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INONDATIONS, ORDURES ET INSALUBRITÉ TOTALE : Médina Gounasse dans la nasse

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INONDATIONS, ORDURES ET INSALUBRITÉ TOTALE : Médina Gounasse dans la nasse
Le quartier populaire Médina Gounasse situé entre Thiaroye Kao et Pikine Tally Boubess est incommodé par les mauvaises odeurs dégagées par les eaux usées. Complètement inondé pour la énième fois, Médina Gounasse se noie dans les eaux. Ses habitants désespérés et sans moyens se battent chaque jour pour maîtriser l’insalubrité totale qui y règne en maître absolu. Les ordures servent de décor.

« Où sont passés les 53 milliards de Fcfa du plan Jaxaay ? Le gouvernement n’a qu’à faire le bilan pour éclairer les populations. Avec les cités qui sont construites et les dégagements effectués, je parie que le 1/4 n’est pas investi. Alors où est réellement passé l’argent ? ». C’est le coup de colère de Madické Sène, vêtu en grand boubou de couleur rouge, adossé au mur de la parcelle 287 et observant avec impuissance la mare d’eau qui a bloqué la route venue du croisement de Tally Boubess. Le décor est simplement désolant. Toutes les maisons, une cinquantaine, sont prises en étau par ce long « fleuve » verdâtre aux eaux douteuses. « Nous sommes vraiment fatigués. Nous marchons dans les eaux avec nos enfants. Nos familles sont traumatisées. L’insalubrité est totale. Nous ne pouvons rien contre ces eaux. L’État doit nous aider d’avantage pour les évacuer. Nous sommes des pauvres citoyens. Quand il s’agit de voter, nous sommes mobilisés pour le faire. Pourquoi attendre alors pour nous secourir ? », déclare Cheikh Mbaye, responsable moral au niveau du quartier.

La loi des eaux

Mamadou Diallo, du fond de sa boutique, observe le mouvement des passants qui sautillent pour se tirer de l’étau des eaux qui imposent leur loi. Le prolongement de la route venue du croisement Tally Boubess est complètement impraticable à hauteur de la boulangerie Khalifa Ababacar Sy où s’arrêtent les taxis. À une dizaine de mètres près, la route est barrée par de gros pneus qui relient les deux trottoirs. Ils servent de points de passage aux résidents et aux visiteurs. « Chaque année, nous vivons le martyre de cette situation désespérée. Nous sollicitons de l’aide », dit-il avec résignation. Assis à la porte de sa maison, Salla Diouf observe les enfants qui ne font guère attention à la composition des eaux. Euphoriques et peu soucieux de ce décor diabolique, ils pataugent comme des crapauds, jouent et rient sans état d’âme. C’est le charme de leur jeune âge. « C’en est toujours ainsi depuis que j’habite ce quartier. Après chaque pluie, c’est l’inondation totale. C’est très grave. Plusieurs maisons ont été abandonnées. Je vis ici avec ma famille depuis 1973, mais chaque année, c’est comme ça », déclare le vieil homme.

En face, dans les eaux glauques, sont disposés de grands pneus de camions pour relier les deux trottoirs. Ces pneus mènent droit au domicile du vieux Babacar Faye, embastillé avec sa famille dans sa vétuste a maison prise en otage par les eaux. De l’intérieur de la maison pointe un tuyau pvc relié à un fût de 200 litres où un jeune garçon, Sadikh Faye, déverse l’eau recueillie des chambres pour le refluer à la rue. C’est la solution du moment pour maîtriser l’espace. « Je ne peux pas compter le nombre de sceaux que je verse chaque jour dans ce fût. Je passe d’une chambre à une autre, pour y diminuer l’eau qui ruissèle et jaillit de partout. Sinon, nous n’aurons pas où dormir la nuit », révèle ce jeune enfant d’une quinzaine d’années. Malade, sans ressources et vaincu par l’âge, Babacar Faye, assis à une chaise, son bâton adossé au pilier de la tante qui sert de couverture contre le soleil, révèle l’impuissance des populations de Gounasse face à ce désastre et dénonce la puanteur qui est invivable du fait de la composition des eaux. « Gounasse est une cuvette qui souffre du ruissellement des eaux provenant du Terminus Tally Boubess. Si l’État nous avait aidés à évacuer la rue, les eaux dans nos chambres seraient parties », suggère-t-il. « Il y a des gens qui profitent de la pluie pour vider leur fosse dans les eaux. C’est la raison de cette odeur nauséabonde. C’est sale et dangereux. Nous aimerons vraiment que des solutions soient apportées à ce phénomène », déclare le jeune Sadikh. Tout à coup, une grande femme entre dans le seuil de la maison, avec des bottes aux pieds. C’est Ndiaye, la maman de Sadikh. « Depuis une semaine, je ne suis pas sortie de chez moi, car les pneus ne peuvent pas supporter mon poids. C’est aujourd’hui que quelqu’un m’a prêtée ces bottes pour marcher dans l’eau. Sinon, je ne peux pas bouger, car ma peau est très sensible et irritable. S’il pleut, nous ne dormons pas », fait-elle.

Réquisitoire

Sur une distance de près de deux kilomètres et demi, les eaux font la loi de la rue et isolent la mairie et une bonne partie du quartier. À tout coin de rue, les flaques d’eau ornent le décor. Regroupés çà et là, aux portes des maisons, des habitants font le thé sans aucunement se soucier de l’insalubrité des lieux. Ils sont habitués à la situation. Malgré les vers éparpillés dans les rues et survolés par des hordes de mouches attirées par la puanteur et la saleté. Gora Sarr, maire de la ville, est décrié pour son manque d’engagement face à la situation de sa zone.

« La mairie ne s’occupe guère des populations. Gora Sarr utilise une seule motopompe pour protéger le périmètre de la mairie. Le reste, il ne s’en occupe guère. Aucune voiture ne peut traverser cette route devenue impraticable. Il faudra faire le tour, par le plan Jaxaay, pour accéder à la mairie », explique un vieil homme qui a préféré rester dans l’anonymat. « C’est difficile à dire, mais nos gouvernants ont simplement manqué de vision face à nos priorités. Les routes et les nouveaux ponts n’ont pas réglé le problème des embouteillages. Les ambulances éprouvent beaucoup de difficultés pour rejoindre les hôpitaux au centre ville. Regagner Kaolack serait plus aisé pour elles », a-t-il poursuivi. Et de se poser la question : « Qu’a-t-on réglé ? ». Une question qui revient sans cesse dans la bouche des gens qui pensent que le Gouvernement devait s’atteler à régler les problèmes sociaux au lieu de bâtir des routes pour le futur.

L’enveloppe de 300 millions récemment dégagée par l’État ne semble pas charmer les populations dont une partie ne connaît pas encore les tenants et les aboutissants du célèbre plan Jaxaay. « Le maire m’en a récemment parlé. Mais j’ai été convaincu par l’annonce faite à la radio. Cet argent malheureusement risque d’être mal géré », regrette Cheikh Mbaye, même s’il a salué la mesure.

En attendant, Gounass est dans les eaux, avec ses populations martyrisées dont une partie a été déplacée au gré des inondations antérieures. Une mosquée inondée et plusieurs maisons abandonnées rappellent ce sinistre. Dans les eaux, poussent de hautes herbes qui peuvent même loger des serpents. Selon les témoignages recueillis sur place, la nuit les moustiques prennent d’assaut les populations parmi lesquelles beaucoup tombent malades. « Le paludisme fait rage dans le quartier. Nos enfants souffrent beaucoup. Nous sommes sans solutions. Le service d’hygiène ne fait rien.

C’est terrible », regrette le vieux Babacar Faye. Le bassin de rétention est plein et les eaux non refluées retournent dans les maisons. Ibrahima Diop, chef de chantier du plan Jaxaay, qui s’occupe de la pompe qui retire les eaux du bassin, décline tout commentaire. « Aujourd’hui c’est dimanche, nous nous reposons. Je ne peux rien te dire. Il faut revenir demain », a-t-il déclaré pour esquiver nos questions. N’empêche, le problème est là, toujours entier et nécessite une action rapide et adéquate. Les populations, elles, souffrent.

Médina Gounasse est dans la nasse



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