(Correspondance) - Les élèves du lycée Djignabo de Ziguinchor ne sont pas restés insensibles aux événements qui secouent l'Université. Au contraire, ce sont des potaches choqués par le sort réservé à leurs aînés par les forces de sécurité qui se sont réunis hier dans l’enceinte de leur établissement. Et c’est pour décréter 48 heures de grève non renouvelables en soutien aux étudiants des universités de Saint-Louis et de Dakar. Un mouvement de grève que les élèves qualifient d’avertissement, car, promettent-ils, «si les étudiants ne trouvent pas satisfaction à leurs doléances, nous nous verrons dans l’obligation de les soutenir».
Ce sont donc des élèves déterminés à lutter aux côtés des étudiants qui ont vidé hier les salles de classe. «Nous ne pourrons pas rester en classe en sachant que nos grands frères sont malmenés, harcelés», se défend, I. S, un élève du lycée Djignabo. Pour lui et pour beaucoup de ses camarades, «notre devoir est aujourd’hui de montrer à nos frères qu’ils ont notre soutien et que nous irons jusqu’au bout pour les soutenir, quel qu'en soit le coût». Mieux, disent-ils, «ce qui se passe à l’Université nous regarde à plus d’un titre, parce que nous y serons un jour». Autant de raisons qui ont poussé les potaches à vider les salles de classe qui resteront orphelines de leurs pensionnaires, pour quarante-huit heures, au moins, en attendant l’évolution de la situation dans les deux universités. Même s’il a été déclenché en guise de soutien, ce mouvement d’humeur a réveillé de mauvais souvenirs au sein de la population. Laquelle garde encore en mémoire les événements sanglants de janvier dernier qui ont fait des dizaines de blessés. Un des blessés, une jeune fille, est d’ailleurs internée jusqu’à présent dans un hôpital dakarois où elle suit des soins après avoir reçu des éclats de balles. Et ce n’est pas seulement à Ziguinchor que la violence policière a fait des victimes puisque Oussouye aussi a eu sa part quand les forces de sécurité ont tiré sur une foule d’élèves qui manifestait. Bilan : deux blessés dont un dans un état grave. Un état qui a d’ailleurs nécessité un transfert à Dakar. Ces événements douloureux ont resurgi hier quand les élèves du lycée ont décidé de déserter les classes. Heureusement qu’ils sont rentrés tranquillement chez eux, sans heurts, au grand soulagement des parents qui commençaient à s’inquiéter.
... au moment où le Sels et l’Ues vident les classes
Outre le mouvement d’humeur des élèves du lycée Djignabo, les enseignants affiliés à l’union des enseignants du Sénégal (Ues) et au syndicat ces enseignants libres du Sénégal (Sels) ont eux aussi vidé les classes pour manifester leur mécontentement face à ce qu’ils considèrent comme du mépris de la part des autorités. Ces milliers d’enseignants ont, tout simplement, décidé de croiser les bras pour montrer au gouvernement le ras-le-bol de tout un corps«marginalisé». C’est du reste le sentiment des volontaires, vacataires, maîtres et professeurs contractuels. Et pendant 48 heures, ces derniers resteront chez eux. C’est le moyen que ces enseignants ont trouvé pour ramener le gouvernement à la table des négociations. Un fil du dialogue rompu depuis le 13 décembre dernier quand les autorités gouvernementales ont décidé de quitter la table des négociations. Une attitude que les responsables de l’Ues et du Sels n’ont jamais cessé de dénoncer. Pour eux, «l’Etat joue au dilatoire en faisant semblant de vouloir négocier alors qu’il tourne en rond». Un constat qui va d’ailleurs pousser le Sels à exécuter son quatrième plan d’action. Et cela, après la réunion du bureau syndical tenue le 15 février dernier. Le premier acte de ce plan est la grève déclenchée hier sur toute l’étendue du territoire national. Un mouvement largement suivi à Ziguinchor-commune et dans le département. Hier matin, toutes les écoles de la ville ont été fortement secouées par cette grève qui a laissé impuissants beaucoup de directeurs d’école qui n’ont pu que constater les «dégâts» causés par l’absence de leurs maîtres. Lesquels constituent d’ailleurs l’essentiel de l’effectif dans les écoles primaires de la ville.
La situation était beaucoup plus grave dans les campagnes où l’effectif de certaines écoles est composé à cent pour cent de volontaires, de maîtres contractuels, ou d’enseignants membres du Sels. Les collèges et autres lycées de la commune et même du département n’ont pas été épargnés par ce mouvement de grève qui a mobilisé aussi les professeurs contractuels et vacataires. Des enseignants qui vivent la même situation précaire que leurs collègues du primaire.
Aujourd’hui, tous ont la même préoccupation : amener les autorités à engager la discussion pour trouver des solutions aux problèmes de ces corps enseignants qui sont les parents pauvres du système éducatif. Il s’agira, en fait, de pousser le gouvernement à apporter des solutions aux problèmes des enseignants. Lesquels ont pour noms, entre autres, indemnités de logement et d’enseignement, l’augmentation du quota de reclassement, etc. Des préoccupations pour lesquelles les enseignants regroupés au sein du Sels et de L’Ues ont engagé ce mouvement de grève qu’ils entendent poursuivre jusqu’à satisfaction totale.
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