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INSTITUT CHEIKHOUL KHADIM : Un « daara » moderne qui récuse l’aumône

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INSTITUT CHEIKHOUL KHADIM : Un « daara » moderne qui récuse l’aumône

Implanté à la cité Fadia, l’Institut Cheikhoul Khadim est un lieu de culte très différent des autres. Il offre un cadre propice à l’apprentissage du saint coran et abrite plusieurs dizaines d’élèves qui bénéficient d’une prise sanitaire en charge gratuite.

Il est 09 heures 30mn. La porte d’un immeuble s’ouvre. Peint en couleur blanche avec une porte en fer, ce bâtiment à deux étages avec des grilles qui, l’isolant du monde extérieur, donne l’impression d’une « prison », à la première vue. Dès qu’on franchit le seuil de l’immeuble, on entend des récitals de versets du saint Coran. Nous sommes à l’Institut Islamique Cheikhoul Khadim. Il est implanté dans la proche banlieue de Dakar, au quartier de Fadia, plus précisément à la cité Guéntaba 1. « Ce daara moderne (une école coranique) a été créé en 1994 grâce à de bonnes volontés. Lesquelles ont investi près de 84 millions de F Cfa », a confié le directeur de l’Institut, Sérigne Fallou Lô. Assis devant son ordinateur sur un fauteuil en cuir noir, le maître des lieux a accepté de nous recevoir sans qu’on ait demandé un rendez-vous.

Inauguré le 22 octobre 2000 par feu Serigne Mourtala Mbacké, fils cadet du fondateur du mouridisme, l’institut porte le nom de ce saint homme.

Prise en charge des talibés

Avec une capacité d’accueil de 88 talibés (élèves), cette école coranique qui reçoit des enfants de 06 à 10 ans maximum, dispense un enseignement religieux. Il comprend en son sein une direction, un logement pour les enseignants et talibés ou élèves et de salles de classe, offrant ainsi un toit aux talibés. Selon Fallou Lô, l’enseignement des versets du saint Coran est le fondement de cet établissement, non sans préciser que les 88 talibés sont pris en charge par l’institut. « L’institut Cheikhoul Khadim dépense mensuellement 1,1million de F Cfa par mois pour l’eau, l’électricité, la nourriture, l’entretien et les salaires des maîtres, entre autres », a-t-il souligné. A l’en croire, il est interdit de recevoir de la charité. D’ailleurs, une femme a été éconduite avec son plat de lakh (bouillie avec du lait) par Sérigne Lô qui estime qu’« un internat obéit à des règles ». « Dans cet Institut, l’aumône est formellement interdite. Nos talibés n’en reçoivent pas. C’est ce qui fonde la charte de notre daara. Nos talibés ne feront jamais ce que font certains », a-t-il indiqué. Non sans rappeler les dispositions de la charte de l’Institut. Une charte qui stipule que tout parent d’élève doit verser une somme de 25.000 F Cfa pour l’inscription de son enfant. S’y ajoute qu’il livre un matelas et une valise d’habits et verse 20.000 F Cfa par mois.

Maîtrise parfaite du Coran

Le directeur a indiqué que tous les talibés de l’institut Cheikhoul Khadim maîtrisent parfaitement le Coran. « Sur les 88 talibés, 42 d’entre eux ont fini de réécrire le livre coranique. Ce résultat à son avis, illustre le fruit de travail d’une jeune équipe de maîtres coraniques rompus à la tâche », a expliqué le directeur de l’institut. Après une demi-heure d’entretien avec le directeur, un coup de sifflet retentit. L’heure de la pause a sonné. Les élèves sortent des salles de classe. Certains se dirigent vers les toilettes. D’autres en profitent pour se détendre. A travers les grilles, ils observent la rue et les passants.

Certes l’institut joue un rôle sans commune mesure dans la cité. Cependant, les populations riveraines ne manquent pas de relever les questions d’insécurité. C’est le cas de cette voisine qui déplore l’état de la façade de l’immeuble. Selon elle, le bâtiment ne répond pas aux normes sécuritaires. « Les enfants courent un gros risque en cas d’incendie », a-t-elle confié. Cette préoccupation est d’ailleurs largement partagée dans la cité. Habillés tous deux en boubou traditionnel, deux habitants du quartier Guéntaba 1 abritant l’Institut ont aussi décrié l’état des locaux. « L’exiguïté des locaux empêche une bonne aération.

D’ailleurs, ces grilles montées au balcon de l’immeuble donnent au bâtiment l’aspect d’une prison », ont-t-ils indiqué. Non sans rappeler qu’offrir un toit aux talibés ne suffit pas. Quant à El hadji Ndiaye, il a soutient ne pas comprendre le refus de l’aide que propose les habitants de la cité à l’établissement. « Ils en font trop. Pourquoi refusent-ils l’aide des voisins alors que nous savons tous que les talibés ne mangent pas à leur faim », a-t-il tonné. M. Ndiaye d’ajouter que la promiscuité peut entraîner un manque d’hygiène et favoriser la propagation de maladies contagieuses.

Mais du côté de l’administration de l’institut, on tente de rassurer. Mouhamadou Bara Touré, dit Serigne Touré, soutient que la sécurité des jeunes talibés est prise en compte. « Nous avons une lourde responsabilité dans l’éducation de ces enfants. Ils doivent étudier dans la paix et la sécurité. C’est pourquoi nous avons posé ces grilles », a-t-il expliqué. Selon Serigne Touré, les talibés sont bien traités tout comme le corps enseignant. « L’administration nous a mis dans de bonnes conditions de travail. Une motivation qui nous pousse à aller de l’avant. C’est pourquoi nous asseyons, tant bien que mal, de relever le défi avec ces talibés », a-t-il indiqué.

Lourdes charges

La visite effectuée dans une des salles de classe a permis de constater de visu la nette différence. Sur le plan vestimentaire, les talibés du « daara » Cheikhoul Khadim sont bien habillés et dorment chacun sur un matelas même si quelques uns de ces matelas sont usés. Cet internat a un mode de fonctionnement particulier. Les heures de visites sont établies conformément au calendrier islamique. D’après un talibé, c’est à l’occasion seulement des grandes fêtes musulmanes (Korité et Tabaski) ou Magal qu’ils rendent visite à leurs familles. Le jeune garçon, sous le couvert de l’anonymat, a accepté de témoigner. « Mes parents me manquent beaucoup. Je mange à ma faim, mais cela ne suffit pas. Il faut dire que ce daara est très différent de chez moi », a-t-il souligné, l’air triste. Les talibés de cette école religieuse viennent de Dakar et des régions de l’intérieur.

Outre les 600 kg de riz consommés par jour, la direction affirme avoir recruté cinq femmes de ménage pour l’entretien des locaux et le linge des talibés. La restauratrice, Fatou Fall, soutient que les heures de repas sont bien respectées. Elle ajoute que la direction tient beaucoup à la qualité des repas. « C’est une fierté de travailler pour ces talibés. Nous sommes des mères de familles et nous partageons la douleur des talibés qui traînent un peu partout dans Dakar », a-t-elle déclaré.

Le directeur de l’Institut, un ancien émigré, révèle que le « daara » n’est que le prolongement de celui qu’il avait ouvert chez lui, à son retour au Sénégal. Né au Baol dans un village qui porte le même nom de famille que lui (Ndame Lô), Serigne Cheikh Fallou Lô, qui ne porte pas ses 59 ans, se définit comme un militant de l’islam. Très tôt attiré par le Coran, le Serigne Cheikh Fallou Lô, après avoir acquis de solides connaissances, il a pris le chemin de l’émigration. Il a séjourné au Gabon (1981), en France et aux Etats-Unis où il a vécu cinq ans. Il parle ainsi couramment anglais. « Je rends grâce au Tout-Puissant de m’avoir permis d’être à la tête de cet institut. Le premier « daara » que j’avais ouvert chez moi comptait seize talibés », a-t-il dit. L’éducation et la santé des talibés occupent une place de choix dans cet institut. Ainsi, les cours démarrent dès 05 heures du matin et finissent à 20 heures du soir, avec des pauses d’une heure. « Nous insistons beaucoup sur l’enseignement coranique et la culture islamique. Cet institut doit être une référence, un exemple à suivre afin d’éradiquer la mendicité des talibés qui va crescendo », a-t-il souhaité. En outre, il a affirmé que l’institut dispose d’une petite pharmacie. « Une bonne éducation dépend de la bonne santé de l’individu. C’est pourquoi nous saluons l’aide que nous apportent nos partenaires médecins. Ils nous ont offert beaucoup de médicaments pour la prise en charge médicale de nos talibés », a-t-il souligné.



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