition médiatique que ce journal avait eu dans les kiosques et la pénétration dans les foyers, je dirais que ce journal mérite de figurer dans l’espace médiatique. Mais aucune œuvre humaine n’est parfaite. Si la formule est très populaire, mais pas très influente, il faut adapter cette formule pour que l’économique suive. Un produit peut être beau, mais il faut qu’il soit rentable aussi. De la même manière, un produit peut être beau et ne pas intéresser les décideurs. Or, c’est eux qui ont le cordon de la bourse, c’est eux qui ont l’entreprise, et ceux qui ont l’entreprise, ils ont leurs sondages, leurs canaux d’appréciation qui ne sont pas forcément des canaux académiques. Ensuite, il y a de nouvelles demandes. Mais sur ce plan, «Week-end» s’y est adapté : c’est l’information people, les gens… Il faut bien analyser cette nouvelle demande.

« Après la chute de Wade, il y a inévitablement une recomposition médiatique»

Peut-on faire un lien entre la disparition de ce magazine et la chute du régime de Wade ?

Je ne pousserai pas l’audace à ce niveau. Mais je dirai après la chute de Wade, il y a inévitablement une recomposition médiatique qui n’épousera pas forcément les contours de la recomposition politique, mais qui appellera la presse à s’adapter à une nouvelle demande qui, forcément, ne sera pas drivée, comme on le dit, médiatiquement par Wade. Il faut trouver d’autres sujets porteurs. Wade, opposant, vendait. A un certain moment, Djibo l’avait bousculé. Il a repris le collier en sortant du gouvernement de Diouf et depuis, il nous tient en haleine depuis 2000, en mal ou en bien. Mais est-ce que Macky Sall est un objet de fantasme médiatique, un objet même d’exagération, d’analyse ? Ça, c’est une question fondamentale. Donc dans le cadre de cette recomposition médiatique effectivement, certains danseurs pourraient changer de pied pour ne pas sortir du tempo. Et entre temps, le rendez-vous avec  les lecteurs continue. Il faut sortir. Est-ce qu’aujourd’hui, il faut parler de Wade même en mal, dans l’après-pouvoir, peut durer ? Je pense que Wade veut tout le temps occuper le champ médiatique. Toujours est-il qu’il y a les brebis autour de lui qui reçoivent. On va même dans la banalité médiatique, chercher un homme médiatiquement extraordinaire. - «Il a reçu des militants» «ils étaient habillés en...», etc. C’est banal. Mais c’est du Wade. Quand on  appelle Wade, ça fait vendre. Est-ce que Macky Sall a ce rapport aux médias ? Est-ce qu’il parle tous les jours ? Est-ce qu’il se prononce sur tout et rien ?

 

«Si la presse ne trouve pas une alternative à ce Wade, elle sera toujours obligée d’aller chercher  son fantôme pour parler de lui, mais en mal».

 

Vous pensez donc que Macky Sall,  très peu loquace, ne fera pas trop rêver la presse ?

Est-ce que Macky Sall a le sens de la formule qui lui permet de faire du buzz  comme on le dit aujourd’hui? Est-ce qu’aussi il a cette carapace qui lui permet non seulement de faire le buzz mais de résister  médiatiquement à son tout communication ou à sa trop communication ? Ça, c’est un problème. Et là, entre en jeu le pedigree de la personne, son rapport aux médias. Macky n’a pas les mêmes rapports aux  médias que Wade qui a fait 26 ans d’opposition, qui a  connu le parti unique, le journal unique, qui a cherché des ressorts de communication à travers le journal Takussan-Sopi. Aujourd’hui, Macky Sall a le plateau diversifié autour de lui mais est-ce qu’il sait en user autant que Wade et même en abuser ? L’autre chose, c’est une question de tempérament. Est- ce que Macky Sall a le tempérament de quelqu’un qui va à la casse, une sorte de casse-pipe ? Le troisième niveau, c’est le génie des uns et des autres. Wade n’est pas un communicateur dans le sens académique mais, c’est un bon communicant politique, à travers sa pratique, sa personnalité, son vécu. C’est un peu ça. Si la presse ne trouve pas une alternative à ce Wade (déchu le 25 mars 2012), elle sera toujours obligée d’aller chercher  son fantôme pour parler de lui, mais en mal.

PROPOS RECUEILLIS PAR FREDERIC ATAYODI



11 Commentaires

  1. Auteur

    Qotidien

    En Juin, 2012 (23:50 PM)
    Un des journalistes les plus brillant de l’Afrique ; Sa plume est unique au Soleil
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    • Auteur

      Reply_author

      En Juin, 2023 (17:12 PM)
      mane noumay déf bokou ma ci fonctionnaire ni ci privé bi ataya sakh légui blém la 
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    • Auteur

      Diaz

      En Juin, 2023 (17:52 PM)
      370 CFA/ Heures pour s'acheter des cacahuètes!!! Pour un employé au smig qui travaille 250 heures le mois cela représente 55.000 CFA. Si on considère que la plupart du temps les employés sont mieux payés que ceux du public alors allez imaginer le Smig dans le public. Et pourtant des DG et ministres sont payés à prix d'or dans ce même pays. J'ai toujours soutenu que le système économique du Sénégal est comme un homme qui marche la tête par terre et les pieds en l'air. 
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    • Auteur

      Reply_author

      En Juillet, 2023 (15:16 PM)
      Meme si c des clopinettes, c deja pas mal.
      Dommage que ce soit applique sur le salaire de base et non sur le brut social.... Mais bon on va pas cracher dessus
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  2. Auteur

    L"homme

    En Juin, 2012 (00:29 AM)
    Je suis d'accord avec vous monsieur. Le grand Habib est bon
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    Auteur

    Nyc

    En Juin, 2012 (03:19 AM)
    le meilleur journaliste de sa generation.... tres humble... un grand intellectuel..... bravo Habib
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    Auteur

    Moisaa

    En Juin, 2012 (04:35 AM)
    Mais comment peut-ont présenter un livre et ignorer le nom de l'auteur? l'auteur du livre c'est Mamadou Thiam et non mamadou diop. comment le journ aliste ainsi que la rédaction du site lesenegalais.pasnet peuvent-il laisser passer cette énormité?

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    Auteur

    Un Ami

    En Juin, 2012 (08:41 AM)
    Habib est naturellement poli , intellectuellement ouvert et rigoureux. Je l'ai connu par l'intermediare d'un Ami Daouda Mbaye quand tout jeunes , pikinois ,on marchait sur la route de Medina GOUNASS pour nous rendre au lycee Limamoulaye. Si mes souvenirs sont bons il etait d'une ou deux annees notre ancien mais etait d'une humilite frappante, le ton toujours mesure et la courtoisie certainement acquise d'une education solide fondee sur des valeurs de respect de l'autre et du don de soi.



    j'ai de l'estime et du respect pour toi. Le metier que j'exerce ne me permet pas de decliner mon identite sur ce forum mais je vous saurai gre si vous me donniez ou votre numero de telephone ou votre adresse email. excuse moi je te vouvoie alors que je ne devrais pas. MERCI
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    Auteur

    Deug

    En Juin, 2012 (08:58 AM)
    Le meilleur journaliste de sa génération

    bonne continuation
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    Auteur

    Djiguénou Thiam

    En Juin, 2012 (11:17 AM)
    Je voudrai juste apporter Deux rectificatifs :

    1) L'auteur du du livre "Chroniques politiques sénégalaises: il était une fois... Abdoulaye Wade" c'est bien Mamadou THIAM et non Mamadou DIOP comme mentionné dans l'artiicle.

    2) La séance de dédicae à laquelle M. Habib Demba avait fait une intervention c'est plutot le vendredi 22 Juin et non le 21.



    Félicitations, félicitations encore THIAM pour cet ouvrage. Thia kaw thia kanam!!!



    Sagissant de Week end Magazine je suis tout à fait d'accord avec M. Fall, c'est vraiment dommage qu'un aussi bon magazine disparaisse comme ça du paysage médiatique sénégalais.

    Vivement que Week end revienne dans nos kiosque.

    Mes encouragements à son brillant rédacteur en chef M. Babacar DIOP et à toute l'équipe!
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    Auteur

    Sarr Obeye

    En Juin, 2012 (12:01 PM)
    Mr HABIB DEMBA FALL est l'un des meilleurs journaliste du senegal voir même l’Afrique je l'ai toujours connu avec son sérieux et sa modestie bonne continuation
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    Auteur

    Mo

    En Juin, 2012 (12:29 PM)
    Habib est un très grand journaliste. L'un des meilleurs de sa génération. Il est très poli et humble. Lorsqu’il était le Directeur des rédactions du quotidien national le soleil, il avait bien positionné ce journal dans l'espace médiatique sénégalais. Son caractère calme et posé cache une très grande intelligence.



    Bon vent
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    Auteur

    Kbu

    En Juin, 2012 (13:49 PM)
    @ Un Ami

    Habib est très modeste, je ne sais ps de quel Daouda Mbaye vous parlez, mais Habib n'a jamais été à Limamoulaye.

    Il habitait Thiaroye Gare et a fréquenté le CEM Ndiawar Diagne de 1984 à 1989 (année blanche oblige).

    par la suite il a fréquenté le Lycée Maurice Delafosse avant de décrocher son BAC série B.

    Il n'a fait que 2 années à la faculté de Lettres au département de Lettres modernes avant d'être admis au concours du CESTI.

    Il est de la même promotion qu'Aboubackry Ba, de Samboudian Camara, de Issa Touré ect... de très bons journalistes qui sont à travers les médias.

    Bref je ne veux pas être long, je veux juste informer vrai, même si je connais connais tout son parcours...depuis le primaire.

    Il saura certainement de qui vient ce post s'il lit cet article.

    Prions pour lui afin qu'il maintienne sa droiture et sa déontologie
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    Auteur

    Telbi

    En Juin, 2012 (10:47 AM)
    La Cohérence du vote du 25 mars voudrait que l'on continue à se débarrasser du système Wade au soir du 1er Juillet en élisant une Assemblée de rupture avec Benno Bokk Yakaar qui cristallise l'essentiel des forces du 23 juin, des Assises Nationales qui œuvrent au service du Peuple. Je donnerai mon vote à Bokk Yakaar pour permettre une majorité de rupture à l'Assemblée.



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